Dossier : quel avenir pour le moteur thermique ? Stop ou encore ?
L’Union européenne veut interdire la vente des véhicules neufs à moteur thermique et moteur hybride à partir de 2035. C’est un projet qui fait l’objet d’intenses discussions et sur lequel les pays et les représentants des constructeurs ne sont pas tous d’accord. Afin d’être prêts pour cette date fatidique, les constructeurs investissent massivement dans les motorisations électriques. Est-ce pour autant la fin du moteur thermique ? Pas si sûr. On vous explique pourquoi.
Retenez bien cette date : 2035. Cette année-là, les moteurs thermiques devraient cesser d’équiper les voitures neuves en Europe. Enfin, c’est que souhaite l’Union européenne qui pour limiter le plus possible les rejets de CO2 se focalise sur l’automobile responsable de 54 % des rejets de gaz à effet de serre (GES) du secteur des transports (en France le transport routier, maritime, ferroviaire, aérien représente 31 % du total des GES*). L’objectif de l’Union européenne est ambitieux puisque d’ici à 2030, les rejets des voitures neuves devront baisser de 55 % et devront être à zéro en 2035. Pour les utilitaires légers, ce sera 50 % pour 2030 et zéro en 2035. Ces échéances rapides font que les constructeurs se concentrent sur les voitures électriques (qu’elles soient à batteries ou à pile à combustible) et abandonnent les moteurs essence, diesels et même hybrides. Car pour ceux qui n’atteindraient pas les objectifs, ils devront payer de fortes amendes. De plus, la norme Euro 7 s’annonce (elle devrait être appliquée en 2025) et elle pourrait condamner certaines catégories de véhicules, en particulier les petites autos. Avec des moteurs de plus en plus coûteux à produire, le tarif de ces véhicules augmentera tellement qu’ils seront alors impossibles à vendre.
Ça discute ferme à Bruxelles
Face aux demandes de la Commission européenne, les discussions sont animées et si de nombreux pays se disent prêts à suivre ce qu’elle propose, des voix discordantes se font entendre. C’est le cas de l’Allemagne, de la France et de l’Italie. Le gouvernement français voudrait que les motorisations hybrides puissent être vendues quelques années de plus (jusqu’en 2040), l’Allemagne est en accord avec la France et voudrait également conserver les moteurs thermiques, mais les alimenter par du carburant synthétique qui sera rendu pratiquement neutre en CO2 (Audi, Mazda et Porsche** travaillent sur ce type de carburant), tandis que l’Italie estime que la décarbonisation ne peut devenir synonyme d'électricité. C’est que pour ces pays où l’industrie automobile est importante, le passage au tout électrique pourrait entraîner une perte de plusieurs centaines de milliers d’emplois (la voiture électrique utilisant moins de moyens humains pour la production et l’entretien) que ce soit directement chez les constructeurs ou chez leurs fournisseurs. Et puis, il faut que l’intendance suive, car pour le moment l’Europe est en panne de bornes. L’an dernier la Cour des comptes européenne a même épinglé l’UE, car les pays membres de l’Union sont loin d’atteindre le million de points de recharge ouverts au public à l’horizon 2025, ce qui était l’objectif fixé dans le pacte vert.
BMW croit encore aux motorisations à combustion interne
En attendant la norme Euro 7 et ce que décidera l’UE en 2035, déjà de grandes villes chassent l’auto hors de leurs murs, en particulier les voitures fonctionnant au diesel. C’est pourquoi certains constructeurs ont fait le choix du tout électrique dans un avenir relativement proche (mais ils peuvent encore repousser cette échéance). Pour Audi ce sera 2033, Mini souhaite atteindre l'objectif zéro émission à l’horizon 2030, Opel et Fiat ont annoncé la date de 2028, Renault prévoit le tout électrique pour 2030, Ford l’annonce pour la même date, etc. Mais pour l’instant, bon nombre de constructeurs continuent à miser sur le thermique en proposant des solutions plus efficientes et rejetant moins de CO2 comme le mild-hybrid, l’hybride simple ou l’hybride rechargeable. De nombreuses marques réduisent l’offre diesel de leur catalogue et mettent en avant le moteur essence, le plus souvent “downsizé“. On a vu ainsi dernièrement BMW annoncer l’arrêt officiel du V12, qui équipait la Série 7 (M760Li xDrive) en France jusqu’à l’an dernier, tout en précisant que la marque allait continuer à produire des moteurs thermiques (en particulier des six cylindres et huit cylindres essence et diesel) qui seront encore plus propres. De plus, en présentant son concept-car BMW XM, la marque munichoise veut lancer une technologie hybride ultra-sportive puisque ce prototype dispose d’un moteur V8 hybride rechargeable de 750 ch (c’est le moteur le plus puissant sur une BMW de série). Le modèle de série qui devrait être dévoilé cette année aura droit à cette motorisation afin de fêter dignement les 50 ans du label BMW Motorsport.
L’espérance de vie va grimper pour les autos à moteur thermique
Pour les constructeurs, si la fin du moteur thermique devait réellement arriver en 2035 en Europe, il reste encore de nombreuses années pour écouler des moteurs thermiques. D’autant plus, que le marché européen n’est pas le marché mondial et que les constructeurs allemands par exemple, continueront à vendre leurs moteurs thermiques sous d’autres cieux. Et puis, la voiture thermique qui sera achetée avant 2035 continuera à rouler bien après. Il est sûr que ceux qui ne peuvent se résoudre à passer au tout électrique, en raison du tarif des voitures électriques, ou du besoin d’un véhicule qui puisse rouler sur de grandes distances ou bien encore de ne pas avoir les moyens de recharger son véhicule chez soi ou près de chez soi, vont sans doute conserver le plus longtemps possible leurs véhicules à bloc thermique.
De l’essence et de l’hybride pour les dernières nouveautés
C'est pour cela que les constructeurs continuent à investir dans le moteur thermique et que les nouveaux modèles pourront recevoir dans leur compartiment moteur, des blocs à combustion interne avec micro-hybridation, des motorisations hybrides simples et rechargeables et bien sûr du 100 % électrique. Ainsi le nouveau SUV Renault Austral qui vient d’être dévoilé dispose de motorisations essence mild hybrid (130, 140 et 160 ch), et aussi de l’hybride non rechargeable en 160 et 200 ch. Le break baroudeur Dacia Jogger qui débute ne dispose que de moteurs thermiques, un 1.0 Eco-G de 100 ch à bicarburation essence et GPL et un bloc 1.0 TCe de 110 ch qui ne carbure qu’à l’essence. Demain les nouveaux Dacia Duster et Dacia Bigster auront droit à de l’hybride E-Tech, mais aussi à des motorisations essence, le nouveau Peugeot 3008 qui arrivera en fin d’année prochaine aura droit à sa version électrique e-3008, mais disposera d’un nouveau bloc 1.2 PureTech essence avec ou sans système mild hybrid 48V et il y aura aussi de l’hybride rechargeable. Chez Citroën alors que l’on fête l’arrivée de la nouvelle Citroën C5 X (motorisations essence 130 et 180 ch et hybride rechargeable de 225 ch), on travaille sur le renouvellement des Citroën C3 et Citroën C3 Aircross qui devraient recevoir des motorisations essence mild hybrid mais aussi une motorisation 100 % électrique.
Même si l’électrique est souvent à l’honneur en ce moment, le moteur thermique n’a pas dit son dernier mot et les prochaines nouveautés automobiles ne seront pas toutes électriques.
*À noter que par convention internationale, les transports internationaux aériens, maritimes et fluviaux sont exclus du total national. Seules sont prises en compte les émissions des déplacements effectués entre deux ports ou aéroport localisés en France. Pour le transport routier, les émissions proviennent des véhicules français, mais également des poids lourds étrangers réalisant du transit international. (Source https://ree.developpement-durable.gouv.fr)
**Porsche et Siemens Energy ont lancé la construction en 2021 d’une usine destinée à la production de carburant quasiment neutre en CO2 (eFuel) à Punta Arenas, au Chili. L’usine pilote est en cours de construction au nord de Punta Arenas, en Patagonie chilienne. Elle devrait produire environ 130 000 litres d'eFuels en 2022. La capacité sera ensuite augmentée pour atteindre environ 55 millions de litres en 2024 et environ 550 millions de litres en 2026. De plus, Porsche utilisera les eFuels, carburants de synthèse quasiment neutres en CO2, dans le sport automobile avec les 911 GT3 du championnat Supercup à partir de cette année.
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