Demain, la fin du Diesel ?
Un bonus écologique qui cible les rejets de CO2, rien de tel pour mettre en avant les qualités du Diesel et les ventes de ce type de motorisation sont au plus haut. Une tricherie caractérisée sur les modèles équipés de moteurs “gazole“ du groupe Volkswagen et le Diesel n’est plus en odeur de sainteté. L’affaire a éclaté, Il y a un peu plus de deux ans, et depuis les ventes de voitures équipées de TDI, dCi, HDi, TDCi, sont en chute libre. Cela veut-il dire que le Diesel est condamné ? Des éléments de réponse avec notre dossier spécial Diesel.
L'affaire “dieselgate“ de Volkswagen a fait beaucoup de mal au "moteur gas-oil". Mais ce n’est pas la seule cause de sa descente aux enfers. La chute des ventes des véhicules équipés de moteurs de ce type a commencé bien avant septembre 2015. Après une envolée des ventes en France en 2008, année de la création du bonus-malus écologique (plus de 77 % des voitures neuves vendues dans l’Hexagone étaient alors équipées avec des blocs diesels), la courbe des ventes s’est inversée à partir de 2009 pour se maintenir à un haut niveau, à un peu plus de 70 %. C’est à partir de 2012 que la décrue commence. De 73 % on passe à 64 % à 2014, pour atteindre sur les dix premiers mois de 2017, seulement 46 % des ventes. Ce “relatif désintérêt“ du Diesel n’est pas un mal français. En Europe, c’est partout le même constat, de 56 % en 2011, la tendance est à la baisse. Désormais, c’est sous la barre des 50 % que l’on navigue. Cela reste cependant important et l’on comprend mieux pourquoi les constructeurs ont du mal à se désintoxiquer du Diesel.
Un peu d’histoire
Le moteur à allumage par compression inventé par Rudolf Diesel en 1897 va d’abord équiper (en raison d’un poids important dû à de nombreux renforts de culasse, cylindres, vilebrequin…) des installations fixes avant d’équiper des engins lourds. Ce n’est qu’en 1921 que Peugeot teste un moteur de ce type sur une automobile (Type 156. Le moteur est un Diesel deux-temps conçu par l’ingénieur Tartrais), puis Benz créé un deux cylindres pour les tracteurs et Mercedes équipe une flotte de taxis… En 1936, Mercedes met en production la 260D pour le grand public, Peugeot va suivre deux ans plus tard avec la Peugeot 402. Le Diesel se démocratise. Après la Seconde Guerre mondiale, la France doit se relever. Les pouvoirs publics afin de relancer l’économie vont aider l’agriculture, les artisans, les transporteurs, grands utilisateurs de moteurs diesels. Les crises pétrolières de 1973 et 1979 et l’arrivée des moteurs turbocompressés vont aider au développement du Diesel qui consomme moins et bénéficie d’aides fiscales de la part du gouvernement français (moins de taxes sur le gazole que sur l’essence, alors que le gazole est plus coûteux à produire). Tout cela va inciter les constructeurs français à investir sur les moteurs diesels et devenir incontournables dans ce secteur.
Des débuts difficiles
À ses débuts sur le marché automobile, le Diesel ne va pas réussir à s’imposer facilement. Tout d’abord en raison d’un coût plus élevé à l’achat qu’un moteur essence, d’un entretien également plus coûteux. Il était aussi victime d’une mauvaise image de marque. Car dans les années soixante-dix (après le premier choc pétrolier) un Diesel était souvent moins puissant et moins performant qu’un bloc essence, il était nécessaire d’attendre avant de démarrer (bougies de préchauffage), il dégageait des fumées noires, il était bruyant et vibrait beaucoup. Les constructeurs vont essayer de gommer ou d’atténuer la plupart de ses défauts. Malgré tout, certains inconvénients sont difficiles à éliminer et parmi ceux-ci, la pollution figure en bonne place.
Des progrès significatifs
Le turbocompresseur à géométrie variable va donner des ailes au Diesel, l'injection directe à rampe commune et l'injection très haute pression vont aussi le rendre très performant. De plus, ce type de moteur affiche un très bon rendement et permet de faire de long parcours sans être obligé de ravitailler en carburant. L’arrivée du Filtre à particules, le célèbre FAP inauguré par la Peugeot 607, puis les pièges à Oxyde d’azote/NOx (systèmes SCR et EGR) vont également contribuer à baisser la pollution du Diesel. Mais l’affaire Volkswagen en 2015 (dieselgate), est venue prouver que les moteurs diesels modernes n’étaient pas aussi vertueux que les constructeurs le prétendaient. Un bloc diesel en "utilisation de tous les jours" pollue plus ce qu’annonce la brochure du constructeur. Car s’il rejette moins de CO2 (gaz à effet de serre contribuant au réchauffement climatique) qu’un bloc essence, il rejette plus d’oxydes d’azote (NOx = monoxyde d'azote NO + dioxyde d'azote N02), irritants pour l’appareil respiratoire. Les oxydes d'azote sont aussi considérés comme responsables de maladies cardiovasculaires. Enfin, il y a les particules fines, classées cancérigènes par l’OMS.
Interdit de ville
Pour des raisons sanitaires, le Diesel est mis sur le banc des accusés. Paris veut l’évincer dès 2024 (pour l’essence ce sera 2030) sans que soit vraiment expliqué comment cela se fera. Puisque la municipalité indique que cela ne passera pas par des mesures d’interdiction pure et simple… En entendant d’en savoir plus, il est sûr que l’automobile, qui rappelons-le n’est pas l’unique source de pollution (l’agriculture, l’industrie manufacturière, le chauffage individuel ou collectif sont également fautifs), est montrée du doigt. Et de toutes les automobiles, celles équipées de moteurs diesels en particulier, sont dans le collimateur des pouvoirs publics.
Remise à niveau
Cette mise en avant des défauts des moteurs diesels a des conséquences en termes d'achat. Un véhicule équipé d’un moteur fonctionnant au gas-oil n’a plus le même pouvoir de “séduction“ qu’autrefois. Ce n’est pas plus mal, car la majorité des voitures “gazole“ a été achetée sans que leur achat soit vraiment justifié par un kilométrage annuel important (soit plus de 15 000 km/an). De plus, beaucoup ne quittent pas la ville ou ne font que des kilométrages ridicules. Ce coup de projecteur sur les "méfaits" du Diesel va aussi obliger les constructeurs à soigner leurs systèmes de dépollution. Ils vont y être également forcés par les nouvelles normes antipollution et le cycle de mesure normalisé qui va être utilisé (Cycle WTLC, mais aussi le RDE réalisé en condition normale d’utilisation, plus réaliste en termes de consommation et de rejets polluants, au lieu du Cycle NEDC, inadapté et réalisé en laboratoire) pour les homologations.
Baisse des ventes prévue
Avec des systèmes de dépollution qui vont renchérir le prix des autos, une augmentation du carburant gas-oil (du fait d’un changement de taxation), la part de marché des véhicules équipés de moteurs diesels devrait chuter. Le Cabinet Alix Partners qui s'intéresse aux sujets qui affectent matériellement l'avenir des organisations, annonce d’ores et déjà le chiffre ahurissant de 9 % en 2030! Moins de 10 %, alors qu’actuellement la proportion de voitures diesels est d’un peu moins de 50 %, si une telle baisse est confirmée, les voitures diesels d’aujourd’hui risquent de devenir “collector“. Mais entre les prévisions et la réalité, il pourrait y avoir de grosses différences. Le Diesel n’a pas forcément dit son dernier mot.
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