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Voiture électrique : pourquoi vous y viendrez (tôt ou tard)

Dans Ecologie / Electrique / Véhicules électriques

Pierre-Olivier Marie , mis à jour

Ce samedi avait lieu l’e-Prix de Paris, étape française d’un championnat de monoplaces électriques dont la vocation est de promouvoir la mobilité dite propre. C’est l’occasion pour Caradisiac de s’intéresser aux (porteuses) perspectives d’avenir des motorisations « zéro émission » pour l’automobile de M.Tout-le-monde.

Voiture électrique : pourquoi vous y viendrez (tôt ou tard)

Selon toute probabilité, vous faites partie des 97,9% d’automobilistes qui n’ont pas acheté de voiture électrique ou hybride rechargeable neuve l’an dernier. Selon toute probabilité (bis), le fait que vous lisiez cet article laisse toutefois à penser que vous faites partie des 39 % des Français qui considèrent que le véhicule électrique est en mesure de répondre à leurs besoins de mobilité.

Caradisiac braque aujourd’hui ses projecteurs sur une technologie qui suscite une curiosité croissante à travers la planète. Cela se traduit chez nous par des ventes en hausse de de 44% au premier trimestre 2019 par rapport à la même période un an plus tôt (10 552 unités écoulées contre 7304), et ce alors même que les ventes globales de voitures particulières baissaient de 0,6% sur la période.

Dès son premier mois de commercialisation, la Tesla Model 3 s'est hissée en tête des ventes de voitures électriques en Europe: 3 630 unités écoulées, contre 2 884 Renault Zoé (source Jato Dynamics).
Dès son premier mois de commercialisation, la Tesla Model 3 s'est hissée en tête des ventes de voitures électriques en Europe: 3 630 unités écoulées, contre 2 884 Renault Zoé (source Jato Dynamics).

Les choses évoluent, bien aidées il est vrai par une offre de plus en plus large, ce qu’illustre aussi bien une Tesla Model 3 à l’excellent démarrage commercial qu’une Porsche Taycan qui compte déjà plus de 20 000 acheteurs potentiels à travers le monde, lesquels ont déjà pré-réservé leur voiture via un acompte. Les constructeurs généralistes ne sont bien sûr pas en reste, avec notamment un groupe Renault qui annonce qu’il passera de 4 à 8 modèles électriques d’ici 2022.

On assiste donc à une montée en puissance de la mobilité à émissions faibles (hybride rechargeable) ou nulles, dont nous allons vous détailler ci-dessous les principaux moteurs de croissance. La voiture électrique, ça va marcher parce que…

 …cela correspond aux besoins quotidiens de la plupart des automobilistes

Une récente étude Ipsos/Vinci Autoroutes montre que 75% d’entre nous utilisent leur voiture pour aller travailler. Si l’on considère que la distance domicile-travail s’établit en moyenne à 15 kilomètre (chiffres de l’Insee), la somme des trajets hebdomadaires s’établit à 150 km, ce qui représente à peine la moitié de l’autonomie d’une Renault Zoé en conditions réelles d’utilisation.

…les entreprises s’y mettent

Si les entreprises et ceux qui les fournissent promeuvent l’électricité, l’évolution du marché peut être rapide. Bien que rien ne les oblige à faire bénéficier leurs salariés d’un « droit à la prise » (contrairement à ce qu’il se passe pour les habitants d’un immeuble), les entreprises doivent de plus en jouer le jeu de l’électromobilité: « le pré-équipement en points de charges d’une partie des parkings d’entreprise est obligatoire depuis 2012 pour les bâtiments neufs ou rénovés et depuis 2015 pour les bâtiments existants », rappelle EDF.

Les trois quarts des précommandes de la nouvelle 208 concernent sa version électrique (e-208).
Les trois quarts des précommandes de la nouvelle 208 concernent sa version électrique (e-208).

« La maturité des infrastructures de recharge publique est importante », commente Olivier Debuquoy, consultant véhicule électrique pour LeasePlan, qui figure parmi les principaux acteurs de la gestion de flottes (1,8 million de véhicules dans 30 pays) et lance actuellement une carte permettant d’accéder à tous types de points de charge. « Cependant, nous constatons que les conducteurs de voitures électriques rechargent 60% de leur temps à domicile et 30% au bureau. En leur proposant un chargeur sur chacun de ces lieux, ainsi qu’une carte de recharge en itinérance, nous couvrons ainsi 100% de leurs besoins. »

Dans son rapport 2018, l’Observatoire du véhicule d’entreprise montre d’ailleurs que 44% des entreprises européennes ont l’intention (si ce n’est déjà fait) de mettre à disposition de leurs salariés des véhicules à énergies alternatives.

…les réseaux de charge s’étoffent…

A la fin mars 2019, on dénombrait en France 25 880 points de recharge ouverts au public, chiffre qui traduit une hausse de 4 % depuis janvier 2019…et de + 29 % par rapport à fin mars 2018 ! « Cela représente 1 point de recharge pour 6,8 véhicules légers électriques en circulation », précise-t-on à l’Avere-France, association de promotion de la mobilité électrique.

Voiture électrique : pourquoi vous y viendrez (tôt ou tard)Le nombre de points de charge a progressé de 29% depuis un an.

« Le programme Advenir permet de réduire de 40 % les coûts d'achat et d'installation en finançant jusqu'à 1 860 euros par point de recharge et offre des facilités pour l'installation de bornes à la demande », rappelle Cécile Goubet, Secrétaire Générale de l’organisme. « Une optimisation du maillage du territoire est possible en développant un système d'installation à la demande à l'instar de Strasbourg ou Saint-Etienne, où les automobilistes peuvent choisir l'emplacement des futures bornes. Il est également possible de réduire les coûts en installant , comme cela a été testé avec succès à La-Roche-sur-Yon ».

…et notamment sur autoroute

Les 25 880 bornes évoquées plus haut sont des modèles classiques, souvent critiqués pour la lenteur de la charge qu’ils assurent (même si ça progresse : « en temps de charge on est à 80 km en 30 mn en cycle WLTP, et l’idée est d’arriver à 150 km en 15 mn en 2022. L’objectif est de quadrupler la vitesse de charge », expliquait récemment Gilles Normand, patron de la mobilité électrique au sein du groupe Renault, dans une interview accordée à Caradisiac).

Le réseau de bornes Ionity se déploie progressivement le long des autoroutes d'Europe. Objectif: 120 km maximum entre les points de charge.
Le réseau de bornes Ionity se déploie progressivement le long des autoroutes d'Europe. Objectif: 120 km maximum entre les points de charge.

D’où l’intérêt, dans le cadre du développement d’une mobilité électrique à grand rayon d’action, de réseaux de charge rapide comme Ionity (jusqu’à 350 kW). Piloté par un consortium de constructeurs automobiles (BMW, Daimler, Ford et le groupe Volkswagen), celui-ci devrait bientôt compter 400 stations (6 bornes en moyenne pour chacune d’entre elles) le long des principales autoroutes d’Europe, avec une interdistance maximale de 120 km entre deux points de charge. Même si l’essor de Ionity se montre plus lent que prévu, la promesse est belle.

Tesla vient quant à lui de présenter la troisième génération de son Superchargeur, dont la puissance de 250 kW promet de franchir la barre des « 1000 miles (1600 km) à l'heure » de récupération d'autonomie. « Une Model 3 Grande Autonomie opérant de façon optimale peut ainsi récupérer près de 120 km en 5 minutes », assure ainsi la marque. « Cette nouvelle génération, combinée à d’autres améliorations, permettra à nos clients de réduire de 50% en moyenne le temps consacré à la recharge dans le cadre d’un long trajet. » Rappelons que le réseau de Superchargeurs Tesla se compose aujourd’hui de 430 stations en Europe et 66 en France (soit 530 points de charge).

De l’avis de nombreux acteurs du secteur, la clé du développement de l’électrique réside dans le développement de ces réseaux de charge rapide : « mieux vaut investir dans les infrastructures de recharge rapide sur autoroute que dans les batteries. Si une batterie à 1 000 km d’autonomie doit peser une tonne, ça n’est pas intéressant », commentait récemment Yves Bonnefont, patron de DS, lors d’une table ronde consacrée à la transition énergétique.

…l’offre crée la demande

La mobilité électrique a ceci de particulier que ce sont les constructeurs automobiles, à travers des produits toujours plus aboutis, qui sont en mesure de créer la demande. La plupart d’entre nous pourra répondre à l’appel de la mobilité « propre » si celle-ci répond à ses besoins (et ses moyens, bien sûr).

Contraints pas la législation à limiter leurs émissions de CO2 à 95 g/km à l’horizon 2021, en même temps que mis sous pression par des élus qui veulent progressivement réduire l’accès des voitures à moteurs thermiques aux grandes villes, les industriels n’ont guère d’autre choix que de développer les modèles électriques au sein de leur gamme.

BMW et les autres constructeurs premium allemands préparent leur grande contre-offensive face à Tesla.
BMW et les autres constructeurs premium allemands préparent leur grande contre-offensive face à Tesla.

De BMW (gamme i) à Mercedes (avec sa marque EQ) en passant par Volvo, Audi (e-tron) ou Porsche (avec le Taycan, notamment), les constructeurs premium ont l’intention de rapidement rattraper leur retard sur l’Américain Tesla. Du côté des généralistes, de Renault (qui lancera bientôt la nouvelle Zoé et promet des autonomies de 500 km à l’horizon 2022) à Volkswagen en passant par Ford ou Peugeot (avec l’e-208, à laquelle s’ajoutera une gamme de modèles hybrides rechargeables), l’électrification file là aussi bon train. « Plus il y aura de marques, plus il y aura de potentialités et plus il y aura de clients pour considérer le véhicule électrique. Il y aura donc plus d’acheteurs », résume Gilles Normand (Renault).

Voiture électrique : pourquoi vous y viendrez (tôt ou tard)
Discipline très spectaculaire, la Formula E monte progressivement en puissance. Selon Alejandro Agag, promoteur de la discipline, "la F1 deviendra électrique un jour. Quand? Je ne sais pas, mais on y travaille. Dans 50 ans, elle sera électrique."

 

…les prix vont baisser

« Tous les constructeurs automobiles continuent d’investir fortement dans leurs portefeuilles de voitures à motorisation alternative, notamment électriques », déclarait récemment Erik Jonnaert, Secrétaire générale de l’Association des constructeurs automobiles européens (ACEA). «Cependant, la réalité est que les consommateurs ne se précipitent pas pour acheter ces véhicules en grand nombre. »

Les batteries voient leurs tailles se réduire et leurs tarifs fondre.
Les batteries voient leurs tailles se réduire et leurs tarifs fondre.

Rien de plus vrai, mais la bonne nouvelle est que le surcoût des modèles électriques se réduit chaque année. La dernière étude Bloomberg NEF montre que le « point de croisement », moment à partir duquel les technologies thermiques et électriques seront au même prix, se rapproche rapidement. On l’évaluait à 2026 en 2017, à 2024 en 2018, et il serait maintenant fixé à 2022 pour les gros véhicules vendus dans l'Union européenne, ceci grâce à la très rapide réduction des coûts de la batterie électrique : « D'ici 2025, la batterie ne représentera plus que 20% du coût total du véhicule », commentent les auteurs du rapport. « Le fait de choisir une voiture électrique plutôt que son équivalent thermique sera bientôt juste une question de goût, pas d’argent », concluent-ils.

…le réseau électrique pourrait très bien supporter un parc « zéro émission »

Un des arguments souvent employés par les « anti »-électrique réside dans  l’incapacité du réseau  français à fournir l’énergie nécessaire. Or, pas d’inquiétude à avoir sur ce point : « la difficulté réside davantage dans l’appel de puissance que dans l’énergie totale consommée. Un parc automobile français composé uniquement de véhicules électriques consommerait près de 90 TWh par an. Ce surplus de consommation est gérable : il correspond à 20 % de la consommation d’électricité française ou à la quantité d’électricité exportée par la France en 2015 », détaille une note de France Stratégie.

Voiture électrique : pourquoi vous y viendrez (tôt ou tard)
Les centrales françaises pourraient suppporter un parc automobile uniquement compoosé de véhicules électriques.

Le problème viendrait plutôt de la concomitance des recharges, qui pourrait « linduire des appels de puissance considérables, que ne pourrait supporter notre système électrique. Un parc de 30 millions de véhicules électriques se rechargeant en même temps à 19 heures, même lentement à 3 kW, nécessiterait une puissance supplémentaire de 90 GW, soit un quasi doublement de la demande de pointe actuelle. Une gestion intelligente, visant à répartir la recharge sur 24 heures, doit donc être prévue dès le départ. Elle suppose la mise en place d’une structure tarifaire adaptée, évoluant en fonction de la demande, avec possibilité pour le gestionnaire du réseau d’interrompre les recharges, voire de soutirer l’énergie contenue dans les batteries des véhicules particuliers, quitte à rémunérer le service rendu. »

On songe au passage au spectre d’une surtaxation de l’électricité-carburant, dans un pays déjà champion des taxes sur l’automobile. « Le fait qu’il y ait des taxes en France, ce n’est pas une nouveauté ça sera toujours le cas. Ce qu’il faut voir c’est l’efficience énergétique. Un véhicule thermique c’est 45% d’efficience énergétique, un véhicule électrique c’est 90% à 95%. Même si vous taxez un peu ou beaucoup celui-ci, in fine il y aura toujours un écart d’efficience en sa faveur », rassure toutefois Gilles Normand (Renault).

                                                                Mobilité sous tension

Le propos ici n'est pas de se voiler la face sur les limites de la voiture électrique et les immenses défis qui lui restent à relever. Au manque d’autonomie, à la faible infrastructure de charge et au surcoût à l’achat s’ajoutent notamment les questions de l’extraction des métaux rares, de la production de l’électricité dans des pays où celle-ci est créée par des centrales à charbon, ou bien encore le spectre de la taxation de l’ « électricité-carburant » (liste non exhaustive). Bref, de nombreux obstacles restent à franchir avant que les masses ne roulent « propre »

Pour autant, les batteries voient leur taille se réduire et coûtent de moins en moins cher, l’offre des constructeurs s’étoffe et les réseaux de charge accélèrent et se développent rapidement. A cela s’ajoute un contexte d’électrification globale de la mobilité, des vélos (marché en hausse de 21% l'an dernier en France) aux autobus. Les contraintes sont certes différentes de celles d'une automobile, mais cela contribue à modifier les habitudes.

Surtout, les choses avancent vite. Très vite, même. Il y a moins de dix ans, qui aurait prédit que la voiture de l'année 2019 serait une Jaguar "zéro émission", ou que l’une des nouveautés les plus attendues serait une berline électrique Porsche de 600 ch, capable de passer de 0 à 100 km/h en moins de 3,5 secondes, et forte de 500 km d’autonomie ?

Voiture électrique : pourquoi vous y viendrez (tôt ou tard)La Porsche Taycan définitive sera dévoilée en septembre. Les prototypes totalisent près de six millions de kilomètres, dont deux millions de kilomètres d’endurance.

 

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