Déjà lancée plus tôt cette année au Japon et en Amérique du Nord où elle a été écoulée à plus de 11 000 exemplaires, la Toyota Prius Rechargeable fait son entrée ce mois-ci dans les concessions du Vieux Continent, où elle vient rejoindre sa fausse jumelle, la Prius, et sa grande sœur un peu forte, la Prius +. Après avoir été la pionnière de l'hybride de série en 1997, elle est maintenant, 2,7 millions d'exemplaires vendus et trois générations plus tard, la première hybride rechargeable du marché.
« Pourquoi changer une recette qui fonctionne très bien ? » ont dû probablement se dire (en japonais) les ingénieurs de Toyota, sans trouver visiblement de réponse convaincante. La Prius Rechargeable garde donc des moteurs similaires à ceux de la version sans nom composé : le thermique 4 cylindres 1,8 l VVTI 2ZR-FXE développant 99 ch à 5 200 tr/min et 142 Nm à 4 000 tr/min est conservé, tout comme l'électrique synchrone à aimant permanent offrant 60 kW (soit 82 ch), les deux combinés aboutissant à un total de 136 ch. Le système hybride HSD (Hybrid Synergy Drive) se chargeant de la transmission est aussi identique, réunissant moteur, générateur et répartiteur de puissance dans un carter unique.
En fait, la plus grosse différence technique réside sous le plancher du coffre : la batterie nickel métal hydrure (Ni-MH) d'une capacité de 1,3 kWh et offrant jusqu'à 27 kW est en effet remplacée par un bien plus puissant modèle lithium ion (Li-ion) de 4,4 kWh et jusqu'à 38 kW, mais aussi quasiment deux fois plus lourde, à 80 kg, et plus imposante, puisqu'elle fait perdre deux litres de contenance au coffre (443 l contre 445). Pour lui donner son nom, vous noterez aussi l'apparition d'une seconde trappe sur l'aile arrière droite cachant une prise femelle reliée à un chargeur se trouvant sous la batterie, permettant de la brancher au secteur classique 220 V et 10 A, via un câble muni d'un boîtier interrupteur se trouvant dans un logement dans le coffre, et la recharger en 1h30. C'est le temps maximum annoncé pour une batterie entièrement à plat, mais sachant que cette dernière n'est pas autorisée à descendre sous les 30 % de charge, il sera plus proche d'une heure. Petit détail supplémentaire, le rechargement peut être programmé pour profiter des heures creuses.
Dans les faits, cela se traduit par une autonomie en mode tout électrique passant de 2 à 25 km. Tout ça pour ça, me direz-vous ? Oui, mais Toyota a bien fait ses devoirs. Le constructeur japonais a cumulé plus de 800 000 km d'expérience de conduite depuis 2007 avec quelque 600 prototypes répartis partout dans le monde. Cela a permis d'obtenir des statistiques qui ont déterminé les spécifications de la batterie de la Prius Rechargeable, 70 % des trajets analysés étant inférieurs à 25 km. Coller au plus près de ce chiffre permettait à la fois de limiter le poids, l'encombrement, le temps de recharge mais aussi le prix, avec comme objectif final de rouler la semaine en tout électrique et de ne servir de l'hybride que le week-end, pour les trajets plus longs.
Puisque le gros mot est lancé, parlons des tarifs : la Toyota Prius Rechargeable est affichée à partir de 37 000 € pour la finition Dynamic et jusqu'à 43 100 € en Lounge, soit 9 000 € de plus que la Prius simple. Toyota justifie cette différence conséquente par les prix TTC de la batterie (10 126,78 €), du chargeur embarqué (1 486,18 €) et du câble de recharge (994,37 €) aboutissant à un total de 12 607,33 €. Pour mémoire, la batterie Ni-MH de la Prius classique coûtant 2 156,17 €, le surcoût technique pour la Prius Rechargeable s'établit donc à exactement 10 451,16 €.
Mais l'addition est un peu moins salée quand on prend en compte les aides gouvernementales : émettant 49 g/km de CO2 pour une consommation mixte de 2,1 l/100 km (selon le cycle NEDC spécifique fortement décrié et expliqué magistralement par François Chapus ici), la première obtient 5 000 € de bonus quand la seconde, avec 89 g/km de CO2 et 3,9 l/100 km, n'en décroche que 2 800 €, rapportant la différence à 6 800 €. De l'aveu même de Toyota, il faudra 120 000 km en tout électrique pour rembourser la différence en partant sur une base d'un « plein » à 0,40 €, soit bien plus en ajoutant les 30% de trajets supérieurs à 25 km selon les statistiques établies par les prototypes. Le choix sera donc plutôt d'ordre philosophique qu'économique, tant qu'aucun péage urbain ne fait son apparition en France.
Au chapitre esthétique, seul un œil exercé pourra distinguer les deux sortes de Prius. Il y a bien évidemment la seconde trappe côté droit mais aussi les jantes spécifiques en alliage de 15 pouces couvertes par un enjoliveur aérodynamique, les logos Plug-In Hybrid sur les ailes avant et le Hybrid Synergy Drive sur le hayon maintenant flanqué d'une prise stylisée, la finition chrome satiné des poignées de portière et des bandeaux du pare-chocs avant et du hayon (finition que l'on retrouve aussi à l'intérieur) et enfin les phares légèrement bleutés dans leur partie supérieure et les feux arrière à cabochon transparent.
Durant les quelques kilomètres de notre essai, nous avons pu apprécier trois modes de conduite. EV, le mode par défaut, reste en électrique jusqu'à 85 km/h (même si nous avons atteint 92 km/h) jusqu'aux limites de son autonomie annoncée de 25 km qui semble tout à fait réaliste, puisque sans faire véritablement attention, nous avons atteint 21 km. Les meilleurs, paraît-il, parviendraient à 50 km. En cas de sollicitation dépassant le qualificatif de modérée, le moteur thermique s'ébroue pour venir prêter renfort. HV est le mode combiné où la Prius Rechargeable se comporte comme la Prius Classique, à la seule différence que, grâce à la batterie plus puissante, elle émet 85 g/km de CO2, soit 4 g de moins. Il reste enfin le mode EV-City, qui affûte l'accélération pour plus de vivacité en conduite urbaine, bloque le mode tout électrique jusqu'à 90 % de la course de l'accélérateur mais diminue la puissance de la batterie à 27 kW contre 38 en mode EV pour préserver l'autonomie. Il existe encore un quatrième mode, Eco, pouvant être sélectionné en parallèle de chacun des trois modes de conduite, qui diminue la réponse à l'accélérateur et optimise le fonctionnement de la climatisation.
Pour le reste, pas de surprise, on retrouve la conduite entièrement dénuée de sensation de la Prius originale appelant au calme et et à la détente, avec une direction brillant par son absence de consistance et une suspension souple mais qui curieusement ne nous épargnera aucune des nombreuses imperfections des routes de la banlieue bruxelloise malgré les pneus ballons de flanc 65, sans oublier les envolées lyriques du moteur thermique en forte accélération rappelant les boîtes CVT.
Toyota a pour objectif de vendre 500 Prius Rechargeable d'ici la fin 2012 et entre 800 et 1 000 en 2013, et estime qu'il s'agira à 75 % de flotte d'entreprise. Elle trouvera sur son chemin une concurrente toute désignée, la paire d'électriques à prolongateur d'autonomie Chevrolet Volt et Opel Ampera. Vendues à partir de 43 500 € et 44 500 € respectivement, avec 5 000 € de bonus, elles s'affichent plus de 1 000 € plus cher par rapport à la Prius Rechargeable en finition Lounge, la plus proche, mais présentent de nombreux avantages, avec 80 km d'autonomie possible en tout électrique, de meilleures performances (9 secondes au 0 à 100 km/h contre 11,4 s et surtout un excellent punch au démarrage inhérent aux véhicules 100 % électriques) et une consommation mixte annoncée de 1,2 l/100 km avec 27 g/km de CO2. La japonaise garde l'avantage pour l'autonomie dépassant largement les 1 000 km, la technologie mieux éprouvée, la finition supérieure, ses cinq places au lieu de quatre et le volume de son coffre 50 % plus grand. Choisir entre les deux dépendra donc de vos priorités.
Twitter : @PierreDdeG
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