PV à l'étranger : que risque-t-on vraiment quand on ne paye pas ?
Avec l'instauration de la directive européenne dite "Cross Border", il est fréquent de retrouver une contravention (que ce soit pour stationnement ou un excès de vitesse relevé par radar automatique) à son retour de vacances en Europe. Mais force est de constater aussi que les mauvais payeurs ne craignent pas grand-chose quand ils rechignent à la régler ! Les explications avec Caradisiac…Vous avez une question concernant vos droits par rapport à un PV, votre assurance ou tout autre sujet lié à votre véhicule, demandez notre avis, Caradisiac vous répond dans sa rubrique "Vos questions – Nos réponses".Avec la collaboration de Maître Caroline Tichit, avocate spécialisée dans la défense des conducteurs.
La question de l'internaute
Caradisiac a reçu de nombreux courriers ces dernières semaines faisant état de PV (surtout de stationnement) reçus au retour d’un séjour en Europe, à l’image de celui-ci :
"Je vais très souvent en Belgique. Après trois semaines d'absence, j'ai trouvé dans ma boîte aux lettres un paquet de +/- 80 enveloppes. Pour moitié, il s’agit de 'rappels' pour non-paiement de la taxe de stationnement (horodateur), et pour l’autre moitié, de 'sommations' pour ces rappels. Que faire ? Que se passe-t-il si je ne paie pas ?"
Gontcharov
La réponse de Caradisiac en bref
En théorie, si vous commettez une infraction à l’étranger, il paraît bien normal et évident que vous puissiez être poursuivi et donc puni pour cette infraction. D’ailleurs, quand vous êtes interpellé, vous avez parfois à vous acquitter immédiatement de l’amende encourue avant de pouvoir repartir. Maintenant, si vous recevez votre PV par La Poste (vous n’avez pas été arrêté ou n’avez rien eu à régler tout de suite) et que vous refusez de payer l’amende réclamée, le risque est faible d’être véritablement sanctionné. C’est un fait, la directive européenne dite "Cross Border" * facilite simplement les échanges d’informations concernant les propriétaires des véhicules immatriculés.
Dans le détail
Cette directive 2015/413 du 11 mars 2015 instaure en effet l'échange d'informations permettant de remonter jusqu'aux propriétaires des véhicules surpris en infraction dans les pays membres ** de l'union européenne (UE). En clair, nous explique Caroline Tichit, "grâce aux numéros d’immatriculation relevés, chaque pays membre doit théoriquement pouvoir consulter le fichier des cartes grises du pays concerné par ce numéro d’immatriculation. Reste qu’il faut, pour ce faire, que les pays soient capables – techniquement parlant - d’échanger de telles informations !" Aujourd'hui encore, on est loin du compte.
Concrètement, il y a tout de même huit pays européens avec lesquels la France échange ce genre de données : l’Allemagne, la Belgique, l’Espagne, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Pologne, la Roumanie et la Suisse. "Mais ce n’est pas parce que les informations circulent et que les PV sont désormais bien envoyés que de véritables sanctions sont mises en place en cas de non-paiement", renchérit Me Tichit.
En pratique, le plus souvent quand les contraventions restent impayées, le supposé contrevenant reçoit certes des relances, mais ça ne va pas plus loin. "C’est du moins ce que l’on peut constater pour les infractions routières les plus courantes", précise Me Tichit. "Pour des infractions plus graves, comme un délit de fuite après un accident, on peut légitiment supposer qu’il en ira autrement."
Le stationnement non concerné par la directive
Surtout, il est à noter que cette directive "Cross Border" ne vise que huit infractions :
- les excès de vitesse,
- les franchissements de feux rouges,
- le non-port de la ceinture de sécurité,
- la conduite en état d'ébriété, la conduite sous stupéfiant,
- le non-port du casque (par les conducteurs de deux-roues),
- la circulation sur une voie interdite et
- l'usage du téléphone portable au volant.
Exit de fait le stationnement.
La France a toutefois pu signer un accord bilatéral spécifique (en dehors de cette directive "Cross Border") incluant les infractions au stationnement. C'est le cas avec la Belgique et la Suisse.
D’une manière plus générale, accord ou pas, rien n’empêche de toute façon un pays d'envoyer un PV pour une place impayée. C'est même monnaie courante pour certaines municipalités italiennes, on le sait bien. Maintenant - qu’il existe d'ailleurs un accord bilatéral spécifique ou pas -, force est de constater que les mauvais payeurs ne craignent pas grand-chose !
En outre, il n'est pas toujours évident que ces contraventions reçues de l'étranger respectent les droits de la défense : "Sont-elles correctement traduites en français ? Indiquent-elles toutes les voies de recours pour permettre de les contester ? Qu'en est-il des délais de prescription ? Dans le cas où de véritables poursuites seraient engagées, c'est autant de questions qu'il faudrait se poser, pour s'assurer de la légitimité de ces PV", met en garde Caroline Tichit.
Ce qui est davantage à craindre finalement, c’est que les pays conservent les traces de ces PV impayés… Et, en cas de nouvelle arrestation ou d’un quelconque contrôle lors d'un nouveau séjour, que la note puisse être présentée avec la sommation de payer.
"Une chose est sûre en tout cas", rappelle Me Tichit, "une infraction à l’étranger n’entraîne jamais de retrait de point". Du coup, un étranger reste toujours moins sanctionné qu'un Français en France. Et vice versa.
* Il y a eu deux directives coup sur coup : celle de 2015 ayant remplacé celle de 2011, laquelle était rentrée en application à la fin 2013.
** Excepté pour le Danemark, l'Irlande et le Royaume-Uni qui ont jusqu'au 6 mai 2017 pour transposer cette directive.
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