Porsche 924 vs Renault Fuego Turbo : les coupés à bulles s’affrontent, dès 6 000 €
Ringardisés par les GTI, les coupés eighties sont toujours moins populaires qu’elles à l’heure actuelle. Pourtant, certains sont très attractifs, par leur ligne, leurs qualités routières ou encore leurs performances. Comme la Porsche 924 2,0 l et la Renault Fuego Turbo, abordables et rapides.
Les forces en présence
Présentations : deux coupés aérodynamiques et logeables
Pour remplacer la 914, Volkswagen et Porsche s’associent de nouveau et planchent sur la future 924. Celle-ci est conçue au moindre coût, récupérant nombre d’éléments existants : suspension avant McPherson de la Coccinelle (à l’arrière, c’est celle de Type 3 et 4), un bas-moteur et boîte de vitesses Audi. Le tout doit être fabriqué dans l’usine NSU (marque appartenant à VW) à Neckarsulm. Mais, confronté à des ennuis financiers, Volkswagen se retire du projet, pour se concentrer sur la plus petite Scirocco. Porsche rachète le bébé et en finit la mise au point, en même temps qu’il planche sur la 928. Celle-ci doit sortir en premier, mais vu la crise du pétrole, on redonne la priorité à la plus économique 924 qui apparaît dès 1975.
De fait, les deux autos présentent la même architecture : moteur à l’avant, boîte à l’arrière, propulsion et 4 places. Les puristes hurlent mais Ernst Fuhrmann, patron de Porsche, pense que la 911 et son moteur arrière ont fait leur temps, aussi envisage-t-il de la remplacer par des autos plus conventionnelles. Esthétiquement, la 924 ne l’est pourtant pas : sa ligne ultramoderne signée Harm Lagaay, qui dessinera plus tard le Boxster, se singularise par une lunette arrière en forme de bulle, des projecteurs rétractables à l’avant et des boucliers peints en guise de pare-chocs. Seulement, sous le capot, le bloc d’origine Audi, un 2,0 l de 125 ch, déçoit par son manque de caractère, même si performances sont convenables et le comportement routier très bon. Elle se décline en Turbo dès 1979 (170 ch) puis en S en 1985 (150 ch, puis 160 ch en 1987), avant de disparaître en 1988, produite à environ 150 000 unités.
Elle a le temps de connaître une rivale frappée du losange, qui sort en mars 1980 : la Renault Fuego. Celle-ci est le premier projet dirigé de bout en bout par Robert Opron, transfuge de Citroën qui lui doit la GS, la SM et la CX. Excusez du peu ! Son esthétique est jugée très moderne, voire avant-gardiste, d’autant qu’elle annonce pratiquement le bio-design, alors que le Cx ressort à un excellent 0.34. Les dessous sont moins reluisants : ce sont ceux de la berline R18, elle-même une évolution de la R12. Donc, traction, moteur longitudinal en porte-à-faux avant et essieu arrière rigide… La Fuego retient tout de même le train avant à déport négatif de la R20 Diesel et une direction affûtée, tandis que ses trains roulants bénéficient de ressorts, d’amortisseurs et de silentblocs bien plus fermes que ceux de la R18.
Sous le capot, on ne rêve pas vraiment non plus : on retrouve le 1,4 l Cléon Fonte (64 ch), le 1,6 l Cléon Alu (96 ch), deux blocs à arbre à cames latéral, ainsi que, 4 mois plus tard, le 2,0 l de la R20 (110 ch)… Aucune grosse puissance ! Pourtant, le public suit puisque 75 000 unités sont écoulées dès la première année. La version haut de gamme GTX cède la place fin 1983 à une version bien plus dans l’air du temps : la Turbo. Celle-ci récupère le 1,6 l et le pousse à 132 ch, ce qui autorise une vitesse maxi de 200 km/h. La suspension, les jantes (des 14 pouces signées BBS) et les freins ont bien sûr été adaptés (4 disques) pour encaisser la furie de celle qui deviendra une « voiture de collection de prestige ». À 89 500 F (28 000 € actuels selon l’Insee), la Fuego Turbo peut affronter sans rougir la Porsche 924 pourtant nettement plus chère (125 900 F, soit 39 500 € actuels). Malheureusement, même performante, la Fuego voit ses ventes chuter inexorablement, aussi la Régie la retire-t-elle du marché en 1985, après en avoir produit plus de 250 000 exemplaires tout de même.
Fiabilité/entretien : pas les différences que l’on croit
Simple mécaniquement, la Porsche 924 est d’une très grande endurance (elle passe sans gros ennuis les 200 000 km), à condition de bien changer la courroie de distribution tous les 80 000 km. L’injection Bosch K-Jetronic peut se dérégler, voire nécessiter une onéreuse réfection : là encore, une maintenance et un usage régulier épargnent bien des ennuis. La boîte se révèle, elle aussi, robuste, mais le faisceau électrique peut faire des siennes.
Côté corrosion, les premières 924 savaient très bien pourrir, mais Porsche a rectifié les process de fabrication, et dans les années 80, elles résistaient vraiment bien à la rouille. Dans l’habitacle, la finition est juste correcte : à la longue, le tableau de bord a une fâcheuse tendance à se fendre, à cause du soleil, alors que les sièges se décousent. On est bien loin de la 911 ! La 924 demeure heureusement facile à entretenir, d’autant que bien des pièces se trouvent chez Porsche… à prix Porsche !
Mécaniquement, la Renault est, elle aussi, très solide. Bien menée, elle passe les 200 000 km, mais son turbo sera certainement changé avant 100 000 km. Un usage précautionneux (temps de chauffe et de refroidissement respectés, vidanges rapprochées) le fera durer nettement plus longtemps. De plus, la distribution par chaîne facilite la maintenance. Cela dit, les accessoires électriques (démarreur, alternateur) ne sont pas très endurants. Pour sa part, la boîte ne pose pas de souci particulier, non plus que la suspension, qui s’use normalement.
Dans l’habitacle, bien présenté, la finition fait un peu camelote mais n’est pas si mauvaise, même si, là encore, l’électricité fait des siennes. Les sièges s’avachissent, les accessoires cassent : le lot commun de la grande série. Côté rouille, la Fuego n’est pas mal lotie. Bien protégée d’origine, elle se corrode tout de même autour du hayon, au niveau de bas de caisse, des ailes, des portières et des planchers, sans que cela ne soit dramatique pour une auto de près de 40 ans. Gros inconvénient : les pièces spécifiques sont très difficiles à trouver.
Avantage : Porsche. Les deux autos sont fiables si entretenues, mais la Porsche prend le dessus grâce à une qualité de fabrication de meilleur niveau et une mécanique plus simple.
Vie à bord : la France, terre d’accueil
Si nos deux coupés sont des 4-places, la Fuego se montre tout de même nettement plus logeable que la Porsche. Elle profite aussi d’un équipement beaucoup plus complet, puisque les vitres électriques, la télécommande de verrouillage central, les rétros électriques, le volant réglable et l’ordinateur de bord sont de série. En option, on trouvait même le cuir, ou encore la fameuse chaîne hifi à satellite de commande.
Pour sa part, la Porsche en finition de base n’offre rien de tout cela, se contentant d’une jolie sellerie et d’une instrumentation relativement complète, avec des jauges sur la console centrale. Il fallait choisir la Luxe (132 330 €) pour obtenir les vitres teintées électriques, ou encore le rétroviseur électrique. En option, la radio K7, la sellerie cuir et le toit ouvrant, notamment, étaient proposés, mais impossible, par exemple, d’obtenir un volant réglable ou une télécommande d’ouverture des portes.
Avantage : Renault. La Fuego prend nettement le dessus grâce à sa meilleure habitabilité et son équipement beaucoup plus complet.
Sur la route : une Porsche plus rigoureuse
De prime abord, dans la Porsche, on est gêné par le volant trop bas, et non réglable. Mais on s’y fait, même si, non assistée, la direction se révèle ferme en manœuvre. Le siège offre un confort ferme typiquement allemand, mais on s’y sent finalement bien. Le moteur ? Il fait très honnêtement le job. Souple et volontaire, il confère à la Porsche de bonnes performances, même s’il ne faut pas lui chercher un caractère marqué. Ça, les puristes de la marque n’ont pas aimé ! Heureusement, il se complète d’une boîte 5 (à grille normale à partir de 1981) très agréable à manier.
Dynamiquement, rien à redire. Au contraire ! La 924 profite d’un équilibre remarquable (merci la boîte à l’arrière qui équilibre les masses) et d’une belle précision. On se surprend à augmenter le rythme tellement on se sent en confiance, les freins présentant par ailleurs une bonne efficacité. Enfin, le confort apparaît très acceptable. En somme, une auto très homogène, mais manquant de passion.
Dans la Fuego, on s’installe dans des sièges souples et généreux (les fameux « pétales ») et on profite d’un habitacle plus lumineux. Le volant cuir, un modèle du genre, se règle en hauteur, mais malgré ça, la position de conduite n’est pas impeccable car trop haute. Heureusement, la direction assistée, de série, facilite grandement les manœuvres, sans manquer ensuite de précision sur route. Une réussite ! Souple en ville, le moteur présente un côté turbo plus marqué que sur la R18. Vers 3 000-3 500 tr/mn, on sent un net regain de punch des plus agréables, mais la boîte n’offre pas la netteté de maniement de celle de la Porsche.
La tenue de la Renault surprend en bien : elle profite d’un bon grip, et le volant rapide ajoute au dynamisme de la Fuego, qui n’est même pas exagérément sous-vireuse. Seulement, l’essieu arrière rigide engendre des réactions désagréables sur mauvaise route, voire nuit à l’efficacité, d’autant que l’amortissement ne vaut pas celui de la 924, sans même parler de la motricité vite prise en défaut. Dommage, car les freins donnent le change.
Avantage : Porsche. Objectivement, la 924 prend le dessus car elle est bonne, voire très bonne partout. Mais à cette homogénéité implacable, on peut préférer le côté exubérant d’une Fuego par ailleurs un poil plus performante.
Budget : l’écart s’est resserré
On l’a vu, en neuf, la Porsche était beaucoup plus chère que la Renault, malgré son moindre équipement. Mais cet écart a disparu. Désormais, pour l’une comme pour l’autre, il faut compter au minimum 6 000 € pour un exemplaire juste correct. À 7 500 €, on obtient une auto en bon état, alors qu’il faut compter 10 000 € pour quelque chose de vraiment impeccable.
Au-delà, cela devient déraisonnable, sauf en cas de kilométrage exceptionnellement bas doublé d’une condition générale en rapport. Même si cela compte peu pour des autos désormais appelées à peu rouler, la Renault consomme moins que la Porsche en usage courant (7,5 l/100 km contre 8,5 l/100 km). De surcroît, ses pièces sont moins chères.
Avantage : Renault. La Fuego prend de peu les devants grâce à sa consommation plus mesurée et ses pièces moins chères.
Verdict : la Renault pour son originalité
Même si elle a été conçue comme un Meccano, la Porsche profite d’une très belle homogénéité générale. Elle est véloce, très sûre, efficace et assez confortable. Seulement, son moteur ne délivre aucun agrément particulier, et au final, elle manque de tempérament. Très embêtant pour une Porsche ! Par ailleurs, sa finition n’a rien de mirobolant.
En dépit de dessous simplistes, la Renault ne démérite pas dynamiquement parlant, même si elle n’est pas aussi homogène que l’allemande. Seulement, outre un habitacle plus vaste et mieux équipé, elle profite d’un moteur plus performant et surtout, plus typé, même si certains verront cela comme un défaut. En sus, la Fuego Turbo est bien plus rare que la 924, de sorte qu’on est encore plus enclin à aimer cette mal-aimée !
Au final
Thème | Avantage |
Fiabilité/entretien | Porsche |
Vie à bord | Renault |
Sur la route | Porsche |
Budget | Renault |
Verdict | Renault |
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