Les ventes tactiques sont-elles réellement une bonne tactique ?
C’est un vieux procédé qui permet aux constructeurs d’améliorer leurs chiffres mensuels de ventes mal embouchés. Mais de qui ces ventes en trompe-l’œil font-elles le bonheur ?

En France, on n’aime pas perdre et surtout pas afficher ses mauvais chiffres de vente. Et comme on goûte assez peu la culture japonaise, son sens de l’honneur et son hara-kiri (de plus en plus figuré et de moins en moins pratiqué), on a recours à quelques ruses plutôt latines pour s’en tirer sans laisser rien paraître.
Des ruses, qui, au royaume de l’automobile, prennent la forme de ventes tactiques. Un truc au moins aussi vieux que les premières journées portes ouvertes pour le lancement de la Juvaquatre. Ce vieux truc constitue à gonfler les chiffres par tous les moyens à condition qu’ils soient légaux. Au menu : quelques véhicules de démonstration en entrée, des ventes aux loueurs courte durée en plat de résistance et des immatriculations maison en guise de désert. On n’hésite pas et on fait tourner la planche à cartes grises.
Des chiffres corrigés le dernier jour du mois
Mais, alors que l’on croyait cette bonne vieille technique usée, éculée, remisée, rangée au musée, comme le sont les autos accessibles aux communs des mortels, la crise a surgi. Et voilà que les marques ont ressorti la sulfateuse à ventes tactiques.
Au mois d’avril dernier, selon nos confrères d’Auto-infos, ces fameuses ventes hors circuits classiques étaient curieusement de 12 % pour les immatriculations stock, + 18 % pour les loueurs et + 7,5 % pour les autos de démonstration. Pas mal du tout dans un marché qui, ce mois-là, dégringolait de 18 %.
Le mois dernier, rebelote. Le Journal de l’Automobile entre dans les détails. Le marché est en très légère hausse de 1 %. On respire, après un premier semestre de débâcle et un mois d’août aux couleurs estivales avec + 2,2 %. Pas si vite. Selon le média spécialisé, l’embellie n’est est pas tout à fait une. Étrangement, le 29 septembre, le compteur, toutes marques confondues, affichait une baisse de 11,5 %. Et puis le 30, un miracle s’est produit.

Que s’est-il passé ce mardi-là ? Sébastien Lecornu a nommé un gouvernement ? Son budget a été voté à l’unanimité ? Les Français ont-ils retrouvé une confiance de matamore ? Les particuliers comme les entreprises se sont-ils précipités, toutes affaires cessantes chez leur garagiste ?
Bien sûr, le leasing social et ses milliers de commandes ont boosté les chiffres de ce fameux mardi. Mais pas que. Dans le cas de Stellantis, les ventes du dernier jour sont stupéfiantes. Champion des immatriculations, le groupe aurait progressé de 23,8 % en une seule sainte journée, grâce aux ventes tactiques.
Même combat chez Volkswagen qui a écoulé 10 % de ses ventes mensuelles par le biais de ce canal, même si tous ces bons de commande signés in extremis ne l’ont pas été par les seules ventes tactiques. Même Renault, pourtant moins enclin à cette méthode semble avoir réalisé une hausse de 9,5 % pendant cette journée décidément fastueuse.
Évidemment, ce type de manœuvre pose question : pourquoi immatriculer à tire-larigot des autos qui, pour certaines ne rapportent pas un fifrelin ou sont bradées ? Pour afficher une belle image ? La belle affaire. Les marchés, qui font la pluie et le beau temps à la bourse ne sont pas dupes, et connaissent la manœuvre. Les clients ? Que Peugeot affiche une hausse de 2 % ou une baisse de 10 points, ils s’en fichent beaucoup plus que des déboires du Puretech.
Un pour tous, et tous pour les ventes tactiques
Selon les constructeurs eux-mêmes, la technique des ventes aux loueurs et des voitures de démonstration permet d’alléger les stocks d’auto qui s’entassent sur les parkings des usines. C’est tellement exact que Stellantis arrête plusieurs de ses unités de production pour résorber ces fameux stocks.
Mais il est une autre raison, moins avouable, qui explique que le dernier jour du mois, dans le joli monde de l’automobile, on fait tourner la planche à carte grise : l’appât du gain et les primes sur objectif à la fin du mois. Il concerne toute l’échelle de la distribution auto, du vendeur, rémunéré au concessionnaire, en passant par les directions régionales des marques, jusqu’à ces dernières lorsque ce sont des importateurs scrutés par leur siège. Les ventes tactiques font donc l’affaire de tous, sauf de l’industrie automobile qui, au final, n’a pas grand-chose à y gagner sauf une gloriole bien éphémère.
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