Voitures françaises : alerte au prix des pièces détachées ...en France!
Les assureurs tirent la sonnette d'alarme : certaines pièces détachées de voitures françaises de grande diffusion coûtent bien plus cher dans leur pays d'origine qu’ailleurs en Europe ! Ces écarts apparaissent uniquement justifiés par des considérations commerciales. Ils contribuent à faire grimper les prix des réparations, et par voie de conséquence les primes d'assurance.
« J’aime la France, je roule français ». Bien qu’ancien, le slogan reste efficace. Suffisamment efficace, en tout cas, pour que les constructeurs tricolores s’assurent encore 55 % des ventes de voitures neuves sur leur marché domestique. Seulement voilà, il semble que ces mêmes constructeurs profitent de la situation pour pratiquer des tarifs plus salés qu’ailleurs en Europe sur les prix des pièces détachées.
C’est le SRA (Sécurité et Réparation Automobile), association loi 1901 à laquelle adhèrent toutes les entreprises d’assurances automobiles, qui en apporte l’illustration avec son baromètre du prix des pièces détachées en Europe, consultable sur son site Internet.
Pour un bouclier avant, 56 % d'écart entre France et Grande-Bretagne
On y découvre ainsi qu’un bouclier avant de Renault Mégane 3 coûte 56 % plus cher en France qu’en Grande-Bretagne (222 € hors taxes contre 346 € HT), que la même pièce sur une Peugeot 208 coûte 50 % plus cher en France qu’en Pologne (207 € contre 305), ou bien encore que le pare-brise d’une Citroën C4 coûte 28 % plus cher en France qu’en Allemagne (217 € contre 278). La liste n’est pas exhaustive, et vous trouverez plus de détails en bas de cet article ou en cliquant ici. Précisons au passage que le baromètre du SRA montre qu'Opel ou Volkswagen n'adoptent pas - eux - de telles pratiques dans leur pays d'origine.
Précisons également qu’il est ici question des mêmes pièces, fabriquées au même endroit et vendues à travers les canaux de distribution officiels : « Nous observons en effet jusqu’à 50 % de différence pour une même pièce d’un pays à l’autre, la France étant la plus chère. Des écarts inexplicables d’un point de vue industriel. observe Frédéric Maisonneuve, Président de SRA. Il est tentant d’en déduire que le prix des pièces de carrosserie ne se réduit pas aux coûts des matières premières, de production, de logistique et autres, mais dépend bel et bien d’un prix de marché que seule la concurrence, par la vente pièce de qualité équivalente par exemple, pourra tempérer »
Interrogé par Caradisiac à ce sujet, Peugeot fait la réponse suivante : « Le prix des pièces de rechange est fixé en fonction du marché local, des coûts logistiques et du prix d’achat ou de fabrication des pièces, lui-même fonction du lieu d’implantation de nos fournisseurs. » Une réponse 100 % langue de bois, mais qui apporte de l’eau au moulin du responsable du SRA cité plus haut : oui, le prix des pièces est fixé en fonction du marché local et donc des conditions de concurrence. Précisons au passage que Renault, sollicité sur le même thème, a préféré botter en touche (et on le comprendrait presque, sachant que c’est lui qui pratique les plus gros écarts du panel SRA).
Le hic est que cette disparité des tarifs, qui n’est pas nouvelle, s’inscrit dans une hausse générale du prix des pièces. Maisonneuve, encore : « alors que la facture totale de la réparation-collision croît de 2,6 % en 2015, l’augmentation du coût des pièces s’élève elle à + 3,4 % »
Des primes d'assurance qui augmentent
Des augmentations qui se répercutent forcément sur le prix des assurances (exemple avec la Maif, qui a déjà annoncé une hausse de 1,5 à 2,5 % en 2017 sur l’auto), alors même, on l’a dit plus haut, qu’il est question des mêmes pièces fabriquées par le même constructeur et vendues plus cher dans leur pays d’origine qu’à l’export ! Et le problème, c’est qu’on ne voit pas comment enrayer le phénomène.
L’Autorité de la concurrence avait tenté de s’en saisir en 2012, à travers une enquête sur l’entretien et la réparation automobiles : « les constructeurs détiennent un véritable monopole légal sur plus de 70 % des ventes de pièces, et sont en duopole avec l'équipementier sur les 30 % restants. Les réparateurs sont par conséquent tenus de s'approvisionner pour une part importante de leurs besoins auprès des distributeurs du réseau constructeur. L'Autorité de la concurrence estime qu'il est souhaitable de conserver cette protection pour les pièces visibles dites de « première monte ». Mais elle propose de lever, de manière progressive et maîtrisée, la restriction pour les pièces de rechange destinées à la réparation. Cette orientation appelée « clause de réparation » a déjà été adoptée en droit par onze pays de l'Union européenne, et dans les faits par les États-Unis et l'Allemagne. » L’intention était louable, mais suscita en retour une véritable levée de boucliers des acteurs du secteur : « La concurrence sur le secteur de l’après-vente est déjà réelle et intense », répondirent alors en chœur CCFA (Comité des constructeurs français d'automobiles) et consorts, selon qui une ouverture à la concurrence du marché des pièces de carrosserie aurait porté « un coup terrible à la compétitivité de l’industrie, à l’activité et à l’emploi dans la filière en France ». Il faut préciser que 71 % des pièces de carrosserie de PSA Peugeot Citroën et Renault étaient à l’époque produites en France.
Quatre ans plus tard, les recommandations de l’Autorité de la concurrence n’auront donc aucunement été suivies d’effet. Un responsable de l’organisme nous fera en off cette confidence : « en 2012, le secteur de l’automobile allait très mal, et les constructeurs ont agité le spectre de la destruction d’emplois pour faire enterrer le dossier. Du coup, les parlementaires ne se sont pas bousculés pour prendre les choses en mains ».
Aujourd’hui que l’automobile française se porte mieux, avec un PSA sorti du rouge et une Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi qui vise le Top 3 mondial, il serait peut-être temps de rouvrir le dossier. Car pour le moment, c’est encore et toujours le portefeuille des automobilistes qui fait office d’amortisseur.
En France, un capot de Clio sera facturé 373 € HT. De l'autre côté du channel, son prix baisse de près de 100 € !
Exemples d'écarts de prix relevés par le SRA (prix HT en euros) :
Chez Renault
Bouclier avant de Clio 4
France = 32 % d’écart avec Belgique (207 € contre 273 €)
Bouclier avant de Mégane 3
France = 56 % d’écart avec la Grande-Bretagne (222 € contre 346 €)
Capot de Clio 4
France = 35 % d'écart avec Grande-Bretagne (276 € contre 373 €)
Capot de Mégane 3
France = 22 % d'écart avec Grande-Bretagne (280 € contre 341 €)
Pare-brise de Clio 4
France = 45 % d'écart avec Pologne (122 € contre 177 €)
Pare-brise de Mégane 3
France = 24 % d'écart avec Pologne (160 € contre 198 €)
Chez Peugeot
Bouclier avant de 208
France = 50 % d'écart avec Pologne (207 € contre 305 €)
Bouclier avant de 308
France = 14 % d'écart avec Danemark (285 € contre 325 €)
Capot de 208
France = 14 % d'écart avec Danemark (242 € contre 276 €)
Pare-brise de 208
France = 47 % d'écart avec Finlande (166 € contre 244 €)
Pare-brise de 308
France = 26 % d'écart avec Finlande (255 € contre 321 €)
Chez Citroën
Bouclier avant de C4
France = 15 % d'écart avec Allemagne (295 € contre 339 €)
Capot de C4
France = 18 % d'écart avec Allemagne (314 € contre 369 €)
Pare-brise
France = 28 % d'écart avec Allemagne (217 € contre 278 €)
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