Toyota 2 000 GT : la supercar du pays sans supercars
LES VOITURES LES PLUS RAPIDES DU MONDE - Dans les années 60, le constructeur japonais s'est mis en tête de concevoir une GT à l'européenne. Mauvaise idée : il n'en a vendu que 351 exemplaires. Pourtant, sa 2 000 GT était pétrie de qualités.

En cette année 1963, on a des soucis chez Toyota. Non pas du côté des finances, qui se portent plutôt bien, mais plutôt du côté de son image, car les autos du constructeur japonais ne sont que des petits modèles, réputés fiables quoique plutôt rustiques.
C'est qu'au siècle dernier, comme aujourd’hui, on sait que les voitures populaires et pas chères ne sont pas celles qui rapportent le plus. Alors, chez Toyota, à Toyota city, on a un problème. Pour vendre des autos plus haut de gamme, il faut une image haut de gamme.
Une GT, comme en Europe
La solution pour « premiumiser son offre », comme on dit dans les réunions marketing du XXIe siècle, vient d’Europe. En Allemagne et en Angleterre, chez Porsche et chez Jaguar on a lancé, qui la Type E, qui la 911 qui s’apprête à débouler. Et dans le triangle italien de Modène à Maranello en passant par Sant’Agata de Bolognese, on fourbit les cylindres.
« Saperlipopette » se disent (en japonais) les pontes de Toyota, voilà ce qu’il nous faut : une supercar nipponne pour prouver au monde que l’on sait faire nous aussi, ou plutôt une GT, comme on disait à l’époque. Alors la firme confie à cinq de ses plus brillants ingénieurs la mission de produire un coupé sportif. Pour le châssis, ils savent faire, mais pour le moteur ils préfèrent déléguer.

Ca tombe bien : Yamaha s’était vu confier la même mission par Nissan qui, lui aussi, voulait s’offrir une petite sportive. Mais l’entreprise a d’autres chats à fouetter et d’autres investissements à faire, notamment aux États-Unis ou il vient de s’implanter, et en Europe ou il s’apprête à la faire.
Alors le fabricant de motos (et de pianos) va proposer son projet à Jiro Kawano, le chef d’orchestre du coupé à venir chez Toyota. Ce dernier est ravi et signe pour le petit 6 cylindres en ligne de 150 ch à double arbre à cames, dérivé du bloc de la Toyota Crown. Le châssis maison est inspiré de celui de la Lotus Elan, il est en acier à poutre centrale. Reste le souci du design, éminemment important pour un tel modèle.
Dans la maison Toyota, personne n’est susceptible de dessiner ce type de ligne. Toyota a bien acheté une Type E, une MGB et une Facel Vega, histoire de les disséquer et (un peu) de les copier, les premières études ne mènent pas à grand-chose.

Alors, le Japonais a recours à un Européen, et pas n’importe lequel. C’est Albrecht von Goertz qui va dessiner celle qui s’appellera 2000 GT. La direction de la marque japonaise a été conquise par son travail, comme le monde entier d’ailleurs puisqu’on lui doit la plus belle bavaroise de tous les temps : la BMW 507.
Tout ce petit monde se met au travail et, au salon de Tokyo 1965, la 2000 Gt est dévoilée, et l’effet Waouh assuré. Un mois plus tard, elle est envoyée au salon de San Francisco et l’accueil est tout aussi bon, comme il l’est dès les premiers essais presse.
Sauf qu’elle coûte 42 500 francs de l’époque lors de sa commercialisation en 1967, soit un tarif équivalent à celui d’une Porsche 911 et près du double d’une Alpine A110. Du coup, les commandes sont timides et les clients frileux de confier leur argent à une marque pas vraiment spécialisée dans les GT.
Un four commercial
Résultat : malgré deux évolutions, malgré des engagements en compétition et une présence dans On ne vit que deux fois de James Bond, Toyota arrête les frais dès 1970 après n’avoir écoulé que 351 exemplaires de sa belle auto.
Elle devra attendre 43 ans pour prendre une revanche méritée, puisqu’en 2013, l’un de ses rares exemplaires trouvera preneur pour 1,2 million d’euros. Parfois la valeur doit attendre le nombre des années.
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