Les voitures électriques 40 % plus chères d’ici à 2030 ?
Pour le patron de Renault, Luca de Meo, les tarifs des voitures électriques risquent d’être 40 % plus élevés dans les années à venir. Quelles perspectives pour les modèles à batteries abordables ?
De quoi doucher les plus optimistes et ravir les Cassandre. L’avenir de la voiture électrique apparaît moins radieux que prévu. Tel est le point de vue de Luca de Meo, directeur général du groupe Renault. Dans un entretien accordé au journal flamand De Tijd/L'Écho, repris par gocar.be, le grand patron de la marque au losange affiche un regard sombre sur le futur des modèles à batteries.
Si les voitures électriques se vendent mal, c’est à cause de leur prix élevé. Hormis les récentes citadines Renault (R5 E-Tech), Citroën (ë-C3) ou Fiat (Grande Panda), à moins de 25 000 euros, les tarifs des véhicules plus polyvalents ou adaptés aux besoins familiaux restent prohibitifs pour une grande partie des ménages. Notamment ceux des classes moyennes dont le pouvoir d’achat s’est effondré. Pour le Patron de Renault « l’industrie automobile se portera bien, si la classe moyenne se porte bien ». De quoi inciter les constructeurs à proposer des modèles mieux adaptés à la demande avec des prix plus légers. Mais d’après le patron de Renault, la baisse des tarifs serait une chimère.
Une hausse de 40 % des prix
Luca de Meo prédit même une hausse significative de 40 % des tarifs des modèles à batteries d’ici à 2030. Une sacrée inflation, que ne permettrait pas de juguler la baisse du prix des batteries attendue, notamment grâce à la technologie LFP (Lithium Fer Phosphate). Déjà considérée comme un produit cher, la voiture électrique serait alors inabordable pour la très grande majorité.
Le dirigeant de Renault pointe du doigt l'Union Européenne, qui, bien qu'elle mise sur l’électrification à 100 % des voitures d’ici 2035, impose des réglementations de plus en plus strictes. Selon Luca de Meo, « ces nouvelles normes nécessiteront des investissements conséquents et entraîneront des coûts supplémentaires pour les constructeurs ». Et de citer « l’introduction de huit à douze nouvelles régulations chaque année jusqu’en 2030 », alourdissant la pression sur des acteurs déjà en difficulté. Cette surcharge réglementaire risque d’augmenter les prix des véhicules électriques, alors que les consommateurs attendent des prix plus bas.
La Chine a dix ans d’avance
Selon le patron de la marque au losange, le respect de ces normes « entraînera une augmentation de 40 % du coût de production des voitures ». Et de préciser qu’un « quart du budget de la R&D du groupe Renault sera consacré à l'adaptation des véhicules aux nouvelles réglementations ».
Et de stigmatiser l’exécutif européen dont les dirigeants « ont pensé que le monde et son modèle économique étaient figés ». Selon lui, les politiques n’auraient pas vu arriver la Chine et « son envie de devenir un leader plutôt que la petite main dans le grand atelier du monde ». La réalité a depuis dépassé les prédictions. L’Empire du milieu maîtrise toute la chaîne de production des voitures électriques de l’extraction des terres à la construction de véhicules.
À elle seule, la Chine dispose de 70 % des capacités de production mondiale. Résultat, « les fournisseurs chinois de matières premières vendent aux constructeurs locaux à leurs coûts de production, alors que les constructeurs étrangers paient le prix fort », explique Luca de Meo. Et de pointer les 10 ans d’avance de la Chine sur le reste du monde en matière de véhicules électriques. Pour rattraper son retard, le patron de Renault préconise une nouvelle politique avec un État « stratège » à même d’aider au développement du secteur.
Développer davantage d’infrastructures
Dans son inventaire à la Prévert, le patron de Renault pointe l’insuffisance du développement des infrastructures de recharge. Même s’il y a aujourd’hui un sursaut, il devrait être « six à sept fois plus rapide ». Ce déploiement doit être « soutenu par les gouvernements et les institutions financières, car les bornes de recharge sont des outils rentables dès leur mise en service », insiste-t-il.
Luca de Meo indique que le problème réside dans le fait qu’il n’y a plus d’argent sur les marchés européens pour financer l’automobile. Les réglementations européennes ne sont pas orientées avec l’esprit d’entreprise et de soutien de l’économie, ce qui décourage les investisseurs actuels et potentiels
Des partenariats avec les constructeurs asiatiques
Afin de rester dans la course, Luc de Meo préconise de multiplier les partenariats avec les constructeurs asiatiques. Mais le patron Italien déplore que cette solution ne puisse s’opérer qu’avec des constructeurs et des financements étrangers. Les autorités doivent soutenir les secteurs stratégiques, entreprendre le développement d’écosystèmes d’avenir identifiés et consolider les positions et les valeurs existantes.
Le patron de Renault appelle de ses vœux la création de « l’Airbus de l’électrique », et demande aux constructeurs européens d'unir leurs efforts pour faire front face à la déferlante des véhicules chinois sur le vieux continent. Sans se faire d’illusion sur l’aboutissement de ce projet, notamment en raison de l'absence d'investisseurs, découragés par les contraintes européennes.
Inlassablement le patron de Renault poursuit son travail de lobbyiste. L'ex-président de l'association des constructeurs européens, après avoir déploré l'impact financier des normes CAFE continue de militer pour le report de l'échéance du tout électrique au-delà de 2035. Les discussions autour de la clause de revoyure prévue en 2026 semblent déjà officieusement bien entamées.
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