La France demande à l'Europe de sucrer les sanctions liées au durcissement de la norme CAFE
Paris veut demander à la Commission européenne de ne pas appliquer les sanctions financières contre les constructeurs qui ne tiendraient pas leurs objectifs de baisse des émissions de CO2 en 2025.
Après des nuits de cauchemars, les constructeurs se mettent à rêver. Deux semaines après leur avoir annoncé la possibilité d’intervenir auprès de Bruxelles contre l’application des sanctions à l’encontre des constructeurs qui n’arriveraient pas à atteindre leurs objectifs de réductions d’émissions de CO2 en 2025, le ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie entend désormais convaincre ses homologues européens du bien fondé de sa démarche.
Dans un entretien aux Échos, Antoine Armand « considère que les constructeurs fermement engagés dans l’électrification des véhicules ne devraient pas à avoir à payer d’amendes ». Une position qu’il entend défendre auprès de la Commission européenne en lui demandant de ne pas appliquer les sanctions à l’encontre des constructeurs qui n’arriveraient pas à atteindre leurs objectifs de réductions d’émissions de CO2 en 2025 prévues par la norme CAFE.
Une norme CAFE trop serrée
La norme CAFE (Corporate Average Fuel Economy) prévoit qu’au premier janvier 2025 les émissions moyennes inférieures ou égales à 81 g de CO2 / km par voiture vendue. Soit une réduction de 15 % des émissions par rapport à 2020. Afin de tenir cet objectif, les constructeurs estiment devoir vendre une voiture électrique pour quatre thermiques. Or les ventes des voitures à batteries sont en berne. Le mois dernier en France leurs ventes ont baissé de 18 % par rapport à l’an passé et leur part de marché est passée de 17 à 15 %.
Dans ce contexte, l’objectif de la norme CAFE s’avère intenable selon le patron de Renault Luca De Meo et les marques allemandes ? Ce qui les expose à une amende de 95 euros par gramme de Co2 excédentaire multiplié par le nombre de voitures vendues dans l’année. Selon les grands groupes européens automobiles, les pénalités pourraient atteindre 10 à 15 milliards. D’autres analyses tablent sur 5 milliards. Les gouvernements ne veulent pas plomber davantage tout un pan industriel déjà en souffrance. « Les constructeurs commencent à anticiper des baisses de volumes supplémentaires sur les modèles thermiques pour tenir les objectifs de CO2 » s’alarme le Ministre de l’Industrie, Marc Ferracci. « Cela entraînerait très directement des baisses d’activité avec de lourdes conséquences sur l’emploi chez les sous-traitants ».
Bras de fer avec l’Europe
« La France souhaite désormais que la Commission européenne propose une solution ciblée afin que les acteurs vraiment engagés dans cette transition, n’aient pas à payer d’amende au titre de 2025, sans remettre en cause notre trajectoire de décarbonation » explique Antoine Armand aux Échos. L’objectif, d’en finir avec les voitures thermiques en 2035 demeure. En revanche, le gouvernement ne présente aucun détail concret sur la façon dont il entend abroger les pénalités. Pour l’heure il s’agit simplement de convaincre la Commission européenne de ne pas appliquer les pénalités, sans avoir à rouvrir le dossier sur le fond du règlement. À savoir repousser de 2025 à 2027 le durcissement de la norme comme le réclame nombre de constructeurs européens comme Renault ou VW.
Reste à savoir si les négociations vont se jouer à CAFE serré ou non. Les « poids lourds » européens semblent se rallier à la cause française. En visite à Berlin, le ministre de l’Économie devrait recevoir l’aval de Berlin dont le principal constructeur, Volkswagen, serait un des premiers touchés par les pénalités. L’Italie de Georgia Méloni s’est déjà prononcé contre les pénalités liées aux normes CAFE. La Roumanie siège de Dacia devrait également suivre. Le constructeur roumain du groupe Renault n’ayant aucun véhicule 100 % électrique dans sa gamme en dehors de la Spring fabriquée en Chine.
Si un consensus est trouvé, Bruxelles ne devrait tout simplement pas réclamer aux constructeurs les pénalités dues. Les dirigeants des grands groupes automobiles européens peuvent pousser un ouf de soulagement. Sauf Carlos Tavares. Le Directeur général de Stellantis, dont le groupe a réalisé « des investissements de malades » pour être en conformité avec la norme CAFE dès le 1er janvier prochain, peut avoir l’amer sentiment d’avoir été dupé dans cette course où rien n’a servi de partir à point.
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