2. Essai Yamaha Niken - Deux valent mieux qu'une, mais c'est plus lourd !
Fermons les yeux (c’est une image). Que ressent-on au guidon de la Niken ? Tout d’abord, de l'équilibre, une masse, et qu'il va falloir jouer des bras pour emmener le tout. Impossible par contre de dire s’il y a une ou deux roues à l’avant, tant le système LMW est efficace et « transparent », comme l’on dit. L’amortissement induit est d’une telle qualité que l’on dirait une fourche très haut de gamme parfaitement réglée. Un élément aussi bien conçu pour la tenue de route et pour le confort que pour l’attaque et la conduite sportive sur route ouverte. Pour autant, un autre phénomène émerge : l’impression de piloter deux motos en une.
Concrètement, la Niken est une moto en deux parties : un avant et un arrière, bien distincts dans leur comportement. Deux architectures raccordées par une selle, laquelle transmet toutes les sensations mécaniques au pilote. L’arrière, suit naturellement et assure la motricité, tant que le revêtement n’est pas trop dégradé. Aux premières bosses, il est possible de perdre contact avec la route, déclenchant au passage le TCS. Idem sur l’angle, lorsque l’on met plein gaz. Une opération rendue possible grâce à un avant guideur des plus performant et précis.
On a alors l'impression de piloter une sorte de bobber hypersportif, chaussé d’un pneu géant collé à la route. Ou encore... l’impression de ne pas avoir d’avant du tout, tant le lissage d'une route défoncée est parfait. Et à l’arrière ? C'est bel et bien un Tracer 900, naturellement ! Les sensations remontées sont bien présentes, et l’on sait avec précision ce que fait la roue de 17 pouces chaussée en 190. Un relief, une bande blanche, un caillou ? Hop, un message au fessier. Un petit réglage du mono amortisseur sera d’ailleurs le bienvenu pour obtenir le meilleur accord possible. D’autant plus facile que la pré contrainte, utile pour raffermir la suspension en duo ou chargé, est disponible directement depuis une molette déportée.
Avec un tel guidage, avant d’entrer dans un virage, une courbe serrée ou un rond-point, on freine très peu, très tard. Pour ainsi dire dans la courbe même. Et sans transition, on ré-accélère, bien avant ce que l’on ferait avec un train avant classique. Rapidement, le bras de levier offert par le guidon devient un outil. On dirige des épaules et des coudes, on s’impose et l’on n’hésite pas ensuite à contre braquer pour corriger le tout. Et tout ceci naturellement. Sans déhancher, sans sortir de la moto. Car pour ce qui est de vouloir prendre du virage, la Niken a même une tendance naturelle à angler fort et à tourner très court, que ce soit en penchant ou en tournant le guidon. Méfiance au départ, donc. Les ergots « limiteurs d’angle » des repose-pieds ne sont cependant pas trop rapidement mis à contribution. Au final, il faut sacrément y aller pour les faire glisser sur le bitume. Sorte de récompense à une belle conduite et une belle trajectoire, les "scriiiitch" du métal s'usant sur la route viennent ajouter de la satisfaction et un plaisir nouveau à chaque bout de route.
Sur route, justement, l’agrément est énorme, tout comme le sentiment de sécurité. Une fois adopté le mode de guidage de la Niken, on se prend au jeu et l’on roule avec une sérénité rare. En contrepartie, il faudra accepter de s’ennuyer un peu dans le droit, faute de sensations autres que celles d’une protection du buste insuffisante pour affronter durablement les vitesses supérieures à 100 km/h. D’autant plus dommage qu’un régulateur de vitesse est implémenté d’origine. Activable dès 50 km/h sur le 4e rapport, il permet d’aller rouler en Allemagne jusqu’à 180 km en 6e. La vitesse compteur peut pour sa part dépasser les 200 km/h. Pour autant, ce que l’on aimera au guidon, c’est tourner, tourner et encore tourner...
On en oublierait presque de parler du moteur ! Et pourtant là encore, il y a à dire. Toujours aussi vaillant, le trois cylindres de la Trekker n’a pas à se plaindre de son implantation dans la Niken. Même s’il doit à présent emmener 263 kg tous pleins faits, il trouve ici une certaine rondeur et une force somme toute linéaire lors de grosses accélérations. Bien plus énergique sur les 3 premiers rapports, il affirme son caractère et ses reprises, tandis que la 6e se montre la plus économe en carburant. Elle permet en tout cas des reprises convenables à partir de 60 km/h. Le tout est relevé par des changements de sonorité et de force tout au long de la plage de montée en régime. L’hyper démonstrativité n’est globalement pas de mise, l’efficacité, par contre, bien au rendez-vous. Reste le mode 1, le plus remuant de tous selon nous. Il demande de la précision dans les gaz et constituera un challenge : savoir dompter les réactions moteur, les lisser aussi bien que le ferait le mode 2, tout en bénéficiant de ce que lui seul peut apporter : de la gniak et du mordant. De quoi se faire un peu secouer et rabrouer, bref, de quoi se faire légèrement surprendre, enfin !!
En ville, on profite pleinement du train avant et surtout de l’angle de chasse de la colonne de direction, réduit à 20°. Tourner le guidon et atteindre la butée, c’est un peu comme faire demi-tour à vélo, autour de la colonne de direction et sans avoir le moindre mouvement parasite. Le poids en plus, toujours bien placé cela dit. Par contre, l’encombrement des deux bras de fourche peut devenir gênant lorsque l’on se trouve dans les embouteillages. La marge de manœuvre est considérablement réduite : tout comme les roues, ils sont rapidement en contact avec un pare-chocs… Attention donc. Par contre, les roues avant ne redoutent pas de buter sur un obstacle : elles l’avalent sans sourciller si la paroi n’est pas trop verticale ni trop haute pour les 110 mm de débattement des fourches. Autre point à surveiller en agglomération : les rétroviseurs. Il faudra un temps d’adaptation certain pour se dire que l’on ne va pas emmener ceux des automobiles, lorsque l’on effectue légalement du remonte file. Placés en avant, très large, ils intègrent de plus les clignotants. Autant dire que l’on n’a pas envie de les laisser sur place pour une erreur de jugement.
Dernier point, en ville, l’ABS montre souvent les limites de sa sensibilité et celle de sa pédale de frein arrière. Il n’est pas rare de le déclencher involontairement sur un freinage, même peu appuyé.
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