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2. Essai - Triumph Rocket III GT : le gras, c'est bon !

Essai Triumph Rocket III

Avant d'emmener la Rocket III en balade, commençons par aller à la rencontre de Jean Marie. Fleuriste de son état à Viroflay et surtout propriétaire de la première version de la Rocket, l'occasion était trop belle de pouvoir comparer le chemin parcouru par le modèle. C'est avec lui et lors d'une balade rythmée, que nous avons échangé nos montures et parlé entre passionnés de moto.

Essai Triumph Rocket III GT
Essai Triumph Rocket III GT
Essai Triumph Rocket III GT

Essai Triumph Rocket III GT
Les différences sont énormes et l'on comprend que le carénage a permis de gagner du poids. L'allègement se trouve complété par la réduction du nombre de pièces moteur, l'utilisation de matériaux plus légers et ainsi de suite.

La Rocket III originelle, il la connaît par cœur et ce depuis de nombreuses années. En solo comme en duo, il a écumé les routes et autoroutes de France, se forgeant un solide coup de guidon et une expérience des plus complètes. Aujourd'hui, le voici découvrant la nouveauté. Bien évidemment, le look n'a plus rien à voir et les évolutions sont nombreuses. La cosmétique ne fait cela dit pas tout : la Rocket III a subi une ré-orientation dynamique, commençant par le passage de la catégorie maxi-roadster customisant à celle d'hyper roadster power cruisant.

Ceci se traduit par une ergonomie entièrement revue, des masses plus basses et bien entendu de nombreuses évolutions tant mécaniques que partie cycle. 40 kg de moins, cela se sent rien qu'au moment de pousser la moto. Une opération aisée avec la nouvelle, physique sur l'ancienne. Et voici qui résume bien l'essai qui s'est ensuivi. Entre autres.

Les différences sont perçues dès les premiers tours de roues. La rigueur comme le comportement de la Rocket III bluffent Jean Marie. Et il y a de quoi. Le train avant des plus neutre fait sensation. Il se révèle tellement stable et semble si léger et précis en comparaison de la version originale, que l'on prend immédiatement la mesure du travail effectué. Un travail ayant porté ses fruits.

Essai Triumph Rocket III GT

La direction se retrouve instantanément posée au sol par le peu de 150, lequel ne semble ni plus large ni plus gros qu'un simple 120. Cette GT est un maxi-roadster de haut vol, et elle le démontre à chaque instant. Ne serait-ce que par la position de conduite, naturelle et décontractée, du moins si l'on apprécie la posture pieds en avant spécifique à la version GT. Pour rappel les repose-pieds proposent 3 positions et se trouvent actuellement sur l'intermédiaire.

Jean Marie, lui, n'en revient toujours pas de se retrouver au guidon de ce joujou-là, ni de ce qu'il ressent ou de ce qu'il parvient à faire sans effort aucun. Cette facilité nouvelle, ce sentiment de confiance immédiate, celui d'emmener un roadster et non plus une lourde routière permet de se relaxer. Un vrai joujou, là où la sienne impose un mode d'emploi certain.

Cette nouvelle rencontre occasionne un nouveau coup de cœur. Un avis que ne partage pas sa passagère de femme, laquelle trouve à juste titre la place arrière bien moins attrayante. Même avec un sissy bar des plus utile et agréable, monté de série sur la version GT. Par contre, les repose-pieds passager articulés et escamotables sont un plaisir à utiliser et leur position rend le duo largement supportable.

Repose pieds 1
Repose pieds 2
Repose pieds 3

Essai Triumph Rocket III GT

Jean Marie ne le ressent pas forcément, lui qui roule au guidon d'une version bridée à 106 CV depuis si longtemps, mais l'inertie moteur, comme son comportement, ont eux aussi bien évolué. Le couple de renversement se trouve amenuisé, tandis que la précision des gaz est en hausse. On ressent également une bien moindre inertie mécanique et le velouté moteur n'en est que renforcé. Les vibrations sont bien filtrées et ne subsistent que pour renseigner sur le régime moteur et pour provoquer une symbiose naturelle avec les pulsations pistonesques.

Assurément, ce moteur a la santé, comme le démontrent les 2,8 secondes (environ) pour atteindre le 0 à 100 km/h revendiqués récemment par le modèle. Pour autant, ce fameux 0 à 100 est atteint entre le 1er et le 2ème rapport, lequel pousse à plus de 130 km/h, tandis que le rapport suivant rupte à 7 500 tr/min et au-dessus de 170. Une vitesse que l'on atteindra sans trop se soucier du flux d'air bien dévié par la bulle. De quoi envisager quelques étapes plus longues et apprécier les liaisons droites.

À ce titre, la consommation de notre Rocket III GT nous est apparue bien entendue supérieure à celle d'une moto de moindre cylindrée. Avec une valeur moyenne ayant atteint les 7,3 l/100 km, on se dit qu'elle est un luxe abordable, tout en sachant qu'il sera difficile de descendre sous la barre des 7 l/100 km/Le prix à payer pour nourrir les 3 cylindres des plus gourmets. Mais chaque litre est savouré, dites-le vous bien.

Ce qui surprend le plus concernant ce trois cylindres, outre une certaine linéarité apparente lors des fortes accélérations, n'est autre que l'impression immédiate qu'il reste entièrement exploitable et ne se montre jamais violent. D'autant plus qu'il refusera de dépasser les 210 km/h compteur, limite de performance fixée par Triumph sur les derniers rapports, principalement la 5 et la 6, les plus concernées par cette restriction.

Fort, le plus gros moteur de la production l'est, oui. Vif, avec des montées en régime franches et très rapides, oui. Coupleux, c'est indéniable tant on peut accélérer sur n'importe quel rapport et se retrouver à rouler bien au-delà de la vitesse imaginée. Mais il bénéficie d'une qualité incroyable, ce trois cylindres : celle de séduire par sa douceur et par son côté rassurant.

Un pneu arrière de 240 se montre généralement bien moins conciliant, et il provoque parfois des phénomènes désagréables sur route mouillée, du fait de la surface au sol. Ici, rien de cela, juste un sentiment d'excellent équilibre et de connexion naturelle avec la route. Un naturel que l'on retrouve jusque dans le comportement très roadsterisant. On oublie l'aspect custom de la position des jambes, tout comme l'effet bobber d'un gros pneu avant. L'accord dynamique trouvé avec le pneu avant impressionne, tout comme la géométrie du cadre (porté par le moteur), assurément bien trouvéeEssai Triumph Rocket III GT

Ici, rien ne bouge, la facilité est au rendez-vous et le profil de la monte pneumatique n'y est sûrement pas étranger. Si l'on peut se méfier de la marque Avon, anglaise également, les Cobra semblent aptes à encaisser ce qu'on leur demande, à favoriser la maniabilité et surtout à tenir le pavé sur le sec comme sur le mouillé, réduisant au maximum le recours à l'anti patinage.

Conséquence ? On le désactive volontiers sur le sec pour ne plus avoir qu'à profiter de ce qu'offre la Rocket III, quitte à laisser la roue arrière tracer sa trajectoire sur la route… Sur le mouillé, par contre, il sera rassurant et bienveillant, vous laissant choisir le meilleur degré d'intervention pour parvenir à limiter le phénomène d'amorce du patinage. Il intervient toujours de manière douce et précise, onctueuse.

Des sensations pures et sans filtre, dosées en fonction du réglage choisi si l'on évolue sur le mode moteur User. Les sensations sont quoi qu'il arrive impressionnantes, mais elles n'intimident pas, bien au contraire : on a envie une fois encore, de trouver le terrain et les conditions pour se faire plaisir. Envie de les exploiter. Envie de les explorer. Car si la Rocket III livre aisément et rapidement le mode d'emploi de son moteur, même si l'on peut très simplement tourner la poignée et ressentir tout ce qu'elle a à offrir, se libérer des craintes que l'on peut avoir à propos d'une moto lourde et de sa compatibilité avec une conduite "sportive" est une autre histoire. Une histoire courte, cela dit.

Une fois encore, la Rocket III GT démontre qu'elle est capable de tout. Même allongée par un empattement de 1 557 mm, et avec une chasse de 27,9° des plus respectable, la mise sur l'angle n'oppose aucune résistance et tourner le guidon se fait sans peine. On tourne et dirige avec précision. Même la transmission par cardan, dont on doit traditionnellement se méfier, se montre ici très transparente et dénuée d'inertie ou de résistance mécanique, y compris au rétrogradage. La meilleure qu'il nous ait été donné de tester.

Essai Triumph Rocket III GT

Plutôt que des vibrations, la Rocket III distille une énergie qui parcoure le corps. Electrisante, en un sens, elle combine les ondes sonores et les ondes mécaniques pour communier avec son pilote et ne faire plus qu'un. Un bloc qui enchaîne naturellement les courbes et les virages, oubliant parfois de passer les rapports pourtant précisément servis par une boîte elle aussi dénuée de tout reproche.

On profite à tout instant d'une remarquable capacité à virer à plat, y compris lorsque l'on sollicite les freins, au demeurant couplés avant/arrière. La Rocket III est sous contrôle permanent : celui de la centrale inertielle autorisant les assistances sur l'angle au niveau que l'on aura choisi, mais aussi sous le contrôle humain, toujours précis et délicat. Même lorsque la suspension arrière commence à encaisser les assauts lancés par le poignet droit, on conserve la tête froide. Reste à bien maîtriser le freinage dégressif pour optimiser les trajectoires imposées par le poids de la moto, avant de l'emmener dans les tourniquets les plus serrés.

Là, on laissera toute appréhension glisser sur la route en même temps que les repose-pieds, tout en gardant dans un coin de tête une loi physique essentielle: e=mc2, et en main un levier de frein avant salvateur, avant de "casser" du virgage. Car si elle est GT, cette Rocket III est aussi une sportive dans l'âme… du moins dans l'équipement.

La puissance des étriers est redoutable, tout comme le sentiment de maîtrise de la moindre opération effectuée au guidon. Un ressenti digne des meilleures sportives, des meilleures motos, catégorie dans laquelle la Rocket III s'inscrit sans hésitation aucune. Le Ducati Diavel que nous avions il y a peu encore entre les mains se retrouve triplé (et pas seulement doublé), dans ce qu'il offre… Pour autant, on est davantage au paradis motard qu'en enfer, même si comme nous allons le voir, avec la Rocket II, ça peut encore chauffer, au sens propre comme au sens figuré.

Essai Rocket III GT

En ville, la Rocket III montre un visage des plus flatteur une fois encore. Malgré son gabarit des plus imposant et la présence de ses rétroviseurs en bout de guidon, des miroirs que l'on n'hésitera pas à retourner pour remonter plus aisément les files de voitures, on évolue avec douceur en 3 ou en 4. Sur la 4, justement, on peut évoluer au simple ralenti, à un peu plus de 1 300 tr/min, et sentir la moto tracter avec bienveillance et sans peiner. La 4, le rapport à tout faire, en quelque sorte, et qui permet donc d'évoluer sur tout le réseau routier français, entre 30 et 130 km/h au légal. Des limitations aussi faciles à respecter qu'à transgresser. On peut même envisager de démarrer au feu sur ce rapport en abusant de la douceur de l'embrayage hydraulique et en lançant les pistons.

Attention par contre au moment de poser les pieds au sol ! Les ergots métalliques protégeant les platines et le carter moteur, sorte de petites dents, sont de trop petite taille. Nous nous sommes régulièrement accroché les jambes de pantalon ou l'articulation de cheville de nos bottes. Résultat ? Quelques frayeurs aux feux et aux stops au moment de venir trouver le sol…

Autre incertitude concernant les évolutions en agglomération : le dégagement de la chaleur issue du moteur. Outre celle émanant des carters moteur, la proximité de l'énorme ligne d’échappement côté droit, il faudra bien que l'air se fraye un chemin vers l'arrière, notamment lorsque le ventilateur se déclenchera. I rencontrera alors au choix les cuisses ou les tibias. En hiver, on apprécie le chauffage intégré, en été, espérons que la dissipation sera suffisante. Pour l'heure, c'est supportable.

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