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Essai - Kawasaki Z H2 : un autre monde

Dans Moto / Nouveauté

Benoit Lafontaine , mis à jour

Les bras en feu, le cerveau en ébullition, nous terminons notre apprentissage de la nouvelle Z H2. Une moto qui soulève à peu près autant de questions qu’elle peut lever sa roue avant, faire glisser sa roue arrière, ou encore vous scotcher en fond selle. Mais pas seulement. C’est quoi ce truc ? Essai en quasi live et en plusieurs étapes, sous forme de chemin initiatique vers le pinacle motard.

Essai - Kawasaki Z H2 : un autre monde

À peine descendu des premiers tours au guidon, une certaine fébrilité s'installe. De nombreuses interrogations et un sentiment confus planent encore dans un cerveau embrouillé par l’accumulation d’informations et de sensations alambiquées. Des pensées comme embrumées par une découverte perturbante et complexe. Sur cette Z H2, on se retrouve avant tout face à soi-même. Face à ses propres peurs, à ses attentes, mais aussi et surtout à ses propres failles et ses propres possibles, possibilités. Elle est un roadster apprenant l’humilité et surtout une moto hors normes (mis à part Euro5), hors références. Voici le récit d’un parcours initiatique au guidon d’une moto hors du commun.

Changement de référentiel

Sur le tracé du terrain d’entraînement à la poursuite routière de la police locale, la H2 vient de montrer un visage inattendu. Entre surprise et déception, quelque chose semble ne pas coller… Bon sang, ça, c’est une moto à mode d’emploi ! Encore faut-il savoir lire entre les lignes, consulter les « * » et savoir lire le japonais. Pour l’instant, il nous faut apprendre à dompter la bête, dans tout ce cirque américain. Bienvenus dans l’arène…

Essai KAwasaki Z H2

Heureusement, la deuxième session d’essai de la Z H2 pointe son nez… Et tout au fil de la journée, tout va changer, à commencer par nous-même face à cette moto. Bienvenue dans un univers de folie. Bienvenue à Las Vegas, sur le complexe dédié aux sports mécaniques le plus dément que l’on puisse imaginer, au guidon de l’un des roadsters les plus sensationnels que l’on puisse imaginer.

Au-delà des sempiternels « à quoi ça sert ? », du « oui, bah pour rouler à 80/90 km/h c’est n’importe quoi », la Kawasaki H2 bouscule tout et tout le monde. Elle remet en question beaucoup de choses et quelque par le concept même d’hypernaked, catégorie qu’elle aimerait dominer du moteur et des épaules. Une catégorie où les autres références seraient une KTM Superduke 1290 et une Ducati Streetfighter V4 par exemple.

Plutôt qu’un long discours, entrons directement dans le vif du sujet. Le reste, dira-t-on n’est que littérature, et nul doute que cette Z H2 est née pour faire couler l’encre autant à un débit insensé autant qu’elle peut faire couler le sang à gros débit dans un cœur de motard(e). Elle est assurément un mélange unique, un grand n’importe quoi très organisé et conçu pour pouvoir en faire un maximum et pulvériser des barrières psychologiques, mais aussi des barrières mécaniques.

La moto la plus WTF* au monde ?

La première impression est bien celle d’un moteur débordant de caractère, un moteur dont les assistances parviennent bien mieux à canaliser les débordements que sur la H2 première du nom, tout en laissant libre cours à un grain de folie mécanique. Lancés à pleine balle sur une simulation de route viroleuse et ultra-sinueuse, ce sont tout d’abord ce que l’on pense être des défauts qui sautent aux yeux, plus vite encore que le virage suivant.

Si l’on ne se bat aucunement avec la moto, somme toute assez naturelle à emmener pour mettre suffisamment en confiance, l’analyse première fait ressortir plusieurs points, souvent négatifs : on n’est pas sur un roadster sportif à proprement parler, comme en témoignent les sliders vierges de tout frotti-frotta. C’est physique, comme le font ressentir les poignets et les avant-bras endoloris et le poids annoncé de 239 kg est bien là. Même tapi dans l'ombre… Les suspensions réclament de l’attention pour ne pas faire danser sommairement la moto : elles ont fort à gérer. Pour autant, elles s'en sortent bien dès lors que l'on dispose d'un physique dans les normes et d'un pilotage fluide. Le freinage ABS, lui, est totalement dépassé au bout de quelques tours et de freinages voulus puissants… Façon freinage d'urgence. Dernier point, le moteur est un truc de malade qui vous arrache autant un sourire - parfois crispé - qu’une petite goutte de sueur sur le front si on le cherche.

Plouf plouf, on reprend. On est à Las Vegas, une ville de pure folie, une ville que l’on ne comprend pas non plus de prime abord. Alors reprenons le guidon et mettons à l’épreuve cet engin de malade tout autant que nous-même. Car c’est bien là ce dont il est question.

*WTF : "??!!#!? !!!!" à peu de chose près

Essai KAwasaki Z H2

Une électronique au point

Cette fois-ci, le mode moteur Road est engagé plutôt que le mode Sport des tours de découverte de la précédente session. De même, le levier de freins est durci en passant de la position 3, à la position 2 de sa molette de sélection d’écartement, la 1 se montrant trop éloignée et trop ferme.

Déjà, une forme de raison l’emporte pour amener un peu plus de contrôle de traction, sans rien perdre en théorie des accélérations, dont le niveau reste sur « Full ». Un changement nous étant rapidement apparu comme nécessaire pour un non-pistard, certes, mais aussi et surtout pour un amoureux de la route conscient de ses limites actuelles et de son envie d’explorer les possibles et les possibilités de la Z H2. Des limites physiques, pour commencer, que l’on parle du corps ou de celles subies par la moto dans ces enchaînements de courbes en tous genres.

Un changement total de style de pilotage, aussi. Après tout, nous sommes sur une émulation de route et sur un roadster lourd dans l’absolu. Une machine surpuissante gavée d’air et de couple, et dont la roue arrière a plus de 200 CV à encaisser une fois que le moteur est à plein tube (compresseur à 200 %) et la poignée vissée. Alors nous allons l’emmener comme un roadster, en lui limant les tétons de repose-pieds, et nous allons voir ce qu’il se passe.

Le tracé est assez complexe et l’erreur n’est pas permise. Si l’on sort de l’asphalte en relief ou de la trajectoire, c’est une sanction immédiate : de chaque côté un bond dans un champ caillouteux dur et peu accueillant, façon reg, de l’autre, une glisse plus que probable en dehors des belles et bonnes trajectoires. Motivant, non ?

Avec humilité et vélocité, on redécouvre en la Z H2 une tout autre moto. Plus précise dans ses trajectoires, plus "douce" dans une certaine mesure. Une moto qui brusque toujours en retour si on la malmène, bref un miroir des humeurs et des attentes du moment. Elle est aussi une moto qui n’hésite pas à guider sur la bonne voie, ni à se laisser corriger malgré une tendance naturelle à élargir un peu la trajectoire du fait d'un avant chargé. Le temps de bien se placer et surtout de prendre la mesure de son freinage, on dispose des ressources nécessaires à son contrôle. Mais en ce lieu, l'ABS est et demeure l’un des points les plus sensibles de la Z H2 lorsque l’on veut se lâcher.

Essai KAwasaki Z H2

Un ABS perfectible en conditions piste

En bout de ligne droite, après un faux plat prompt à faire décoller la roue avant (qui lève naturellement jusqu'en 3 sur les accélérations maximales et vives), la petite descente commande un gros freinage avant un tourne à droite à près de 90°. Un véritable piège qui n’aura pas manqué de faire ressortir les limites faciles à atteindre d’un freinage nous étant apparu peu endurant d’une part, et surtout d’une centrale ABS par trop permissive laquelle relâche longuement l’étreinte des étriers sans apporter assez de puissance, rallongeant de manière conséquente la distante et se montrant prévisible uniquement dans cette faille : on sait que l’on va couler bien au-delà de son repère, alors que l’on sait les étriers et le maître-cylindre capables de bien mieux. Même en tentant de mieux répartir, de mieux gérer le dosage, cette phase est restée u pièce et une limitation naturelle pour nous. Le frein moteur comme sauveur ?

N’y comptez pas trop non plus. Celui-ci est très particulier. Lorsque l’on coupe les gaz et après un rétrograde dans les tours (principalement en 1 et en 2), la suralimentation et sa soupape de décharge induisent une réaction moteur produisant un dribble peu agréable de la roue arrière. La solution ? Se faire plaisir avec un embrayage au top, accompagner et soigner les passages de vitesse en oubliant au passage le shifter. Promis comme actif des 2 500 tr/min, il demande de l’expérimentation et de l’expérience sans apporter la douceur d’une main précise, plus encline à caresser le moteur dans le sens du poil.

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Une moto aux poils !

Ah ça, il est velu, ce 4 cylindres compressé ! Du poil et les poils en veux tu en voilà, qui se dresse à la mesure des rotations de poignet droit. Au point que l’on se demande souvent pourquoi Kawasaki n’a pas opté pour un design intégrant les très à la mode, mais aussi très utiles, ailerons avant. Fut-ce sur un roadster. Peut-être pour laisser à la roue avant la liberté de se dresser au ciel et d’adresser un message : attention. Attention à ce que vous faites, attention, ça pousse. Pour autant, les premiers tours de cette deuxième session sous contrôle (KTRC en position 2), démontrent que le dispositif est à la hauteur lorsqu’il est question de juguler les assauts moteur, sans intervenir trop longuement en courbe.

Dès la sortie de courbe, gaz en (presque) grands, on sent l’énergie remonter, s’accumuler et se relâcher. Effet garanti. En cet environnement, on se dit qu'il pourrait y avoir une électronique plus poussée, une personnalisation plus avancée. En effet, on ne dispose que de la seule possibilité de jouer sur la distribution de la puissance (F comme Full ou L comme Low), ou sur le niveau du contrôle de traction KTRC (du moins au plus intrusif 1,2, 3 et une position Off). On apprécierait par exemple un contrôle séparé du wheeling, et surtout une gestion plus précise du freinage et de l'ABS. On sent qu'il n'a rien de sportif en ces circonstances, et il ne rassure pas suffisament dans le cadre d'une utilisation typée piste. En bref, on aimerait un peu plus de liberté pour cadrer avec ce qu'offre la Z H2 par ailleurs : une totale libération des sensations et surtout une désacralisaton décomplexée de la vitesse.

Essai Kawasaki Z H2

Petits coups de pression

Pour notre 3ème session d'essai, nous demandons une baisse de la pression des pneumatiques (2,1 à l’avant et 1,9 à l’arrière présent). Ceci afin de ne pas toucher au réglage des suspensions et surtout afin de tenter de juguler les micro décrochages plein angle de la gomme arrière et un piochage de l'avant, touts deux intervenant lorsque le rythme augmente et que le pneumatique semble atteindre ses limites.

De fait, l'amélioration est sensible, tout comme le comportement sur les grosses compressions induites par la vitesse et par les bosses de la piste. Les repose-pieds raclent l'enrobé (55° d'angle pris), mais jamais les Pirelli ne sont parfaitement parvenus à éliminer le phénomène. La Z H2 est une moto compressée sensible à la pression, donc. N'en demeure pas moins que lorsqu'ils chauffent beaucoup et son sollicités sur l'angle, les Pirelli Diablo III semblent dépassés. Ils conservent une certaine tenue, mais se mettent à glisser et à renvoyer des sensations de limite tangibles. De quoi vous mettre un coup de pression… interne cette fois-ci.

Un travail plus avancé sur les réglages de fourche et d'amortisseur aurait été nécessaire dans les conditions de roulage du jour. Nous verrons demain ce qu'il en est sur route, dans le cadre d'une utilisation normale, pour ne pas dire normée. Pour l'heure, nous allons aller tourner sur l'anneau de vitesse de la piste de Nascar du complexe. Une expérience hors normes, tout comme la conduite de cette Z H2. Tout comme cette H2.

Essai KAwasaki Z H2

Ça tourne pas rond !

L’ovale de vitesse est en soi une épreuve. Une épreuve pour soi-même, une épreuve pour une moto et pour ses pneumatiques, conçus tous deux pour la route. Voir arriver un mur d’asphalte devant soi alors que l’on se lance à pleine vitesse, entrer pleine balle et gaz en grand dans un « banking » bordé par un petit muret jaune dont on sait qu’il ne pardonnera pas, un muret lui-même surmonté par un grillage dont on se dit qu’il sera prompt à nous découper en frites humaines à la moindre gaffe, tout pose l’ambiance.

Ajoutez un soleil rasant faisant passer ledit « mur » dans une pénombre totale et n’oubliez pas une moto lancée à plein tube à plus de 240, 260 voir 275 km/h et vos yeux n’ont pas le temps de faire la balance. On passe de l’ombre à la lumière. Et ce n’est pas seulement une image, comme nous allons le voir. Dans cet environnement, nous redécouvrons littéralement la Z H2 dans ses excès les plus extravagants. Dans tout son potentiel. Affranchis de toute notion de raison ou d’adhérence, ce sont l’instinct de conservation et l’étude des réactions de la moto qui prennent le dessus.

Les premiers tours sont on ne peut plus impressionnants. D’un point de vue sonore, pour commencer. Les accélérations produisent un son feutré et métallique, unique, tandis que l’on entend la turbine officier. Dans la ligne droite. Une sonorité dans les medium, un filet de son qui dénote. En selle, par contre, la résonance dans la boîte à air est bien présente, et pour tout dire agréable. Jamais on ne se dit que des bouchons d’oreille seraient nécessaires.

Essai - Kawasaki Z H2 : un autre monde

Tourner en rond à plus de 260 km/h sur un anneau de Nascar. Etre lancé à pleine vitesse sur un anneau relevé de plus de 20°. Un truc de dingue. Tout simplement. La Z H2 est tout aussi capable de rouler à 29 km/h sur le ralenti en 6ème et à 1 000 tr/min que de passer la barre des 280 km/h. À l'accélération, pas toujours constante dans les valeurs de vitesse acquises, on note une 1ère poussant à 135 km/h, la 2nde à 168, la 3e aux alentours de 202 km/h et la 4e à près de 240 km/h, tandis que l'on peut claquer la 5e dans un élan phénoménal et avec une poussée d'outre monde motard. Le compresseur donne à plein et le fait comprendre : au passage de la vitesse supérieure, il en remet copieusement, en permanence et ne faiblit jamais, tout du moins en apparence.

Laissez dépasser un doigt, placez mal votre tête et vous allez le sentir passer et voir la vitesse chuter drastiquement. Les lois de l'aérodynamique sont cruelles sur un roadster, qu'il soit compressé ou non. L'anneau fait aussi ressortir une direction très particulière et un amortissement spécialement sensible, mais ça, nous en reparlons dès notre retour d'un essai routier auquel nous nous rendons dès à présent, après avoir passé une partie de la nuit à coucher ces premières impressions sur la H2.

Rien de naturel à se dire que l’on va grimper au mur au sens propre, histoire de. Impressionnante aussi la Z H2, que nous poussons enfin au maximum de ses capacités moteur. Au rupteur. Le tout pour une analyse plus fine, plus pertinente de ce que représente réellement ce moteur compressé. Si la première moitié du compte-tours est presque conventionnelle, du moins le croit-on de prime abord, elle est engloutie en un souffle. Pardon en une aspiration. Même pas le temps de respirer. En 1,2 et même en 3, en 4 si l’on force, l’avant déleste avant de se reprendre et alors que l’anti patinage est actif.

Essai Kawasaki Z H2

Dès la 4, on note une capacité de reprise et une force comme on n’en connaît guère ailleurs. Une sensation des plus appréciable. Dépasser les 6 000 tr/min enclenche le passage dans un autre monde. Que dis-je un monde. Dans un autre univers. Un univers sonore, même si plus discret que celui imaginé, avec le son si caractéristique de la turbine. Un autre monde de sensations, que même une sportive dernière génération au moteur prenant près de 15 000 tr/min ne saurait donner, aussi violente et puissante soit-elle. C’est dans la manière de faire que le moteur compressé impressionne.

On peut alors donner un autre sens au mot "compressé", justement : c'est comme si l'on comprimait un moteur d'hypersportive pour faire tenir autant de puissance et de vigueur dans 11 000 tr/min là où il en faudrait 18 000 et une cylindrée largement supérieure au litre… Et comme on "compresse", on augmente la réaction tout en diminuant la taille. CQFD.

Si l’on n’est pas au niveau de ce que peut produire la H2 originelle, du haut de sa toute-puissance et de sa toute violence débordants la moindre assistance et toutes les aptitudes cognitives si l'on n'y prête garde, les réactions, la réactivité et ce véritable souffle sont toujours là sur la version Z, bien plus "exploitable".

Le compresseur est unique en son genre et il le fait savoir au travers de son comportement singulier. Une poussée inqualifiable encore, dirait-on, apparaît une deuxième fois les 8 000 tr/min passés et les 135 % de Boost. Boost, c'est bien là le nom. Comme un coup de vent dans les voiles, comme une propulsion instantanée qui jamais ne faiblit. À 9 500, il en remet encore une couche, toujours de manière exponentielle. C’est bien ce qui caractérise le moteur Supercharged. D’autant que sur cette Z H2, jamais on ne se sent complètement débordé. Quoi que.

Sur le fil

Cette Z H2, elle est toujours sur le fil, à tutoyer les limites là où la grande sœur les dépasse. La frontière est mince, mais elle s’appelle contrôle et quelque part, sentiment de sécurité et de sensations au paroxysme. Alors on pousse, alors on soude. Et l’on passe de plus en plus vite, profitant de la descente, en descente pour grappiller le moindre km/h. La Z H2 se cale sur ses suspensions, prend plus de 60° d’angle sans jamais frotter un sol éloigné par la pente.

La moindre crispation sur le guidon se traduit par une oscillation entretenue. Pour autant, on ne redoute pas le guidonnage. Le cadre et le bras oscillant stabilisent la moto. Par contre, les raccords de bitume sont en mesure de provoquer une glisse, tout comme le passage sur la ligne de départ. Peu à peu arrive la confiance. On se surprend à ne plus couper les gaz, à rentrer de plus en plus fort, à en remettre, jusqu’à tutoyer les limites de son physique. On comprend le réel pouvoir de la Z H2, et on repousse les barrières. Le soleil se couche sur le circuit, au travers de tribunes. Tout va bien. La nouveauté Kawasaki bouscule les conventions.

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La balle à l'épreuve de la route

Après avoir dormi sur ces premières impressions, nous prenons la route. Une route américaine, avec ses bandes jaunes et son ruban gris. Un ruban s'enfonçant dans les immensités naturelles d'un désert sculpté par les millénaires. Un décor de cinéma pour une chevauchée voulue calme. La route. Le véritable domaine de la Z H2 ! Oubliez être assis sur un dragster urbain prompt à vous catapulter au loin. Il fait 8°, et le moteur chauffe doucement l’arrière des cuisses en ville. Le rayon de braquage est convenable, mais il n’est pas celui d'un roadster, plus celui d'une sportive. Ce sera à vérifier lors d'un prochain essai, mais le poids haut placé semble avoir tôt fait d'embarquer dans les manœuvres à allure lente, lorsque l'on "casse" la moto pour tourner. Enfin, le carter moteur droit proéminent et le repose-pieds proche ne facilitent pas le poser du pied droit au sol. On prend cela dit rapidement la mesure de la moto et on la mène et l'emmène sans encombre.

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Cette fois, le freinage est bien dimensionné. Agréable, il met en confiance avec une certaine douceur, tandis que l'ABS ne se déclenche plus que de manière volontaire et principalement à l'arrière. De feu en feu, de loin en loin, laissez-vous porter par la moto. Transporter. Bercer, même, compte tenu du rythme adopté sur les routes américaines : 15, 25, 40 et 60 mph, 75 sur l’autoroute. Toujours dans cet environnement, on pourra utiliser le régulateur de vitesse implémenté d'origine et respecter ainsi les limitations. Ce régulateur à commande indépendante est aussi simple et intuitif qu'il en a l'air. La selle est assez ferme, mais sa forme agréable. Si hier on regrettait de ne pas pouvoir s'y enfoncer davantage, on est à présent à l'aise. Oubliés, donc, les excès de la veille, la Z H2 montre un tout autre visage : civil, civilisé et une personnalité entièrement exploitable.

Le Highway nous entraîne vers le parc naturel de la Vallée de Feu, dans une réserve indienne protégée. Mode moteur sur Rain, calé sur le 6ème rapport, la montée en régime est abolie. la réactivité douce, bref, la moto montre un tout autre visage, celui des jours mauvais où le temps ne donne pas envie de rouler. La défection offerte par le demi carénage avant est suffisante pour dévier le flux d'air sur les épaules et éviter toute turbulence du casque. Les jambes, pour leur part, sont bien aise. Reste à voir ce que cela pourrait donner par temps de pluie. Un grand vent de face, par contre, met immanquablement les cervicales à l'épreuve. Même lorsque l'on se tasse au guidon.

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Sur piste, nous avions allègrement atteint les 14,8 l/100 km de moyenne. À présent, nous voici dans ce que nous appellerons un cycle de conso moyenne minimale. L'appétit se montre cela dit toujours présent, avec 6,7 l/100 km minium annoncés par l'instrumentation.
La bonne nouvelle, c'est encore que l'on pourra parcourir près de 220 km en tutoyant la réserve. La Z H2 semble avoir de l'appétit ! Pour autant, exploiter le compresseur sur route ne fait pas trop monter la note, du moins si l'on se montre raisonnable. À régime stabilisé, on peut voir s'afficher une consommation bien plus usuelle descendant sous les 4 l/100 en ville et moins de 6 l/100 km sur route par exemple. Pour autant, rouler avec le témoin "Eco" allumé plus de quelques secondes relève du challenge personnel autant que du challenge mécanique...

On atteint les 80 km/h à 3 500 tr/min, et le 130 à 5 500 tr/min, soit avant que le compresseur ne s'éveille réellement. Pour l'heure, il tourne doucement sous la barre fatidique des 120 %, offrant au moteur une souplesse et une force rares, dont on ne prend conscience qu'en revenant sur une autre moto. CE moteur jamais ne s'essouffle, toujours pousse. Il ne montre jamais de faiblesse, juste une petite pause dans sa montée en régime, plus un palier qu'une pause, d'ailleurs, lorsqu'on le chatouille sur le 6ème rapport. Sans jamais forcer, il est à la fois volontaire et audacieux, toujours prompt à respecter une certaine norme. Pour qu'il se réveille et se révèle, il faut donc le vouloir, et tourner un peu plus la poignée. Juste un quart de plus. Et là…

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Là, sur les 4, 5 et 6ème rapports, la route prend une autre allure. Les dépassements se font en une respiration du pilote et sans violence aucune. Sur un couple qui n’est pourtant pas encore maximal, mais sur un élan. Il y a dans ce mode d'exploitation un confort certain. Un visage routier et surtout de nouvelles possibilités offertes. Dommage qu'il ne soit pas possible de choisir de décaler vers le bas la zone de poissée franche du compresseur. Histoire de pouvoir profiter au quotidien et en toute légalité du bienfait de la chose. Alors on se réserve les bienfaits du compresseur pour ces moments de folie que l'on couve avec malice. Cet instant où l'on sait qu'il suffira de choisir le bon rapport et de tourner la poignée pour effacer n'importe quel autre véhicule, pour effacer aussi toute frustration. Cet instant magique, celui offert par un moteur compressé de cet acabit.

Restera à surveiller sa trajectoire, et à pousser à l'intérieur plus qu'à l'accoutumée pour contrebalancer la tendance naturelle à élargir en entrée de courbe rapidement négociée. Bien calée, la Z H2 ne bougera alors plus que sur un ordre donné sans trop d'effort dans le guidon. Un guidon assez large, avancé vers le conducteur, masqué par l'instrumentation et dont on se dit qu'il ne vibre pas tant qu'on aurait pu l'imaginer. Les vibrations, justement, sont un point intéressant : elles semblent comme enrobées dans un cocon de douceur et provoquent un sentiment de conduire une moto de plus forte cylindrée, sans avoir à subir les inconvénients mécaniques de gros pistons. Un peu à la manière d'une Rocket 3 nouvelle génération.

Enfin, les suspensions apparaissent d'une fermeté suffisante, contrebalancée par un certain confort dans l'attaque de la fourche. Un compromis intéressant sur une route aussi propre et lisse que celle que nous empruntons à présent. Restera à voir si l’équilibre est conservé lorsque l'on abordera les départementales françaises à l'état nettement moins bon… Il est fort probable qu'il faudra quoi qu'il arrive adapter les réglages de suspension à votre gabarit et à votre utilisation.   

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