Essai - Kawasaki Z H2 SE : H2 Ninja et H2 SX, que vous reste-t-il ?
La ZH2 est une moto à part. À part dans la production, mais également à part dans sa propre famille : celle des 1000 compressées. La Version SE lui apporte des suspensions électroniques et un freinage hyper sportif, entendant compenser les remarques formulées à l'encontre des éléments de la version standard. Afin de la situer, nous avons pris la route en compagnie de ses sœurs. Une balade de compressés (en un mot ou en deux ?), pour décompresser… Ou pas !
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Note
de la rédaction
15,7/20
Il est des motos qui n'ont de place nulle part ailleurs que dans le garage de passionnés, d'amateurs de sensations et d'amoureux de mécanique unique en leur genre. Il en est d'autres que l'on redoute à tort, de par leur réputation ou leurs caractéristiques, de par la littérature qui les entoure. Enfin, il est des motos qui ne rencontrent pas immédiatement leur public, se cherchent et finissent par séduire. De celles auxquelles on ne pense pas alors qu'elles sont là, sous notre nez, à attendre que l'on vienne les inviter à danser. Pas les plus belles, pas les plus sexy, mais celles qui rendent heureux au premier roulage ensemble.
Parmi elles, il en est une qui, plus que les autres, incarne ce que l'on ne parvient pas à expliquer, à maîtriser et dont on n'a probablement pas toujours compris ou toujours pas compris ce qu'elle voulait réellement raconter. Celle dont on se dit qu'elle est sympa mais un peu moche tant qu'on n'a pas trouvé son charme, certain et loin d'être discret. Elle a tellement à dire que ça déborde de partout, que ça transpire aussi bien de sa mécanique que de sa personnalité. Son nom ? Elle le signe à la pointe de sa coque arrière d'un Z qui veut dire Kawasaki et d'un H2 qui veut dire que ça décoiffe ! Et à moins d'être dessus, ce petit cul étroit, on risque fort de ne pas le voir longtemps !
La plus simple des H2, la plus évoluée aussi
La Z H2 fait bien entendu partie de ces motos originales et pour tout dire mal aimées. Son physique n'est pas étranger à la chose, certes, qui demande un petit (...) temps d'adaptation, mais il est assurément au service de ses caractéristiques impressionnantes. La Z H2 SE ne revient bien évidemment pas sur l'esthétique - discutable, mais valorisante ! -, même si son coloris est spécifique et même si elle adopte les écopes à peinture miroir du meilleur effet. Par contre, elle fait des efforts conséquents sur les cosmétiques.
En parant la Z H2 de suspensions électroniques signées Showa et de freins siglés Brembo : des Stylema haut de gamme pour être précis, Kawasaki enfonce le clou niveau équipement et tord le cou aux critiques formulées lors du lancement du modèle. Des critiques pas toujours fondées, comme nous avions pu le vérifier. Tout du moins la marque entend-elle offrir une SEconde chance à son modèle compressé le plus accessible. Forcément, le tarif final s'en ressent, soit une augmentation de 3 250 € la faisant passer de 17 099 € à 20 349 €, mais il nous tarde de juger de l'éventuel bénéfice de cette greffe, la Z H2 nous ayant déjà particulièrement plu sur long trajet l'été dernier.
Cette fois-ci, pourtant, plutôt que de lui opposer une autre Z ou toute autre moto qu'elle aurait volontiers croquée, nous avons décidé de la mettre en difficulté avec ses aînées à moteur Hypercharged, dotées elles aussi de la fameuse "river mark" ornant les modèles d'exception. On retrouve donc aux côtés de la Z H2 la H2 Ninja modèle 2020, une moto extravagante, revue au fil de sa courte carrière pour plus de puissance et un peu plus de progressivité, sans oublier une meilleure tenue de route grâce à ses suspensions et à leur réglage aux petits oignons. Une hyper Ninja compressée malheureusement disparue des rangs pour cause de norme Euro 5… Reste la H2 SX, ORNI (Objet Roulant Non Identifié) rarement croisée sur nos routes et pourtant séduisante, même si bien plus civilisée que la Ninja. La motorisation de la Z H2 dérive d'ailleurs étroitement de cette version assagie, tandis qu'elle semble résulter du croisement entre un ZZR 1400 et une H2.
Mega Z techno
Alors, le 1000 compressé, maudit de naissance ou bien mésestimé à tort ? Pour en juger, nous avons demandé à Aurélien de se joindre à nous. Motard expérimenté et amateur de découverte, nous lui avons réservé la surprise de rouler sur des motos hors normes, c'est un fait, mais surtout des motos laissant une trace, une marque, aussi bien sur le bitume que dans les esprits ! De notre côté, resituer la H2 dans sa version Z (roadster, donc) et voir de quel bois elle se chauffe réellement était essentiel. Et pour ce qui est de chauffer, on peut dire que le moteur 4 cylindres de 998 cm3 sait y faire ! La température du compresseur est d'ailleurs à surveiller. C'est dire.
Nous vous invitons tout naturellement à relire l'essai complet et solo de la Z H2 afin de retrouver toutes les caractéristiques de la moto et notre ressenti niveau technique. Ce qui change sur cette version SE est donc lié à la partie cycle, et cela se traduit également au niveau des menus et bien entendu des commandes à la main. Déjà que le dispositif n'était pas d'une limpidité patente, maintenant qu'il prend en charge la gestion de l'amortissement, nous voilà bien avancés ! On retrouve l'instrumentation digitale TFT de petite taille, commune à bien des modèles à présent, tout en regrettant que l'on n'ait pas bénéficié d'un bloc à la mesure de celui de la H2 Ninja, autrement plus techno et pour tout dire "mystérieux". Surtout, on aurait apprécié de mieux afficher et mieux gérer les assistances et possibilités, notamment en matière de réglages. Cela dit, tout est là, lisible, exploitable, compact et dans l'esprit de la moto : simple, donc.
Sauter d'une H2 à l'autre change donc du tout au tout en matière d'ergonomie et aucune "marque" prise n'est commune. Malgré tout, la Z H2 reste assez naturelle et "commune", là où la Ninja H2 entraîne dans son propre univers. "Far far away n the galaxy". Niveau ergonomie, la Z H2 est également la plus standard, la plus exploitable et la plus accessible, même si le réglage de ses suspensions et la manipulation de son instrumentation restent obscurément aléatoires dans le feu de l'action.
À propos des suspensions KESC, justement, celles-ci sont semi-actives. Elles s'adaptent donc en temps réel aux conditions du terrain. Plus encore lorsque le mode pluie est engagé. On dispose sinon de réglages pré définis que l'électronique s'évertue à garantir : Hard ou Soft (Dur ou Souple), associé à chaque mode de conduite (3 au total plus un mode personnalisable). Intervenir sur lesdits réglages est possible dans une certaine mesure : on peut opter pour plus de confort ou plus de rigueur sur chacun des modes moteur.
3 ème au concours de beauté
L'habillage de la Z H2 laisse perplexe, surtout au regard du travail esthétique effectué sur les deux autres modèles. La ligne de la H2 Ninja brille au sens propre et au sens figuré, tant par sa peinture fantôme miroir que par son dessin captivant. Plus pataude, plus routière, moins sexy, mais dérivée de la Ninja, la H2 SX n'est pas aussi épurée, mais elle est biplace, tout comme la Z. Sur la balance, la plus carénée de toutes pèse 256 kg contre 238 pour la Ninja et 240 pour le roadster. Et ça se sent ! Ce qui pèse sur la routière ? Son habillage arrière, sa béquille centrale, son habillage avant plus important et d'une manière plus générale son accastillage.
Particulièrement dépouillée, la Z H2 ne perd pas réellement de poids, mais abandonne le monobras de ses sœurs au profit d'un élément standard à deux branches, bien entendu renforcé. Si l'on comprend que cet élément bénéficie d'une recherche spécifique, on se dit surtout qu'il ne resterait plus grand-chose aux chères sœurs s'il en bénéficiait. De toute façon, l'esthétique n'est pas ce qui a guidé la création de cette Z, même si elle respecte les codes visuels des deux familles (Z et H2).
Son cadre acier tubulaire, trait commun à toutes les H2, est également original. Il repose sur le moteur et se sert de lui pour apporter la rigidité nécessaire. On apprécie de le voir, même s'il est surprennament "aéré" pour un élément censé contenir une sacrée cavalerie : 200 ch. Une valeur qui n'impressionne plus en 2021 depuis les StreetFighter V4 et autres Superduke, sans oublier des MV Agusta 1000 Oro. Sauf qu'il dispose d'une technologie inédite : le fameux compresseur suralimentant en air le moteur par l'intermédiaire d'une turbine assujettie au régime. Alors certes, ça consomme, mais ça pousse. Ça pousse fort, très fort, ça pousse comme jamais, avec une force inconnue et une sonorité si particulière, tout en engloutissant de l'essence dans la même (dé)mesure. Une pompe à sensations.
Quant à la Ninja, elle affiche quelque 231 ch en pic… Vous devinez déjà ce que cela peut donner en matière de ressenti ? Vous êtes encore en dessous de la réalité. Un compresseur, c'est unique et cela met plusieurs motos dans un seul moteur. Plusieurs moteurs dans un seul rapport… Bref, on dispose d'une moto dont on décide du comportement, de ce que l'on souhaite ressentir et surtout faire avec.
Mais ne nous attardons pas sur la technique (KECS Linked Integrated Riding Modes, Kawasaki Cornering Management Function (KCMF), three Power Modes, Kawasaki Traction Control (KTRC), Kawasaki Launch Control Mode (KLCM), Kawasaki Engine Brake Control (KEBC), Kawasaki Intelligent anti-lock Brake System (KIBS), Kawasaki Quick Shifter (KQS) (upshift and downshift), Electronic Cruise Control), détaillée par ailleurs dans chaque essai de chaque moto, et revenons-en à notre Z.
Asymétrique au possible, on regrette son ergonomie déroutante pour les jambes et bien moins agréable que l'habillage de ses camarades du jour. Au moins est-elle originale… Une fois encore. Son optique est un mix entre celui d'une Z (les yeux, la forme) et celui d'une H2 (les moustaches). Aussi étrange que cela puisse paraître, on peut compter sur la protection offerte, comme nous l'avons déjà constaté.
Cette Z dispose d'une position de conduite particulièrement agréable, relaxée et dominante à la fois, avec un guidon de taille idéale pour une prise en mains et réaliser toutes les manœuvres à basse vitesse. La Z H2 est la plus docile, la plus confortable des trois, et bien entendu la plus maniable, même si sur ce point, la Ninja H2 se révèle particulièrement surprenante et elle aussi très vive. Même si la SX propose une assise ample et un accueil agréable, même si ses demi-guidons sont assez relevés, elle ne met pas autant à l'aise, notamment à cause du sentiment de masse, de poids, de volume. On regrette qu'elle ne bénéficie pas des mêmes suspensions ni des mêmes réglages que ceux de la "H2". Elle aurait été une arme.
Suspensions électroniques semi-actives KESC
Seule à en bénéficier, la Z s'adapte rapidement à la charge, et propose d'origine un bon niveau de confort tout en restant ferme. Un compromis que nous n'allons pas tarder à apprécier sur les petites routes nous menant chez Dujardin Moto à Bosc le Hard (76), via Lyons la Forêt. Une adresse que nous vous invitons à découvrir, tant pour les routes que vous devrez emprunter pour y parvenir que par l'endroit en lui-même. Sans parler des Dujardin père et fils, dont l'antre n'est autre qu'un temple de la mécanique moto sous toutes ses formes… Pourquoi aller leur rendre visite ?
Parce que les compresseurs et les préparations folles, cela les connaît tout autant que la mécanique générale. Ces amoureux de deux roues motorisés, multi disciplinaires et talentueux, sont autant capables de vous fabriquer un cadre sur mesure ou d'en réparer un, que de greffer un compresseur sur un moteur de Rocket III ou encore de bichonner la moto que vous leur confiez pour une révision, une remise en forme ou un diagnostic. C'est donc avec plaisir que nous avons pris la route depuis la région parisienne pour aller leur rendre visite, avant de pousser un peu plus loin, sur la côte normande…Lieu où nos machines auront trouvé de quoi se rafraîchir...
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