DESIGNbyBELLU - Audi E-Tron Gt, retour vers la beauté
Halte aux physiques ingrats, aux silhouettes difformes, aux carrosseries grimées comme des vieilles catins. L’Audi e-tron GT sonne peut-être le retour des « belles voitures » !
Ça fait des années qu’on se lamente en regardant défiler les nouveautés. Souvent vulgaires à force de se charger de bijoux en toc et de scarifications, difformes à mesure des déviances vers les véhicules utilitaires et sportifs (les « vus » comme disent les Québécois qui utilisent la langue française même pour désigner les maladies honteuses).
Notre regard est faussé par cette agressivité, par la complexité des formes, les surfaces contrariées, le croisement intempestif des lignes, le clinquant des paillettes et par-dessus tout le kitsch d’éclairages désuets comme un nouvel an en Corée du Nord. Bref, les occasions sont rares de s’émerveiller devant le design contemporain.
C’est pourquoi la découverte de la nouvelle Audi e-tron GT tient de l’apparition. D’un trait de plume, elle semble gommer les mauvais souvenirs et ressusciter le rêve de la « bella machina » qui a déserté la plupart des studios de création. La notion de beauté s’est diluée dans de multiples considérations plus ou moins recevables. La beauté s’est confondue avec la mode, l’art, l’air du temps, elle s’est dévoyée dans les opportunismes. La créativité s’est dissoute dans le marketing.
Comme le rappelait Umberto Ecco il y a plus de quinze ans, « notre époque se caractérise par la pluralité des modèles de beauté. Nous vivons une époque de polythéisme absolu. »
Soit ; la définition de la beauté est affaire de subjectivité. Son appréciation est propre à chacun, à sa culture, à son goût. Il n’empêche qu’il y a des œuvres indiscutables. Il faut une bonne dose de provocation pour contester la perfection du Taj Mahal ou du Dôme de Milan. Pareil pour la DS19 et la Bugatti Atlantic, même si le rapprochement frôle l’irrévérence.
Disons simplement que notre Audi e-tron GT respecte les canons les plus classiques par ses proportions, sa ligne, sa fluidité, sa manière de capter les lumières et de s’en vêtir. Bien sûr, la pureté et le dénuement ne sont pas seuls garants de la beauté. L’art baroque a autant droit à notre admiration que le Bauhaus. Pour les Grecs, la beauté repose sur l’équilibre des volumes. En cela, notre Audi ne démérite pas. Sa réussite n’est pas le fruit du hasard. Grâce à la synergie régnant au sein du groupe Volkswagen, l’Audi e-tron GT partage sa base technique avec la Porsche Taycan. Ceci explique cela.
Même si la silhouette générale est voisine, le traitement des surfaces est radicalement différent sur les deux berlines. Alors que la Taycan est lisse comme un galet, l’e-tron GT est sculptée et structurée. Les ailes sont chapeautées par des plis idéalement courbés. La face avant reprend en clin d’œil les contours d’une calandre imaginaire. Les designers n’ont pas chipoté sur les dimensions : l’Audi e-tron GT frôle les cinq mètres de long et les deux mètres de large. Ce style fulgurant pour une grande routière électrique n’est pas innocent : Tesla avait ouvert la voie.
Le patron du design chez Audi se nomme Marc Lichte. Au-delà de sa dégaine d’étudiant attardé et derrière ses fines lunettes rondes, Marc Lichte est une figure familière qui officie depuis des lustres dans le milieu du design automobile. Il est né le 9 août 1969 à Arnsberg, Arensberg en français, une grosse bourgade de la vallée de la Ruhr. Il a suivi les cours de la Hochschule de Pforzheim, sans doute l’école la plus réputée d’Allemagne pour l’enseignement du design. Avant même d’être diplômé, il avait travaillé pour Volkswagen à partir de 1996 et n’a plus quitté le groupe. À cette époque, le design était placé sous l’autorité de Hartmut Warkuss, personnalité tutélaire du design allemand, ; c’est lui qui a promu Marc Lichte à la direction du design extérieur de Volkswagen. Puis Lichte franchit un pas décisif en février 2014 en passant à la direction du design Audi pour succéder à Stefan Sielaff parti, lui, chez Bentley.
Marc Lichte a su faire évoluer le style de la marque avec une maîtrise qui a manqué à ses concurrents de Mercedes-Benz et de BMW au cours des dernières années.
Chez Audi, la motorisation électrique se donne une image résolument élitiste avec un modèle de cette trempe. La e-tron GT est propulsée par des moteurs qui totalisent 476 ch (voire 530 ch avec le coup de pouce d’un boost) et même 598 ch (et 650 ch) pour la variante RS. Oui, la RS est une variante, pas un variant répandu par le virus de l’anglicisme. Grâce à une batterie de 800 volts placée dans le plancher, l’Audi revendique une autonomie de 487 km (cycle WLTP). Il suffit d'une recharge de cinq minutes pour redonner 100 kilomètres d’autonomie supplémentaire et de 23 minutes pour passer de 5 % à 80 %.
Bien sûr, l’excellence a un prix : plus de 101 000 €. Mais c’est moins que beaucoup de SUV qui polluent nos regards. Un seul regret : l’appellation de cette pure beauté. Dans ce cas précis, mieux vaut utiliser le variant anglais de sa prononciation.
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