2. Comparatif - Yamaha MT-07 Vs Triumph Trident 660 : la fin de l'hégémonie ?
Nous attendions gros de cet essai. Non seulement il nous permet de comparer deux des motos les plus intéressantes pour les jeunes et les moins jeunes permis, mais ce match est aussi l'occasion de valider nos impressions, de voir s'il suffit de remuer, d'être exaltante pour remporter un match ou si une personnalité plus subtile et plus charmante peut avoir le dessus sur la fougue, sur la durée. Car après tout, la MT-07 est une trublione qui mise tout sur les sensations moteur et le panache. Au point de négliger parfois la tenue de route. Du moins jusqu'à ce nouveau modèle, nettement plus rigoureux, mais toujours aussi prompt à jouer les culbutos. Et jusqu'à ce comparatif.
Nous le savons, la Yamaha a fait de gros progrès en matière de suspensions, mais elle ne parvient toujours pas au même équilibre et à la même manière de s'affranchir des difficultés que ce que permet la Trident. Bien évidemment, la japonaise est plus volubile, plus expressive, plus nerveuse en apparence, et surtout elle cause plus fort dans le pot. Mais ça ne suffit pas. Si le CP2 est décidément l'un des moteurs les plus remuants que l'on puisse connaître, offrant une grande nervosité et un couple suffisant, il ne parvient pas à rivaliser en agrément avec le trois cylindres, moins expressif, certes, mais dont le flegme cache de vraies performances.
Il ne suffit donc pas de gesticuler pour être efficace, et c'est avec une économie de son et de vibrations (mais pas de calories : ça chauffe), que la Triumph se montre plus efficace niveau moteur. Et ce à tous les niveaux. Accélérations, reprises sur tous les rapports, elle devance la MT. Que ce soit d'une tête, de quelques traits blancs, elle profite d'une bonne allonge et de rapports bien étagés, sans oublier une injection mieux calibrée, misant sur l'efficacité plus que sur l'artifice pour faire feu. La réactivité est directe, le ride by wire peu perceptible, tandis que la MT mise sur des réactions plus brutes, sans devenir brutales.
Il y a chez la Trident cette économie de paroles, donc, qui la rendent plus mystérieuse et demandent à la connaître mieux pour qu'elle se livre. C'est au fil des kilomètres que l'on sent monter la relation de confiance, que l'on prend conscience de son potentiel supérieur. Sur la partie cycle, cette fois, la petite anglaise file droit, tourne certes un peu moins court que son adversaire, mais se rattrape lorsqu'il est question d'évoluer sur des revêtements dégradés, où son toucher de route s'avère plus feutré, plus agréable et où les mouvements de suspensions sont mieux jugulés lorsque l'on attaque fort.
Ce n'est pas non plus le jour et la nuit entre les deux, mais si pour vous la fébrilité n'est pas une priorité, alors vous apprécierez la sujette de sa majesté. Par contre, si vous aimez jouer, sourire et vibrer et amplifier le réel, alors la MT est faite pour vous. Grâce à son filtre amplificateur, à son guidon plus vif, elle vous Instagram la vie de motard et joue sur vos sens, sur l'impression de vitesse aussi bien que sur l'excitation pouvant naître d'une situation où le fantasme dépasse la réalité. Rien de frustrant cela dit tant elle sait elle aussi se montrer efficace et performante. Sur l'angle, on profite également d'un bon équilibre. Dans un cas comme dans l'autre, il faut savoir vivre et laisser vivre, dirons-nous pour parodier le titre d'un James Bond.
Mais même avec ses pneumatiques routières, la 660 profite d'une précision supérieure. La Yamaha demeure svelte, prompte à remuer et à effectuer quelques transferts de masse, que ce soit pour lever la roue avant ou plonger davantage au freinage. L'ABS est à ce titre aussi performant sur l'une que sur l'autre, mais l'action au levier droit est plus efficace et plus flamboyante sur la bleue, qui amplifie les réactions et catalyse les enthousiasmes. C'est dans les "défauts" que l'on retrouve tout le charme de la MT, tandis que ce sont les manières de la Trident qui la rendent si plaisante de compagnie. Niveau selle, par contre, la moto au diapason propose un programme plus avenant dans le cas d'un long trajet, tandis que l'on apprécie son élément bi-poste offrant un calage du fessier supérieur à celui de la Triumph.
Niveau protection, disons que les deux optiques se valent en l'absence de déflecteurs plus importants, tandis que l'éclairage de la Yamaha se montre redoutable de nuit, couvrant un meilleur spectre que celui de l'optique rond. Sa clarté est également supérieure, avec cette lumière caractéristique des lentilles. Quant à la position de conduite, elle est avenante sur les deux, avec des jambes suffisamment repliées ménageant une bonne garde au sol. On prend de l'angle avec entrain sur les deux modèles, tandis que le rythme s'accélère. Dans cette course-poursuite (façon scène de cinéma, afin de rester raccord), bien malin qui saura trouver le vainqueur. Le panache contre la maîtrise, la jeunesse contre l'expérience, le premier qui rend la main aura l'autre sur les talons…
En ville, la remuante MT sait canaliser sa fougue, tandis que la Trident siffle doucement. La souplesse du twin nippon est appréciable, permettant d'enrouler sur les intermédiaires tout en sachant que dès 4 000 tr/min, on peut déclencher un petit sprint, avant que les 6 500 tr/min ne voient arriver la puissance et ne fasse décoller tout le monde. Moins démonstrative, plus linéaire en apparence, la Trident attend d'avoir passé le cap de 5 500 tr/min et un palier moteur pour livrer le plein de sensation et délivrer le plein d'essence. Les 7 500 révolutions minute changent la sonorité et le trois cylindres se met à pousser plus (ou)vertement, avant d'atteindre rapidement la zone rouge.
Moins zélé que le CP, le bloc Triumph est cependant plus rempli, même si son comportement est nettement moins enthousiasmant de prime abord. Devant prendre plus de tours pour atteindre les mêmes vitesses que la Yamaha, la 660 consomme un peu plus, dépassant ainsi de 0,2 à 0,4 l/100 les 4,7 à 5 litres/100 km normalement utilisés par la japonaise. Toutes deux proposent 14 litres seulement dans le réservoir soit de quoi parcourir en moyenne près de 220 km avant réserve. Pas mal pour la catégorie.
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