Citroën GS/GSA (1970-1986) : la dernière Citroën révolutionnaire, dès 2 500 €
Ligne aérodynamique, suspension hydropneumatique, caractère fort : la GS et son évolution GSA, de pures Citroën, restent notoirement sous-cotées eu égard à leur audace mais aussi leurs sensations de conduite.
Tiens, j’ai bien envie de commencer par une polémique. Y a-t-il jamais eu une Citroën révolutionnaire ? À mon avis non. Je m’explique. Pour être qualifiée de révolutionnaire, une voiture doit ouvrir une ère nouvelle dans l’automobile, voir ses avancées reprises. Comme la Lancia Lambda qui introduit la structure monocoque, la Mini qui bouscule l’industrie avec son moteur à 4 temps en position transversale ; ou plus récemment, la Tesla Model S qui démontre qu’une berline électrique peut avoir une autonomie tout à fait décente. Citroën, c’est différent. La marque s’est souvent signalée par des autos à la technologie très avancée, voire avant-gardiste, mais très rarement reprise.
En réalité, leur révolution a surtout été de démontrer qu’on pouvait s’affranchir de nombreuses barrières, comme obtenir une tenue de route de référence sans dégrader le confort, voire en s’arrangeant pour que celui-ci soit lui aussi exceptionnel. Ou afficher une vitesse maxi inespérée vu la faible puissance disponible grâce à une aérodynamique soignée. La GS, présentée en août 1970, illustre cet état de fait, avec brio. Oubliez cette image de voiture de papy qui lui colle à la carrosserie et imaginez-la à son lancement.
Elle est entièrement nouvelle, ligne, structure monocoque, moteur, boîte et trains roulants. Chose très rare dans l’industrie automobile : avant elle, la dernière Citroën à se targuer d’un tel exploit, c’est la 2CV, en 1948. Elle a un Cx de 0,34, alors que la concurrence avoisine le 0,50. Elle a un moteur flat-four tout alliage à deux arbres à cames en tête à une époque où les blocs sont souvent culbutés et entièrement en fonte. Elle a 4 roues indépendantes, alors que les essieux rigides foisonnent. Enfin, elle démocratise formidablement la fameuse suspension hydropneumatique, auparavant réservée aux grandes ID/DS, quand la concurrence se contente encore souvent d’archaïques ressorts à lames. En somme, il s’agit d’une voiture à la modernité invraisemblable destinée aux masses.
Un tour de force sachant que la conception a nécessité moins de 3 ans ! Très évolué, son petit moteur de 1 015 cm3 développe tout de même 55,5 ch, et grâce à la bonne finesse aérodynamique, suffit à la GS pour frôler les 150 km/h, une allure respectable à l’époque. À 11 380 F en Confort et 12 200 F en Club mieux équipée (compte-tours, feux de recul, projecteurs à iode), soit respectivement 12 700 € et 13 620 € actuels selon l’Insee, la Citroën n’est même pas hors de prix. Cette incroyable petite familiale redéfinit les normes de la catégorie par son confort et sa tenue de route, ce qui lui permet d’être considérée comme révolutionnaire, et se voit en toute logique élue « Voiture de l’année 1971 ».
Malgré sa fabrication très légère, la GS entame une brillante carrière commerciale, d’autant qu’un break rejoint la gamme fin 1971, après une boîte 3 semi-automatique à convertisseur en début d’année. D’un style très soigné, il étonne par sa lunette arrière courbée sur sa partie haute, tandis que l’hydropneumatique, gage d’une assiette insensible à la charge, constitue un avantage de poids !
Des versions Service, à vocation utilitaire, sont proposées également, l’une tôlée (la Confort), l’autre vitrée (la Club), mais toutes deux en trois portes, en plus du break Commerciale à deux places.
Par la suite, la GS va évoluer constamment, ce dont on ne pourra entièrement rendre compte ici. En septembre 1972, un bloc 1 222 cm3 de 60 ch s’introduit sous le capot de la GS 1220, et devient le seul disponible avec la finition Club, alors que la dénomination Confort est abandonnée.
Fin 1973, une déclinaison haut de gamme débarque, à la motorisation alors considérée comme prometteuse : la Birotor, dotée du même moteur rotatif Comotor que la NSU Ro80. Fort de 107 ch, il emmène cette GS à 175 km/h, alors que les voies élargies confèrent à l’auto une tenue de route surnaturelle. Malheureusement, elle boit comme un trou, ce qui ne pardonne pas à cause de la crise pétrolière, et sa fiabilité désastreuse finit de rebuter la clientèle. La commercialisation est abandonnée dès 1975 (846 unités produites), et Citroën cherchera même à racheter les voitures fabriquées pour les passer au pilon !
En janvier 1974, les 1015 et 1220 de base sont rebaptisées GSpecial, et en fin d’année, les jantes à trous sont remplacées par des éléments à ouvertures longues. Trois nouvelles déclinaisons apparaissent cette année-là : les X et X2, à la présentation se voulant sportive (compteurs ronds à aiguilles, projecteurs à longue portée), l’une en 1 015 cm3, l’autre avec un 1 222 cm3 poussé à 65 ch (la GS X2 passe les 160 km/h), ainsi que la Pallas, plus cossue avec sa sellerie en jersey, sa moquette épaisse, sa peinture métallisée, ses jantes à enjoliveurs intégraux ou encore ses baguettes latérales.
Fin 1976, la GS bénéficie d’un restylage, qui apporte une nouvelle grille de calandre à l’avant. À l’arrière, les feux deviennent rectangulaires, alors que dans l’habitacle, le tableau de bord perd son compteur « pèse-personne » au profit de plus classiques aiguilles. Pour autant, les dénominations et les moteurs ne changent pas. Fin 1977, le bloc 1 015 est remplacé par un 1 129 cm3 de 56 ch, plus souple, et un an plus tard, la X2 devient X3. Pourquoi ? Parce que son bloc passe à 1 299 cm3, sans augmentation de puissance. Puis, en 1980, la GS disparaît. Enfin… Disons qu’en évoluant profondément, elle est renommée GSA en juillet 1979.
La plus grosse modification concerne la poupe, redessinée à partir des custodes arrière et dotée d’un hayon, refusé initialement par Pierre Bercot, ancien patron de Citroën. L’habitacle, totalement revu, opère un retour vers l’originalité. En effet, le tableau de bord adopte des satellites de commande et récupère des compteurs à tambours. À l’extérieur, des boucliers remplacent les fins pare-chocs chromés, les feux arrière s’agrandissent et la calandre est modifiée. Le Cx chute à 0,33, un record pour une berline de série.
Trois versions, toutes dotées du moteur de la GS X3, sont au catalogue, les Club, Pallas et X3, cette dernière étant (enfin !) dotée en série d’une boîte à 5 vitesses, en option sur les autres (avec une démultiplication plus longue). En juillet 1980, la version de base GSA Spécial dotée du 1,1 l de la GSpécial (poussé à 56,5 ch…) apparaît, elle aussi éligible à la boîte 5. En juillet 1981, elle n’y a plus droit mais, en plus du 1,1 l, bénéficie comme les autres du moteur 1300 revu, avec son allumage transistorisé et ses nouvelles culasses.
On pourrait croire que l’apparition de la BX, à l’été 1982, entraînera la disparition de la GSA, mais non, celle-ci continue. En juillet 1982, la Club est remplacée par la X1, une X3 simplifiée, alors qu’en juillet 1983, le moteur 1130 est supprimé, tout comme la version Pallas en juillet 1985. La GSA tire sa révérence en 1986, après 7 ans de carrière, voire 16 si on inclut la GS. Et ses qualités dynamiques ne sont toujours pas dépassées : impressionnant. Au total, 1 897 229 GS et 582 757 GSA ont été fabriquées. Un très grand succès pour ces autos, typiquement Citroën donc atypiques !
Combien ça coûte ?
L’époque où l’on s’offrait une GS correcte à 500 € est révolue. Désormais, un bon exemplaire débute à 3 500 €, le prix étant plus fonction de l’état de la voiture que de sa version, même si les Pallas et X3 s’échangent environ 1 000 € plus cher que les Club. Un exemplaire vraiment impeccable et peu kilométré peut d’ores et déjà passer les 8 000 €, quelle que soit la dénomination.
En outre, les toutes premières GS, très difficiles à trouver, demandent une rallonge budgétaire d’environ 1 000 €. Notons aussi la série spéciale Basalte de 1978, une Club à peinture noire et rouge, qui demande aisément 7 000 €. Quant à la rarissime Birotor, elle débute à 10 000 €.
Moins prisées, les GSA, en bon état, se dénichent dès 2 500 €, et comme pour la GS, c’est l’état qui prime. Une auto en parfait état atteindra 5 000 €, voire 6 000 € s’il s’agit d’une X3, ou d’une série limitée comme la Tuner, la Cottage ou la Chic.
Quelle version choisir ?
Pour bien s’insérer dans le trafic, on prendra au minimum une GS 1220, et si on s’aventure souvent sur autoroute, une GSA 1300 à boîte 5 constitue le choix le plus judicieux.
Les versions collector
Toute GS ou GSA en parfait état à faible kilométrage est un collector. Mais cela est encore plus valable pour les introuvables GS 1015 initiales, et a fortiori pour la Birotor. La Basalte est, elle aussi, très recherchée.
Que surveiller ?
Comme la très grande majorité des autos sorties dans les années 70, la GS rouille copieusement ! Bas de portières, bas de caisse, planchers, fond de coffre, bac à batterie, logements des sphères de suspension arrière… ce sont les points à vérifier avant l’achat car la réfection d’éléments structurels coûte fort cher.
Avantage, la suspension hydropneumatique permet de régler la hauteur de caisse en 3 positions : avant d’inspecter les soubassements, on vérifiera donc que le système hydraulique fonctionne correctement en s’assurant que la voiture monte bien. Observez-la attentivement : elle doit être parfaitement plane, sans tendance à pencher d’un côté, ni à paraître affaissée de l’avant ou l’arrière. Montez sur l’arrière de l’auto, coffre ouvert : elle doit récupérer en quelques secondes sa hauteur. En dessous, traquez les fuites hydrauliques. Ensuite, en roulant, si la suspension n’est pas très souple, suspectez des sphères à recharger. Si l’avant manque de précision, attention, les 4 « Fluid Bloc », les silentblocs de suspension, sont à changer, et ils coûtent 100 € pièce…
Même s’il a connu de gros soucis d’arbres à cames en début de carrière, le moteur, à condition d’être bien entretenu, est endurant. Changement périodique de la courroie de distribution (ce qui impose une dépose de la face avant) et des bougies (une opération moins complexe qu’on ne l’imagine), réglages réguliers du jeu aux soupapes, de l’allumage et de la carburation, bref du classique. Un moteur de GS/GSA sain tourne parfaitement rond, sans cliquetis ni bruit bizarre, même à 300 000 km, kilométrage à sa portée. Si ce n’est pas le cas, attention.
La boîte semble moins solide, surtout côté roulements et synchros, et demande, elle aussi, des vidanges régulières (tous les 20 000 km).
Enfin, l’habitacle pâtit d’une finition très légère, d’accessoires de pacotille et de matériaux fragiles. Attention, les pièces qui le composent sont parfois difficiles à trouver.
En somme, malgré des premiers millésimes problématiques, la GS/GSA est une auto bien conçue et fiable, même si pour cela, elle demande un entretien régulier et parfois agaçant à effectuer.
Au volant
Je tiens à remercier Matthieu Turel qui m’a laissé conduire son break GS 1220 Club de 1978. Une auto dans son jus, régulièrement entretenue et n’affichant que 75 000 km. De prime abord, au volant, je suis agréablement surpris certes par la souplesse du siège mais surtout par la bonne étude de la position de conduite. L’auto démarre sans trop se faire prier puis on attend qu’elle monte.
Assez ferme en manœuvre, la direction devient suffisamment souple quand on roule, et là… Comme par magie, les trous, les bosses et les dos-d'âne disparaissent pratiquement, absorbés qu’ils sont par la suspension. Quand on voit l’état des routes actuelles, c’est une qualité déterminante !
Malgré sa faible cylindrée, le moteur se montre souple, puis monte sans rechigner en régime, ce pour quoi il est d’ailleurs conçu. Il n’a pas l’allégresse du boxer d’une Alfasud, mais procure tout de même de bonnes performances, bien aidé par la boîte précise à manier et à l’étagement très court : à 110 km/h, on est déjà à 4 000 tr/mn ! Passé cette vitesse, le moteur, de relativement silencieux, devient un peu envahissant.
La tenue de route de la GS n’est pas un mythe : elle se montre remarquablement stable et rassurante, le train avant et la direction se révèlent précis, alors que contrairement à ce que j’imaginais, roulis et tangages apparaissent bien contrôlés. Enfin, le freinage est excellent.
Au bout du compte, on est surpris des prestations routières de cette ancienne aux qualités très modernes, mais qui, par son ambiance, sa sonorité et ses particularités, procure une expérience de conduite très savoureuse. Quant à la consommation, elle tourne autour de 8 l/100 km, si le moteur est bien réglé.
Dans les années 70, les voitures se différenciaient infiniment plus qu’aujourd’hui, où leurs prestations sont incroyablement nivelées, la notion de marque revêtait un intérêt tangible et les Citroën étaient encore véritablement à part…
L’alternative youngtimer
Citroën BX (1982-1993)
Même cause, mêmes effets : très confortable et nantie d’un style fort, la BX, à l’instar de la GS, est aujourd’hui encore vue comme une ringarde voiture de papy. Et pourtant ! Brillamment conçue, elle établit à sa sortie de nouveaux standards en termes de confort et de tenue de route dans sa catégorie. Carl Hahn, PDG de Volkswagen, déclarera même qu’il s’agit de la meilleure voiture du monde ! La ligne due à Marcello Gandini ne plaît pas à tout le monde, mais la BX se vend par paquets de mille.
Aux moteurs X et XU à essence s’ajoute dès 1983 le remarquable diesel XUD, puis une version Sport apparaît en 1985, qui frôle les 200 km/h ! La finition brinquebale, mais l’auto, bien fabriquée, se révèle très endurante. Banalisée lors du restylage de 1986, la BX continue néanmoins de bien se vendre, et en 1987, se décline en une GTI 16S, qui, grâce à ses 160 ch, passe les 220 km/h. En 1988, un turbo donne des ailes aux diesel, puis de modifications en améliorations légères, la BX perdurera jusqu’en 1993, où elle sera remplacée par la Xantia. Plus de 2,3 millions d’exemplaires ont été fabriqués : sacré score que Citroën ne rééditera pas dans cette catégorie. À partir de 1 000 €.
Citroën GS Club 1978, la fiche technique
- Moteur : 4 cylindres à plat, 1 222 cm3
- Alimentation : carburateur
- Suspension : bras superposés, pivot dans l’axe, hydropneumatique, barre antiroulis (AV), bras tirés, hydropneumatique, barre antiroulis (AR)
- Transmission : boîte 4 manuelle ou 3 semi-auto C-matic, traction
- Puissance : 60 ch à 5 750 tr/mn
- Couple : 87 Nm à 3 250 tr/mn
- Poids : 900 kg
- Vitesse maxi : 151 km/h (donnée constructeur)
- 0 à 100 km/h : 16,1 s (donnée constructeur)
> Pour trouver des annonces de Citroën GS/GSA, rendez-vous sur le site de La Centrale.
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