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Autoroutes : le Sénat confirme leur rentabilité exceptionnelle

Les sénateurs ne font que répéter ce que l'on savait déjà : les sociétés d'autoroutes dites historiques, celles qui gèrent plus de 90 % du réseau concédé, sont une véritable manne financière pour leurs actionnaires. Mais ils le font avec de vrais chiffres, bien concrets… De quoi donner le tournis ! Plus de 27 milliards et demi d'euros de dividendes ont déjà été encaissés, et ce serait encore plus de 40 milliards attendus d'ici la fin des contrats, entre 2031 et 2036 ! À l'appui de ce constat, les parlementaires appellent l'État à négocier avec ces sociétés de nouveaux investissements "dont pourraient bénéficier les usagers sans nouvelles augmentations tarifaires". Et pour stopper net le fiasco ? Les sénateurs n'émettent aucune proposition en ce sens. Pour eux, une renationalisation aurait "un coût prohibitif".

Autoroutes : le Sénat confirme leur rentabilité exceptionnelle

Après moult rapports sur les concessions d’autoroutes - de l’Autorité de la Concurrence à la Cour des Comptes, en passant par l’Autorité de Régulation des Transports (ART), dont la toute dernière étude date de cet été -, c’est au tour de sénateurs, réunis au sein d’une Commission d’enquête, de publier le résultat de leurs investigations ce vendredi. Ce n’est guère une surprise, dans la droite ligne de ce qui s’est fait précédemment, c’est la « surrentabilité » des autoroutes que l’on retient, encore et toujours, de ce travail. Mais la grande nouveauté ici, c’est qu’elle est chiffrée !

De leur privatisation en 2006, jusqu’à la fin des concessions dans les années 2030, à combien se chiffre alors le jackpot des principales sociétés d’autoroutes – ASF et Escota de Vinci, APRR et AREA d’Eiffage, SAPN et Sanef d’Abertis ? Selon les calculs des sénateurs, il devrait représenter près de 70 milliards d’euros de dividendes pour leurs actionnaires ! Soit trois fois leur mise de départ, qui était pour rappel de 22,4 milliards d’euros… De quoi donner le tournis !

Dates de fin des contrats de concessions autoroutières « historiques »

Autoroutes : le Sénat confirme leur rentabilité exceptionnelle

Pour estimer le taux de rentabilité interne (TRI) de ces sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA), le rapporteur centriste Vincent Delahaye, à l’origine de la création de cette Commission en janvier, a fait appel à un certain Frédéric Fortin, qu’il présente comme « un expert en fusion acquisition et en finances d’entreprise ». Et c’est donc grâce à ses calculs sur les SCA dites historiques, citées plus haut, que les perspectives de rentabilité ont pu être jugées « très supérieures aux estimations initiales ».

Un jackpot exponentiel

Le constat peut paraître assez cocasse pour ceux qui ont suivi les auditions de cette Commission d’enquête. Devant les sénateurs, les patrons de ces grandes boîtes n’ont pas hésité à parler d’une rentabilité plutôt inférieure à leurs attentes. Au mieux, ils ont soutenu que le calcul de ce TRI était impossible en cours de contrat, que l’économie d’une concession ne pouvait s’analyser qu’à son terme… Bref, « circulez, y a rien à voir », pouvait-on déduire de leurs interventions ! Pas de bol, les parlementaires, eux, s’y sont essayés.

Vincent Delahaye, rapporteur de la Commission d'enquête du Sénat sur les concessions autoroutières
Vincent Delahaye, rapporteur de la Commission d'enquête du Sénat sur les concessions autoroutières

Dans le détail de leurs estimations, on peut ainsi voir qu’avec ASF et Escota, les actionnaires de Vinci ont déjà récupéré 13,8 milliards d’euros de dividendes, soit, comme déjà évoqué, plus que leur mise de départ (10,4 milliards d’€). Mais le meilleur reste à venir ! Selon les projections financières des sénateurs, le jackpot devrait être plus conséquent encore d’ici la fin des concessions, avec plus de 20 milliards d'euros de dividendes supplémentaires.

La rentabilité est également « hors norme » pour APRR et AREA. Alors que, là aussi, les dividendes cumulés – « quelque 9 milliards d'euros » - de 2006 à 2019 dépassent déjà largement le décaissement initial (6,7 milliards d'€), ce sont encore 13,3 milliards d’euros que les actionnaires pourraient encore toucher entre 2020 et le terme des concessions. En d’autres termes, que ce soit pour Vinci ou Eiffage, leur rentabilité augmente de façon exponentielle ! Et leur seuil de rentabilité prévue initialement sera atteint dès 2022 pour ASF, et 2021 pour APRR, soit dans les deux cas avec 14 ans d’avance.

Seules les sociétés de l’Espagnol Abertis (Sanef et SAPN) présentent des résultats « à peu près en ligne avec ce qui était attendu », nous commente Frédéric Fortin. Leurs actionnaires ont déjà encaissé 4,8 milliards d’euros de dividendes, ce qui reste pour le coup inférieur à l’investissement de départ qui était de 5,3 milliards d’euros. Et d’ici la fin de leur contrat en 2033, cela devrait être 7,9 milliards d’euros de dividendes encore possibles pour eux. Le TRI d’Abertis s’élèverait alors à 7,21 %, « soit un taux légèrement inférieur aux 8 % attendus au moment de la privatisation », rappelle le rapport des sénateurs.

La privatisation de 2006 : le pêché originel

Il faut dire qu’au point de départ, la compétition a peut-être légèrement mieux joué pour Abertis que pour les deux autres mastodontes français - ou à majorité tricolore. En particulier, pour ASF qui était considérée comme la plus attrayante. Dès 2006, une étude de l’Edhec, cosignée Noël Amenc et Philippe Foulquier, avait montré que les Autoroutes du Sud de la France (ASF) n’avait pas été vendue aussi bien que cette concession aurait dû l’être. Pour eux, la valeur acceptable pour une action ASF aurait dû être 28 % plus élevée que le prix proposé par l’industriel, seul candidat en lice. Pour les auteurs, « l’État a subi une perte d’opportunité financière de plus de 73 % du prix obtenu pour les titres ASF ». En extrapolant à l’ensemble des cessions, ils estimaient alors le manque à gagner total pour les pouvoirs publics à 10 milliards d’euros.

« Face à ces constats, le statu quo n'est pas possible », a défendu Vincent Delahaye lors de la conférence de presse organisée au Sénat ce vendredi matin. « L'État doit être à l'initiative d'un dialogue que les SCA n’ont pas intérêt à refuser », a-t-il soutenu, « à moins de risquer que ne soient prises des décisions extrêmes, comme dénoncer les contrats ». Reste que, comme le constatent eux-mêmes les sénateurs dans leur rapport, l'État apparaît toujours en position de faiblesse lors de ces phases de négociations. En plus, les SCA « disposent de toutes les informations utiles auxquelles tant les services de l’État que l’ART n’ont accès que par leurs intermédiaires. » De fait, il n’est pas évident que l’État sortirait gagnant de ces discussions, au regard de ce qui s’est passé jusqu’ici.

On discute, et après ? Pas grand-chose…

Le rapport des sénateurs écarte en tout cas l'idée d'une renationalisation des concessions d’autoroutes, notamment en raison de son « coût prohibitif », évalué par le ministère de l’Économie et des Finances entre 45 et 50 milliards d’euros. En résumé, ses principales préconisations sont de deux sortes :

  • 1 – Définir l’équilibre économique et financier des contrats de concession des SCA dites historiques, qui n’existerait toujours pas. Selon les sénateurs, la définition de cet équilibre « permettra d’identifier les marges d’investissement dont pourraient bénéficier les usagers sans nouvelles augmentations tarifaires ». Et pour y parvenir, ils appellent à organiser un grand sommet – « La défense des autoroutes » - auquel tous les services concernés, y compris l’ART et les parlementaires, seraient conviés.
  • 2 - Ne plus prolonger la durée des concessions, et limiter à quinze ans la durée des futures concessions autoroutières portant sur le réseau déjà construit, si tant est que le modèle persistait à l'échéance des contrats en cours. Les nouveaux contrats devraient alors également comprendre « des clauses de revoyure tous les cinq ans (…) afin de prévenir la réapparition d’une rente autoroutière ». L’équilibre des contrats devrait aussi être encadré « par des clauses de partage des gains d’exploitation et des gains de refinancement ainsi que des clauses de modération tarifaire, assorties d’une définition pertinente des seuils de déclenchement des clauses de plafonnement de la rentabilité ».

En somme, le rapport se garde bien de remettre vraiment en question les contrats actuels et même futurs des concessions autoroutières. Il se limite finalement à réclamer leur encadrement plus strict. Reste quand même une question : si les prévisions de rentabilité qui y sont calculées se confirment, n’y a-t-il pas moyen pour l'État de réduire la durée des contrats en cours, et mettre ainsi fin à ce fiasco ? L’État ne disposerait-il d’aucun moyen pour se sortir du pétrin dans lequel il s’est lui-même engouffré ? Ce n'est en tout cas pas dans ce rapport que la solution est à trouver. Qu'on se le dise, les tarifs aux péages ne sont pas près de baisser !

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