80 km/h: Nicolas Dupont-Aignan met la gomme
Traditionnellement en pointe sur tous les sujets qui hérissent l’automobiliste, le député de l’Essonne s’apprête à lancer une campagne visant la limitation de vitesse à 80 km/h et autres mesures urticantes. Caradisiac a eu l’occasion d’échanger avec lui sur le sujet, entre remarques de bon sens et grand complot...
C’est peu dire que l’instauration prochaine des 80 km/h sur le réseau secondaire provoque la crispation, voire la colère de nombre d'automobilistes. Plus que les quelques secondes ou minutes perdues sur tel ou tel trajet, c’est bien la perspective d’une menace supplémentaire pesant sur les points de permis (dont plus de 36 000 s’évaporent chaque jour sur nos routes) qui suscite une défiance généralisée.
Paradoxalement, rares sont les politiciens à s’être emparés de ce sujet sensible. Si des voix s'élèvent au Sénat , où l'on se montre assez actif contre les 80 km/h en vertu d'une plus grande proximité avec les zones rurales, le plus en pointe sur le sujet est Nicolas Dupont-Aignan, député Debout la France de l’Essonne, qui multiplie depuis longtemps les prises de positions pro-automobile. L'homme aura réclamé tour à tour ces derniers mois tour la gratuité des péages, la non-privatisation des radars ou bien encore le retour de la circulation sur les voies sur berges à Paris...
Sans surprise, il s’engage maintenant contre la baisse de la vitesse maximale autorisée sur les routes bidirectionnelles du réseau secondaire, laquelle entrera en vigueur le 1er juillet prochain. Il organise à cette fin mercredi 7 février une conférence de presse marquant le début d’une campagne d’affichage et de distribution de tracts qu’il espère la plus forte possible, en lien avec la très active association 40 millions d’automobilistes.
Avec une poignée de confrères, Caradisiac a eu l’occasion d’échanger sur ce sujet avec le parlementaire, à l'occasion d’un déjeuner informel organisé à l’Assemblée nationale lundi 5 février. Après avoir rappelé qu’il soutenait depuis plusieurs années le Collectif Justice pour les victimes de la route - « vous vous rendez compte, ils n’ont jamais été reçus par un Garde des sceaux ! », et qu’à ce titre il ne devait pas être considéré comme un « Ayatollah de la voiture », il a développé son argumentaire contre une sécurité routière qui selon lui ne s’attaque pas aux vrais problèmes : « on embête les automobilistes à cause de quelques milliers de véritables délinquants, qui eux roulent sans permis ni assurance. Il y a dix ans que je me bats contre le scandale du racket des péages autoroutiers, par exemple, mais là, le coup des 80 c’est la cerise sur le gâteau. » Et du pain béni pour lui, serait-on tenté d’ajouter, sachant qu'il est toujours plus aisé de critiquer que de gouverneralors même que le sueil des 3500 morts sur les routes de France semble infranchissable depuis quelques années.
Selon Nicolas Dupont-Aignan, qui semble depuis peu prendre ses distances avec le FN après son ralliement à Marine le Pen au deuxième tour de la dernière élection présidentielle, l’opération tient avant tout du coup de communication organisé par l’exécutif : « Matignon voulait une mesure disruptive, une sorte de super-communication organisé par un chef de l’Etat qui voulait par la asseoir son autorité sur le bon peuple ! » Et de poursuivre : « personne n’a rien dit parce que les politiques de tous bords sont tétanisés : s’ils protestent, ils ont peur de passer pour des gens qui veulent plus de morts sur les routes. On a une sécurité routière totémique, hystérique, mais totalement à côté de la plaque. Les Français sont infantilisés. Et si le 80 km/h n'est pas accepté socialement, c’est bien qu’il y a une c… ! »
On ne saurait trop donner tort à NDA sur ces dernier point, sans forcément valider la suite du raisonnement: « je n’en ai bien sûr aucune preuve, mais tout ça profite aux autoroutes, qui sont une source de profits monstrueuses. Le différentiel de vitesse avec le réseau secondaire sera bientôt de 50 km/h. Dans ces conditions, on n’hésitera plus à payer le péage. Au fait, avez-vous remarqué que le bilan de la sécurité routière est sorti le jour même où l’on apprenait le montant de l’augmentation annuelle des péages ? » Le signe quasi-évident, selon lui, d’une collusion entre les pouvoirs publics et les concessionnaires des sociétés d’autoroutes toujours plus avides… Il est vrai que les théories du complot sont à la mode.
C’est dans ce contexte que Nicolas Dupont-Aignan présente ce mercredi 7 février, accompagné du sénateur de Moselle Jean-Louis Masson, une série de 20 mesures pour les transports et contre la délinquance routière, regroupés sous le thème « En finir avec l’automobiliste bouc émissaire ». De « stopper la privatisation des radars mobiles » (il s’agit en réalité d’une délégation du public au privé) à « accélérer la mise en place des tests anti-pollution en conditions réelles », en passant par l’investissement dans les routes solaires ou l’instauration d’une TVA réduite sur les équipements de sécurité des motards, Nicolas Dupont-Aignan ratisse large. Surtout, il caresse l’automobiliste dans le sens du poil, ce qui arrive finalement bien rarement. Et ce n’est pas forcément un mauvais calcul, d’après les sondages qui montrent que 59% des Français jugent l'instauration des 80 km/h inutile.
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