Les pépites du Mans Classic 2025 : De Tomaso Deauville
Une Jaguar à l’italienne ? La De Tomaso Deauville, c’est peu un ça, mais avec un exotisme inimitable conféré par son énorme V8 fourni par Ford. Une berline performante et rarissime qui mérite bien un petit coup de projecteur…

Alejandro De Tomaso n’avait peur de rien. Né en 1928, cet homme d’affaires argentin, au caractère bien trempé, s’est fait expulser de son pays de naissance pour avoir fomenté un putsch contre le président Juan Perón… Où a-t-il trouvé refuge ? En Italie, terre natale de son père, où il s’est d’abord illustré comme pilote de course. Il gagnera même sa catégorie aux 24 Heures du Mans 1958 sur une Osca Sport 750 !
Une rafale de voitures de sport
En effet, comme un autre président, lui, il aime la bagnole. A tel point qu’en 1959, il fonde sa marque, De Tomaso, et se rapproche bien vite de Ford, où il devient vite très copain avec l’immense Lee Iacocca, futur numéro deux de l’ovale bleu. De Tomaso veut des moteurs et Ford veut s’implanter en Italie. Cela permet à l’italo-argentin de présenter son premier modèle de sport, la Vallelunga, en 1963, suivie de la sublime Mangusta (dotée d’un V8 289) en 1968 et surtout de la Pantera en 1971, elle aussi mue par un V8 américain.
Ce genre de bloc dans une italienne, c’est fréquent à l’époque, Iso et Bizzarrini en utilisant également. En France, Jean Tastevin procèdera de même avec sa magnifique Monica. Si la Pantera a vocation à devenir une supercar démocratique, de Tomaso a aussi envie d’une berline de luxe, plus à-même de générer des volumes de vente intéressants.

Une italo-américaine au look british
Ce sera la Deauville, présentée (trop vite) fin 1970 au salon de Turin. Vous lui trouvez un air de Jaguar XJ6 ? C’est normal, Tom Tjaarda, son designer, s’étant (même s’il s’en est toujours défendu) largement inspiré de l’anglaise, alors la meilleure grande berline de son temps. Celle-ci orientera aussi les choix techniques de la Deauville qui, comme elle, se dote d’un train arrière indépendant doté de deux combinés ressort/amortisseur…
Pour la petite histoire, elle a été conçue en quelques mois chez Dallara... Et dans l’habitacle, comme dans la Jag’, l’ambiance est au luxe boisé. En revanche, sous le capot, ce sont initialement des V8 Ford Cleveland qui sont utilisés, un 4,7 l de 233 ch et un 5,8 l de 370 ch, seul ce dernier étant finalement proposé (330 ch) quand la voiture est finalisée en 1973. De quoi en faire – peut-être – la berline la plus rapide du monde, avec 230 km/h au maxi.
La Deauville restera confidentielle
Une beauté façon Jaguar, un cockpit luxueux, un V8 surpuissant (de Tomaso en a retravaillé l'admission) et bien plus fiable que le bloc XK anglais, la recette du succès ? Pas vraiment. En réalité, la Deauville est horriblement chère et pas très bien fabriquée (comme la Pantera d’ailleurs), tandis que les relations avec Ford dégénèrent en 1973 : la voiture ne sera pas vendue aux USA, faute de réseau. Son principal marché se ferme. Patatras ! Ajoutez des prix du carburant qui grimpent fortement, et vous obtenez la recette d’un désastre.

La Deauville sera sporadiquement importée en France : en 1975, alors entrée depuis un an dans sa 2e série, améliorée, elle coûte 130 000 F, l’équivalent de 107 000 € actuels selon l’Insee. A titre de comparaison, une Jaguar XJ12 5.3 L, au V12 autrement plus noble, ne coûte « que » 91 850 F… Pour 1978, la Deauville subit d’autres retouches, plus nettes (pare-chocs, intérieur), et elle vivotera ainsi jusqu’en 1985.
La production ? 248 unités. Infime en somme. Un échec total ? Pas tout à fait. En effet, la base technique de la Deauville servira au coupé Longchamp, mais aussi chez Maserati, que de Tomaso a rachetée en 1975. La grande berline Quattroporte III et le coupé Kyalami (une Longchamp à moteur frappé du trident) dérivent également de la Deauville. En somme, celle-ci a permis de sauver Maserati… Actuellement, une Deauville en bon état reviendra à environ 55 000 €... quand on en trouve une !
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