2. Essai - Honda CRF1100L Africa Twin Adventure Sports ES : un 19 pouces qui voit large
Dès la mise en route, l’échappement nouvelle formule résonne dans les graves. Une sonorité profonde dont il ne se départit pas, même une fois dans les tours. Cette bande sonore rythme la moindre évolution au guidon de l’Africa Twin 1100 ES Advendture Sport. Avant de partir, nous tentons de régler la moto et particulièrement le mode User afin de le libérer de toute assistance ou sécurité non nécessaire en l’état. Définitivement, l’expérience utilisateur pourrait être meilleure, notamment pour éviter autant de manipulations et aller-retour dans les menus et au sein même de l’instrumentation. Un comble que la moto et son DCT soient si simples et évidents, alors que l’on doit se « battre » gentiment pour en tirer le meilleur. Complète, certes, tactile pour certaines fonctions, c’est un fait, l’instrumentation est pratique, mais cela s’arrête là. Fin du chapitre, le plaisir est ailleurs.
Un clic sur D et la première est enclenchée. Un autre clic et le mode S s’affiche. Un appui long et l’on passe du S1 au S2 puis encore un afin d’obtenir le S3, soit le plus réactif de tous. Un clic et hop, on repasse en D. Un appui du pouce droit sur le bouton M/T et l’on bascule entre transmission automatique et transmission Manuelle. Pour autant, on se rend rapidement compte des grandes évolutions du DCT et de la non nécessité de passer soi-même les rapports.
Partant en agglomération et par de la route en environnement urbain, le mode D semble intéressant, que l’on soit en comportement Tour ou en Urban. Par sa douceur et par sa pertinence, son enchaînement des rapports bas dans les tours et toujours au bon régime moteur, il permet de consommer peu sans vibrer et sans avoir l’impression de brouter. Fini le passage prématuré de rapports ! Les décollages sont doux, progressifs et énergiques à la fois. Surtout, on remarque quelque chose d’absent sur le précédent modèle : une poussée très agréable dans les régimes moteur intermédiaires. C’est franc, cela se renforce d’autant plus que l’on est en mode S, et le moteur prend du relief tout en restant particulièrement efficace.
Un DCT au top
Arrivé à un point de prédiction et d’analyse optimal à ce jour, le DCT gère très efficacement la transition entre les différentes vitesses, qui est si douce que la fluidité et l’efficacité impressionnent. Reste la possibilité d’intervenir manuellement pour dompter la boîte et l’inciter à apprendre que l’on aime rétrograder avant un virage, ou passer les rapports en sortie de courbe pour enrouler dès que l’on n’ouvre pas plus les gaz que d’un tiers ou une demi poignée. Seul le mode D réclame de tordre la poignée et d’attendre un chouilla pour un dépassement vif lorsqu’il est sur les derniers rapports. Un point à anticiper. En S, le régime est plus élevé et permet de ne plus se préoccuper de cela. Le Pouce droit, l’index et le pouce ce droit ont donc encore un peu de travail pour pimenter n’importe quel trajet.
D’autant plus que la nouvelle partie cycle de l’Africa Twin Adventure Sport ES convainc instantanément. Avec son centre de gravité plus bas, sa roue avant moins volage et une mise sur l‘angle plus progressive et quelque part plus naturelle, on retrouve un comportement des plus appréciable. Les suspensions réglées souples (solo), l’effet de filtration est saisissant, tandis que seul un freinage sur l’angle et de l’arrière induit un léger mouvement. Si l’on attrape le levier droit, la moto reste par contre imperturbable. Et c’est là l’une des principales améliorations apportées par la nouvelle roue avant. Ce sentiment de sûreté de l’action, quel que soit le rythme, une précision accrue, des efforts moindres sur un guidon plus serein.
Des vibrations et de l'air (beaucoup !)
Justement, à propos du cintre. Celui-ci renvoie de nombreuses vibrations à l’amplitude assez élevée, notamment aux allures autoroutières, soit à partir de 110 km/h. Une vitesse à laquelle la bulle revoie déjà pas mal d’air sur les flancs du torse et les côtés du cou, générant au passage quelques remous sonores dans le casque. Supportable, mais moins bien que sur un 800 DE ou encore certaines Teutonnes. Alors on remonte le nouvel élément ? En lâchant les deux mains… oui. La pression de l’air reste très correcte, et sa circulation importante entre la bulle et le torse. On respire, certes, mais la position idéale n’existe pas pour un conducteur d’un mètre quatre-vingt.
Dommage, car il n’existe pas de bulle en option à ce jour, ni de déflecteurs. Au moins, les jambes semble bien protéger de la moindre pression, tandis que leur position est plus que supportable sur une jonction rapide de plus de 20 km. Même davantage pliées, on conserve un bon niveau de confort, tandis que la position des bras n’appelle aucune critique autre que les vibrations déjà évoquées. Dans le feu de l’action, cela dit, on oublie vite ces phénomènes. Et l’Africa Twin est une moto dynamique à souhaits, qui dégourdit rapidement le fessier, même si celui-ci est plutôt bien installé sur un rembourrage restant ferme, mais avenant. Confort là encore, donc.
De l’action, on n’en manque pas sur ces petites routes enchaînant les virages et courbes au revêtement quasi parfait. Il pourrait y avoir une bosse que les suspensions n’en auraient cure. Les éléments Showa s’adaptent rapidement et efficacement au terrain, gérant automatiquement l’hydraulique tandis que le DCT continue de donner pleine satisfaction, en limitant au maximum les sollicitations de l’amortisseur et de la fourche lors du passage des rapports. Quelque part, il contribue à préserver un équilibre appréciable et à limiter les transferts de forces, ainsi que les phases « neutres ». Du fait de la non mobilisation de la jambe gauche et de la main servant habituellement à débrayer, on adopte une conduite plus véloce, on est en permanence dans l’action, dans l’anticipation, tandis que l’on s’en remet sans peine au freinage lui aussi très efficace.
Un coup de pouce sur le poids
Cette nouvelle CRF1100L Adventure Sport ES éclipse totalement la version de 21 pouces dans le feu de l’action. Elle semble même peser une bonne dizaine de kilos de moins, au minimum, donnant par moments la sensation de ne pas avoir plus de 210 à 220 kg à mouvoir. Sauf que. Sauf que cette aisance a un prix : la garde au sol. Si vous aimez prendre de l’angle, il va falloir commencer à se méfier de l’engagement et du déclenchement de l’inscription, mais aussi de la facilité avec laquelle on penche et on remet quelques degrés. En perdant 30 mm de hauteur, on attaque les repose-pieds enduro pourtant peu larges, mais surtout leur semelle comme leur support peuvent devenir des points de pivot et de glisse… Et ils sont pour le moins durs ! Autant dire que quitte à faire des étincelles au guidon, on préfère que ce soit sans soulever la roue arrière.
Alors on adapte son style en oubliant définitivement de sortir la jambe pour préférer ouvrir ou sortir le genou, tandis qu’une fois encore et avec ce style de conduite, la roue avant s’accorde mieux que si elle titrait 21, comme nous avons pu le vérifier. Tout comme il nous a été donné l’occasion de comparer les deux versions de DCT, avec une marche certaine entre les deux en faveur du nouveau. Optimisé, il permet surtout de profiter d’un réveil intermédiaire bénéfique aux sensations comme aux reprises. Certes, la nuance se joue dans la finesse, dans le ressenti, mais elle est quantifiable. Ce qui était bon est devenu meilleur, c’est un fait, au point de séduire (convertir ?) un confrère jusque-là réfractaire.
Des performances à la hauteur des ambitions
Quelques portions de route nous auront permis d’utiliser le mode de passage de vitesse manuel, le temps de pousser les rapports jusque dans la zone rouge et de jauger de la pertinence du DCT. De fait, on observe une vitesse maximale s’établissant au-delà de 220 km/h compteur avec très peu de mouvement de roulis. Les pneumatiques comme les suspensions ou encore l’aérodynamisme de l’habillage permettent de rouler vite. Très vite, mais pas forcément de faire une grande différence entre la 5 et la 6, qui fait donc office d’overdrive. En 4, on pousse à 195 km/h environ, en 3 à 160, en 2 à 125… ce que l’on ne voit jamais en automatique, les rapports passant - à raison - bien avant. À l’occasion de quelques tests d’accélération vive, brute à brutale, même, sur les deux premiers rapports, on s’aperçoit que la roue avant accepte de se lever tout en passant un rapport... Le Wheeling en toute sécurité, d'autant plus qu'il est possible d'activer la sensibilité du lever de roue, qu'il s'agisse de celles-ci ou bien de celle se trouvant à l'arrière.
Le poids de la moto se fait alors sentir, tout comme le dôme de caractère, lorsque passe le rapport supérieur de manière plus prononcée que par le passé. Le DCT nouvelle génération est donc plus souple et plus doux à l’attaque des gaz, plus progressif, en un sens, avant de renforcer la poussée moteur. Pour autant, il castre peu les envies et les possibles, si on lui en laisse la possibilité en désactivant des aides inutiles l’occurrence (et déjà testées/connues lors de nos précédents essais). Autre bénéfice de ces nouveaux réglages et choix ergonomiques, les demi-tours et manœuvres très lentes se font avec une facilité déconcertante et bienvenue.
Dans les chemins avec la roue de 19
Le Portugal est un pays où le réseau routier est de qualité – par endroits -, mais où l’on retrouve surtout nombre de chemins traversant d’immenses zones pour rallier les habitations isolées. Une moto capable de composer avec ces variations est donc un plus, sans qu’il ne soit besoin de réelles performances dans les chemins. Du roulant en terre et en plis rocheux affleurant, nous en avons pratiqué un peu. Histoire de. Le temps de. De se dire que le off road fait toujours partie des possibles de cette Africa Twin, et que les A41 ne sont pas ridicules une fois dans la « terre ». En mode de comportement Off Road, avec le moteur réglé au plus doux et sans frein moteur, sans ABS à l’arrière, on découvre une nouvelle fois le caractère avenant de la moto.
Là encore, les suspensions filtrent efficacement les reliefs et mettent en confiance, tandis que l’on dirige avec un côté plus filtré, plus feutré qu’avec la roue de 21 pouces. Les informations remontées par le train avant sont rares, tandis que l’on déclenche aisément une glisse de l’arrière. Le DCT tracte, réagit, relance en douceur, avec une force proportionnée, tandis que l’on peut encore passer en mode manuel et solliciter les gâchettes. Dès lors, on retrouve la fougue du bicylindre, le potentiel de glisse et l’on se rend compte que conduire debout n’est pas réellement agréable : à la fois le guidon et la commande de frein se retrouvent trop basses, faisant regretter pour cette seconde qu’elle ne soit pas réglable en un tour d’ergot, comme c’est le cas chez Triumph.
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