2. Du côté des assureurs et du marché de l'occasion
Qui dit débridage dit déclaration à son assurance pour être en conformité avec son contrat. Mais cette nouvelle législation aura quel impact sur le porte-monnaie ? Car même si la corrélation puissance moteur/ accident n'a jamais été prouvée, nous savons bien que nos assurances ne vont pas se gêner dans l'augmentation des tarifs, s'il y a possibilité de le faire.
Pour rappel, jusqu'à aujourd'hui, la dénomination MTT1 ou MTT2 sur la carte grise indique la puissance délivrée par la moto et cela permet aux assurances de fixer une tarification en tout état de cause. Après, il est très courant qu'une moto déclarée à 100 chevaux auprès de l'organisme ne l'était pas vraiment. Un « oubli » qui pouvait mettre juridiquement à mal un client en cas d'accident. En effet, c'était le moyen pour l'assurance de ne pas payer les dédommagements car l'expert pouvait constater que la machine n'était pas aux normes. Un problème qui ne devrait plus exister dès 2016 sur les véhicules neufs.
Mais reste le problème des tarifs qui seront appliqués au 1er janvier sur les nouvelles immatriculations et dans un deuxième temps, sur les motos qui pourront recevoir le rétrofit. Lors de notre enquête, la grande majorité des assureurs sont restés sourds à nos appels ou ont largement botté en touche, même la FFSA (Fédération Français des sociétés d'Assurances). On peut aisément établir plusieurs raisons à ça, soit un manque flagrant de connaissance du dossier, soit le manque de retour administratif qui empêche de prendre les devants, soit un aveu par le silence que la surprime ou l'augmentation de la cotisation ne serait pas très loin.
Seule la Mutuelle des Motards a déjà pris position sur le dossier du débridage. Cela fait de nombreuses années que l'assureur est conscient que le bridage est une aberration à la Française et parfaitement conscient que de nombreux sociétaire ont leurs machines déjà débridées (et n'ont jamais cherché à le vérifier lors d'un accident). De facto, la légalisation des motos de plus de 100 chevaux ne changera rien pour eux, et ils sont persuadés que les statistiques d'accidents n'évolueront pas. Ils n'augmenteront donc pas leurs tarifs, ni ne mettront de surprime sur les machines en rétrofit. Bonne nouvelle de ce côté-là. Et pour les autres alors ? À quoi pouvons-nous nous attendre ?
Pour comprendre ce qu'il peut se passer dans l'année à venir...
...il faut déjà savoir comment la mise en place va se faire.
Au départ, lorsqu'une machine est conçue, le constructeur doit délivrer un certificat de conformité. Fait rappelé sur le règlement européen 128/2013 :
« Le système de réception UE par type vise à permettre à tous les États membres de confirmer que chaque type de véhicule a été soumis aux vérifications prévues par le présent règlement ainsi que par les actes délégués et d'exécution adoptés en application du présent règlement, et que le constructeur a obtenu une fiche de réception. Il contraint en outre les constructeurs à délivrer un certificat de conformité pour chaque véhicule produit conformément à la réception par type. Lorsqu'un véhicule est accompagné d'un tel certificat, il devrait pouvoir être mis à disposition sur le marché et immatriculé afin d'être utilisé sur tout le territoire de l'Union. »
- Sur un véhicule neuf, cette certification permet de faire la première demande d'immatriculation en MTT2 (ou MTT1 pour les versions bridées jeunes permis et là encore ils se mélangent les pinceaux entre les 34 chevaux de l'époque et les A2 actuels). De 1996 à aujourd'hui, les cartes grises MTT2 spécifient l'ensemble des machines jusqu'à 100 chevaux (tolérance à 106cv) immatriculées jusqu'au 31/12/2105. Au-delà, les assureurs devront donc prendre en compte le type le nouveau type MTT ? (pas encore défini à la date de notre article), pour le même modèle plus l'ensemble des facteurs habituels (puissance fiscale, motorisation, genre, lieu, bonus ect…). Il faudra donc déjà bien vérifier que les données des machines sont exactes sur votre carte grise. Pour les véhicules en rétrofit, il suffira de vous présenter avec la déclaration de votre concessionnaire du débridage pour vous faire faire une nouvelle carte grise et la présenter à votre assureur. La question est de savoir comment ces nouvelles informations seront gérées par ce dernier ?
- Est-ce que les tarifs vont évoluer au 1er Janvier ? Difficile à dire car les assurances basent leur grille de tarifs en fonction de plusieurs facteurs, dont des statistiques d'accidents. Or, il est impossible de prédire si le débridage fera augmenter l'accidentologie des motards. Il est d'ailleurs bien probable que les assurances soient obligées de pratiquer « une année blanche » pour connaître les répercutions de la fin du bridage.
- En toute logique, il faudrait donc attendre 2017 pour voir l'évolution ou non tarifaire. Après la réception des statistiques 2016, pour les moins conciliants, elle pourrait se traduire par une cotisation plus élevée pour la souscription d'un nouveau contrat et voir même une surprime appliquée sur des machines déjà assurées mais ayant subi le débridage prévu par le rétrofit.
Dans tous les cas, il est vivement conseillé de se renseigner avant tout débridage et de faire une déclaration auprès de son assureur du changement sous peine de vous retrouver avec un contrat caduc et un refus de remboursement en cas d'accident, pour cause de fausse déclaration.
Le marché de l'occasion
C'est probablement le milieu où l'arrivée du débridage et surtout la mise en place d'un rétrofit uniquement pour les machines disposant de l'ABS font le plus grincer des dents. Si une grande majorité des motos n'est pas concernée par l'article R311-1, car ne dépassant pas les 106 chevaux, les autres risquent de voir la cote de leur moto fondre comme neige au soleil.
En effet, les machines ne disposant pas de l'ABS et faisant plus de 100 chevaux n'auront pas le droit d'être débridé. Par exemple, une Suzuki GSX-R 1000 de 2014 développant 188 chevaux en full et ne pouvant pas être débridé par manque d'ABS se vendra moins chère sur le marché que la même moto disposant de l'ABS.
C'est un véritable manque à gagner pour les particuliers comme pour les professionnels. Il ne sera pas rare pour les concessionnaires de se retrouver avec des modèles neufs sans ABS qui ne trouveront pas preneur juste à cause de ce facteur. La seule solution reste un prix dévalué ou passer la machine en usage piste. Heureusement, cette période ne sera que transitoire et bon nombre de motards ont attendu avec impatience l'arrivée du débridage pour faire exploser le porte-monnaie pour une nouvelle machine. Seule question que nous pouvons nous poser, c'est les cas de reprise pour l'achat d'un véhicule neuf. Un concessionnaire peu scrupuleux pourrait faire jouer cette décote en sa faveur pour diminuer le prix de la reprise ? À bien surveiller donc sur la cote professionnelle sur laquelle se basent la plupart des pros.
Idem pour le particulier, où du côté du vendeur il faudra faire face à un marché saturé par les machines bridées. En revanche pour les acheteurs pas trop regardants sur la puissance de la moto, ça sera le moment de faire de très bonnes affaires.
Sommaire
Déposer un commentaire
Alerte de modération
Alerte de modération