DESIGN by BELLU : les 50 ans d'Alcantara, Intérieurs propres
La firme Alcantara fête cette année son cinquantième anniversaire. Depuis un demi-siècle, elle propose des solutions élégantes et créatives pour garnir le huis clos de nos automobiles en maniant le luxe avec un respect de l’environnemental qui force le respect.
La tradition a bon dos pour défendre les pratiques les plus controversées. Le palio de Sienne, la chasse à la glu ou le gavage des oies sont des pratiques entretenues par les défenseurs du patrimoine au grand dam des apôtres du bien-être animal.
Nous ne trancherons pas. Qui sommes-nous pour prendre parti contre les pratiques cruelles ? Contentons nous de n’être que de modestes commentateurs de l’automobile et de son usage.
Justement ; l’automobile n’est pas à l’abri du débat. Dans nos habitacles, garnis de meubles en ronce de noyer, vautré dans des fauteuils en cuir, on peut se poser la question du bien-fondé de la survivance d tels codes. Est-il judicieux d’abattre des arbres et de dépecer des bêtes ?
La réponse, comme souvent, est apportée par le design. Les designers sont là pour analyser nos travers, prévoir nos revirements, soigner nos mauvaises consciences et corriger nos déviances.
Il y a un demi-siècle, on ne se souciait pas de tout ça. Il n’y avait que quelques esprits visionnaires pour apporter des réponses à des questions que l’on ne se posait pas. Myoshi Okamoto était de ceux-là. Ce scientifique japonais travaillait sur l’invention de solutions inédites dans le domaine des textiles et des fibres. En 1970, il inventa un matériau magique composé de polyester et de polyuréthane qu’il baptisa Ultrasuede. Il en céda la licence de fabrication à la compagnie Antor S.p.A. née du partenariat entre le groupe ANIC (aujourd’hui ENI) et Toray Industries Inc. Rebaptisée Iganto S.p.A. en 1973 puis Alcantara S.p.A. en 1981, l’entreprise est aujourd’hui détenue par les groupes Toray et Mitsui.
Au-delà de ces avatars structurels, Alcantara S.p.A. apparaît aujourd’hui comme une firme éminemment italienne, à l’image de son patron Andrea Boragno. Le siège de la société se trouve à Milan tandis que l’unité de production est localisée à Nera Montoro, en Ombrie.
L’idée de génie qui sous-tend l’Alcantara c’est sans doute que ce matériau n’imite pas une matière organique existante, elle ne singe rien, ne copie pas, ne fait pas semblant ; elle a sa propre personnalité.
Au fil du temps, l’entreprise a étendu son champ d’activité à des nouveaux produits destinés à des usages très différents. Aujourd’hui, Alcantara travaille dans quatre secteurs de l’industrie : mode, mobilier, informatique et automobile. Des terrains d’investigation si diversifiés que la variété a entraîné d’innombrables élaborations autour de l’idée originale. Il existe aujourd’hui une infinité de variantes, de solutions, de réponses, de dessins, de textures, et bien sûr de coloris.
Très vite, le design automobile a été concerné par la découverte de ce textile providentiel. On ne sera pas surpris d’apprendre que le carrossier Bertone a été le premier partenaire d’Alcantara dans le domaine de l’automobile.
Très vite, le design automobile s’est montré intéressé par la découverte de ce textile providentiel. On ne sera pas surpris d’apprendre que le carrossier Bertone a été le premier partenaire d’Alcantara dans ce domaine. Curieux, avant-gardiste, provocateur, Bertone a toujours été à la recherche de solutions originales. Dans les années 1970, le carrossier est au sommet de son art grâce à la contribution du styliste Marcello Gandini. Bertone introduit pour la première fois l’Alcantara dans un aménagement intérieur à l’occasion de la création du concept car Lamborghini Bravo présenté au Salon de Turin 1974. L’intervention est discrète : seul le dessus de la planche de bord est recouvert d’Alcantara noir.
Quelques années plus tard, la Fiat X1/9 est la première voiture de grande série à bénéficier d’une finition en Alcantara. En 1984, Lancia adopte à son tour cette matière pour sa berline Thema. Le pli est pris. Une multitude de voitures de série ou de réalisations sur mesure vont explorer les ressources de l’Alcantara.
À l’origine, dans son usage le plus fréquent, l’Alcantara évoque un cuir à la surface veloutée et brossée, comme le nubuck, la suédine ou le daim. Mais très vite, une multitude d’extrapolations sont développées. L’Alcantara est capable de prendre mille aspects différents. Sans parler des caricatures qui peuvent amener l’Alcantara à prendre l’allure d’un marbre de Carrare ou du béton brut ou ciré.
La démarche d’Alcantara est particulièrement respectable car elle n’a rien d’opportuniste et procède d’une stratégie vertueuse longuement mûrie. Depuis 2009, Alcantara bénéficie de la certification tant convoitée de neutralité en matière de carbone.
Tous les constructeurs cherchent aujourd’hui à se dédouaner sur le plan environnemental. Alcantara a été copié mille fois. La direction admet qu’elle ne peut pas empêcher le phénomène. Mais il existe aussi d’autres solutions. Pour remplacer le cuir, tous les subterfuges sont bons. Pour le projet ID.Space Vizzion (2019), Volkswagen a imaginé une sellerie en AppleSkin, un matériau réalisé à partir de déchets de pommes qui sont broyés, séchés, transformés en poudre et mixés avec du polyuréthane.
Depuis 2017, Tesla ne propose plus de sièges en cuir provenant des animaux, mais utilise l’Apple Peel Skin, un matériau fabriqué en Italie à partir de « déchets » de pommes.
À bord de la Polestar Precept, toutes les matières sont issues du recyclage, du tissu des sièges tricoté en 3D à partir de bouteilles en plastique, aux coussins de la sellerie en liège venu de l’industrie vinicole, en passant par les tapis de sol dérivés de filets de pêche usagés. Dans la Bentley EXP 100GT, le textile organique provient également de la vinification ; c’est un biomatériau obtenu à partir du traitement de la lignocellulose et des huiles contenues dans le marc de raisin, une matière première végétale composée des peaux de raisin, des tiges et des graines.
La firme canadienne Matt & Nat produit un cuir vegan composé de matériaux recyclés, des bouteilles en plastique, ou du polyuréthane. L’intérieur de l’Audi E-Tron GT est totalement végétalien, composé de fibres recyclées.
Les exemples ne cessent de se multiplier. Les Charolaises respirent.
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