Interdire les pubs pour les autos polluantes : pour Séguéla, "il ne faut pas tomber dans un forcing de l'écologie"
Florent Ferrière , mis à jour
Des députés ont déposé un amendement à la loi d'orientation des mobilités pour interdire les publicités pour les voitures qui ne sont pas électriques ou hybrides rechargeables. Caradisiac a interrogé Jacques Séguéla sur ce sujet.
En France, les publicités pour les voitures sont déjà très encadrées, avec notamment l'interdiction pour les constructeurs de faire référence aux notions de vitesse et de performances. Mais des députés rêvent d'une réglementation nettement plus contraignante, sur l'autel de l'écologie.
Deux députés veulent en effet l'interdiction des publicités pour les voitures polluantes. En clair, seuls les modèles 100 % électriques et hybrides rechargeables pourront être mis en avant. Matthieu Orphelin, député du Maine-et-Loire, et Delphine Batho, députée des Deux-Sèvres, ont déposé un amendement à la loi mobilité, qui est actuellement étudiée à l'Assemblée Nationale.
Celui-ci propose cet article : "À compter du 1er janvier 2020, est interdite toute publicité portant sur des véhicules particuliers dont les émissions de dioxyde de carbone sont supérieures à 60 grammes par kilomètre".
La source d'inspiration est la loi Evin, qui concerne le tabac et l'alcool. Avec cette interdiction, ces députés souhaitent accélérer la conversion du parc automobile vers des modèles branchés. Dans l'exposé de leur amendement, les deux députés écrivent : "Encourager la vente de véhicules fortement émetteurs de CO2, qui continueront à rouler pendant plusieurs décennies, est contraire à l’objectif de transition vers une mobilité bas carbone, pourtant indispensable pour faire face à la crise climatique."
Ils soulignent d'ailleurs que la moyenne des rejets de CO2 des véhicules vendus en France est repartie à la hausse ces dernières années. Ils pointent du doigt les SUV : "ils ont représenté un tiers des ventes en 2017. Or ces véhicules lourds sont, pour la plupart, très émetteurs de CO2. Ils sont par exemple majoritaires parmi les véhicules vendus se situant dans les classes C à F (émettant entre 121 et 250 grammes de CO2 par kilomètre)".
Matthieu Orphelin et Delphine Batho semblent toutefois conscients que leur amendement a peu de chance d'être adopté. L'enjeu économique est colossal, et pas seulement pour les constructeurs. L'automobile est le second secteur annonceur en France, avec des sommes énormes. Y mettre fin ébranlerait aussi les agences françaises et les diffuseurs. Mais au moins, le débat est lancé.
Questionné sur l'interdiction, Yannick Jadot, député européen Europe Écologie Les verts, a indiqué ce matin sur RTL qu'il faudrait arrêter "pour les grosses cylindrées", tout en précisant "je sais que c'est très compliqué pour les journaux, pour les médias". Mais pour lui, "c'est un imaginaire collectif de la surconsommation de carburant, de véhicules très lourds et malheureusement après on se plaint que les pleins coûtent trop cher".
Caradisiac a pu interroger Jacques Séguéla sur ce sujet. Sa première réaction ? "En 1968, j'ai chanté 'il est interdit d'interdire". Pour le publicitaire, à l'origine de spots automobiles mythiques (et qui vient d'écrire un livre sur les 100 ans de pubs Citroën), "il ne faut pas tomber dans une espèce de forcing de l'écologie, qui devient une écologie punitive". Jacques Séguéla souligne qu'une telle mesure pointe encore du doigt ceux qui ne peuvent faire autrement que d'acheter une voiture thermique.
Pour lui, "l'industrie automobile n'a pas besoin de cela en ce moment. On sent une reprise économique de la France, avec une baisse du chômage. PSA se porte bien par exemple. C'est plutôt le moment de souffler sur les braises que de les éteindre".
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