Conduire sans permis est-il dangereux ?
Les sans permis auraient bien plus d'accidents que les "avec permis" et cela justifie que désormais, on les traque. En réalité, il y a énormément de bonnes raisons de leur faire la chasse, mais la sécurité routière n'en est pas une.
Entendu une info au JT de France 2 : les conducteurs sans permis, dont le nombre serait en forte croissance, ont plus d'accidents que la moyenne.
Bizarre : je me souviens avoir découvert exactement l'inverse en enquêtant sur le sujet voici une quinzaine d'années. La conclusion était que les sans permis avaient bien moins d'accidents que les automobilistes en règle.
Il y avait même sur le site officiel de la Sécurité routière un dossier sur le sujet, plein de tableaux et de statistiques qui démontraient que les sans permis - tant ceux qui ne l'ont jamais passé que ceux qui l'ont perdu - étaient bien moins impliqués dans les accidents corporels et moins souvent auteurs d'infraction. Conclusion d'alors : les sans permis prenaient moins de risques, faisaient tout pour ne pas être interpellés, bref se faisaient tout petits dans le trafic, à l'inverse du conducteur lambda qui se croit "tout permis".
700 000 sans permis ? Ou 1,5 million ?
Donc, ça a changé. Ce doit être à cause du fameux "ensauvagement" de la société. Ou bien des réseaux sociaux…
J'ai quand même vérifié… Et découvert que l'info sur la dangerosité des sans permis est basée sur l'hypothèse qu'ils seraient 700 000 en France.
En fait, si on connaît très précisément le nombre d'accidents corporels dans lesquels ils sont impliqués, on ignore, et pour cause, leur nombre exact.
Mais au début des années 2000, les chercheurs l'estimaient compris entre 1 et 1,5 million, ce qui change radicalement le calcul et démontrerait l'exact contraire de ce qu'affirmaient ce soir-là les pouvoirs publics, par la voix de France 2. En réalité, les conducteurs sans permis ont au pire autant d'accidents que les autres et au mieux, bien moins. Ce qui est, somme toute, parfaitement logique et même psycho-logique. Et jusqu'à présent jamais remis en cause par la Sécurité routière.
Le sans permis coûte cher en indemnisations
Mais au ministère de l'Intérieur, on doit faire passer une nouvelle réglementation qui, depuis le 1er janvier, autorise l'utilisation du nouveau fichier des véhicules assurés (FVA), lequel permet via le système LAPI (lecture automatique de plaque d'immatriculation) dont seront bientôt équipés tous les véhicules des forces de l'ordre de détecter automatiquement un véhicule non assuré. Et un véhicule non assuré, c'est bien souvent celui d'un sans permis, car pas ou plus de permis, pas d'assurance….
Du pur Big Brother même si c'est pour la bonne cause : pas votre sécurité qui a bon dos, mais la santé du Fonds de garantie des assurances (FGAO) qui indemnise les victimes de conducteurs sans permis et dont le financement pèse sur la prime de tous les assurés.
C'en est donc fini du sempiternel entrefilet de quotidien régional "Il conduisait sans permis depuis 1987 !" avec la photo du papy qui explique que "c'est quand même pas ben plus compliqué à manœuvrer qu'un tracteur !"
La galère du permis, une spécialité européenne
Et de fait, ce n'est pas si compliqué. D'ailleurs, dans bien des pays civilisés, on "donne" le permis de conduire après une formation et un examen succincts et/ou un apprentissage avec Papa-Maman. C'est ainsi que l'on pratiquait en Belgique et en Grande-Bretagne avant que l'Europe impose son sacro-saint chemin de croix sans le moindre effet sur la mortalité des conducteurs débutants. Et c'est encore ainsi que cela se passe pour les jeunes dans la plupart des états américains, en Australie, au Canada… Sans plus de dégâts que chez nous.
Contrairement à ce que croient l'immense majorité des Européens, il n'est pas indispensable de débourser autour de 2000 € et de perdre des douzaines d'heures à faire défiler des QCM et touiller une boîte de vitesses pour être un bon conducteur. Ou un mauvais. Prudent ou risque-tout, adroit ou maladroit, altruiste ou égoïste ne sont pas des caractéristiques que modifient 20 ou 30 heures de formation. Fondamentalement, ni l'auto-école, ni l'inspecteur ne changent quoi que ce soit au candidat.
En fait, l'intérêt social du permis ne réside pas tant dans la formation et l'examen qui la sanctionne, mais dans le droit qu'il donne à conduire.
Parce qu'il s'agit de ne pas perdre ce droit (ou de camoufler le fait qu'on l'a perdu ou jamais acquis), le permis est notre garde-fou.
On pourrait par conséquent, à l'image de ce qui se pratique pour l'accès à la 125, le donner à 100 % des candidats pour peu qu'ils aient suivi le cursus. Et même rendre ce cursus deux ou trois fois moins pénible et coûteux sans la moindre conséquence pour la sécurité routière.
Et avec un énorme bénéfice pour la mobilité des jeunes, le financement de leurs études et formations et leur accès à l'emploi.
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