Alfa 164 Procar, une F1 en habits de berline
Motorisée par un V10 destiné à la Formule 1, l’Alfa Romeo 164 Procar devait avoir une suite tout à fait alléchante, dans une nouvelle catégorie de compétition. Mais il n’en a rien été…
Au creux des années 80, Alfa Romeo boit la tasse en Formule 1. Ou plutôt ses moteurs, qui animent les monoplaces Osella. Champion du monde dans les années 50, le Biscione est revenu en course dans les années 70 en motorisant les Brabham, propriétés d’un certain Bernie Ecclestone. Celui-ci dirige également la FOCA, pour Formula One Constructors Association, et a une idée fort intéressante pour attirer les constructeurs généralistes dans la catégorie-reine du sport automobile.
Une série ouverte qui courrait en ouverture des grand-prix, un peu comme le Championnat BMW M1 Procar en 1979 et 1980. Sauf que là, les bolides seraient variés et surtout techniquement très radicaux. En effet, l’idée de ce Procar nouvelle mouture consiste pratiquement à poser des carrosseries de berlines de M. Toulemonde sur des châssis de Formule 1, avec le moteur qui va bien.
Proche d’Alfa Romeo via Brabham, Ecclestone en parle notamment au blason milanais qui se montre vite enthousiaste. Pourquoi ? Parce qu’en plus de ne guère briller en F1, donc de ne pouvoir profiter des retombées de son investissement dans cette catégorie, il présente fin 1987 une nouvelle auto, la 164, ce qui ne lui arrive vraiment pas souvent ! Aussi est-il crucial de bien la lancer, et le futur Procar tombe à point.
Parallèlement, Alfa a racheté Brabham pour courir dans cette nouvelle série. Brabham et Dallara mettent au point un châssis proche de celui d’une Formule 1, composé d’une coque en carbone/kevlar/Nomex sur laquelle se fixe les suspensions et le moteur. Celui-ci n’est plus le 4-cylindres turbo jusque-là fabriqué par Alfa en F1 : ce type de moteur est sera effet interdit dès 1989, au profit de blocs non suralimentés.
Au contraire, il s’agit d’un fantastique V10 atmo sur lequel Alfa bûche depuis 1985 afin de le fournir à Ligier (qui n’en voudra pas). Codé Tipo 1035, ce 3,5 l comporte 4 arbres à cames en têtes et développe quelque 620 ch à 13 300 tr/min. C’est un des tous premiers V10 spécifiquement conçus pour la Formule 1 !
Sur cet ensemble alléchant, on pose la carrosserie de la berline 164, ce qui donne, en 1988, l’incroyable 164 Procar. Pratiquement identique, au premier coup d’œil, à celle du modèle de série, la carrosserie devient spectaculaire dès qu’on l’ouvre. En effet, toute la partie en arrière du poste de pilotage se retire d’une pièce, dévoilant d’un coup la fantastique mécanique et la suspension. Idem à l’avant, où il n’y a évidemment pas de moteur. Dr 164 et Mister Brabham !
La voiture roule, très fort même, au point que Riccardo Patrese, qui la pilote pour la première fois en public en ouverture du grand-prix de Monza 1988, la décrit comme « délicate » à grande vitesse. Il faut dire qu’avec ses 750 kg en ordre de marche, cette monstrueuse 164 pointe à 340 km/h, sans pour autant générer un appui aéro suffisant pour la plaquer au sol… Les ingénieurs ne manquent toutefois pas d’idées pour le modèle qui courra dans futur championnat Procar.
Malheureusement, ce dernier ne verra finalement pas le jour, les autres constructeurs n’étant pas intéressés. Ainsi, la 164 Procar restera lettre morte, après que deux châssis ont été fabriqués. Idem pour son V10 car Fiat, qui a racheté Alfa fin 1986 annule son engagement en Formule 1 dès 1987, car une autre marque de son empire y court déjà : Ferrari.
Malgré l’annulation du Procar, la Formule 1 verra sa popularité grimper en flèche et l’Alfa Romeo 164 se vendre très correctement. Mais, en rêvant un peu, on aurait bien aimé voir le V10 de la Procar adapté à la série pour animer une sorte de super-164 vendue en concession, bien avant la BMW M5 E60 dont le V10 provient, lui aussi, de la course…
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