Voiture connectée : l'auto mouchard arrive
En augmentant à distance l'autonomie de ses modèles fuyant l'ouragan Irma, Tesla a fait une parfaite démonstration du potentiel de la voiture connectée, celle que l'on pourra surveiller, piloter et même arrêter à distance.
Même après la panne sèche, les batteries des Tesla ont encore un peu de marge, quelques kWh "intouchables" qui préservent leur durée de vie. La même marge qu'il est recommandé de respecter avec un smartphone ou une tablette en ne les déchargeant jamais jusqu'à l'extinction, faute que quoi l'autonomie de leur batterie fond de quelques % à chaque fois.
Mais quand déboulent des rafales à 300 km/h, risquer de perdre 4 ou 5 % de capacité en allant jusqu'au bout du dernier watt est assez secondaire. C'est pourquoi, à la demande d'un habitant de Floride soucieux de remonter le plus loin et vite possible vers le Nord, Tesla a libéré à distance, pour tous ses clients fuyant la péninsule, la quinzaine de kWh cachés par l'électronique de contrôle, permettant de parcourir une trentaine de miles supplémentaires. L'histoire ne dit pas si, vent dans le dos, ils ont eu besoin de ce rab d'électricité mais les médias en ont fait des tartines et la Bourse a salué ce coup d'éclat d'un joli + 5 % : vive la voiture connectée.
La voiture sera connectée pour devenir autonome
Personnellement, ça me fait froid dans le dos. Savoir que l'on peut agir à distance sur mon véhicule me donnerait presque envie de prendre le train. Je préfère encore des caténaires que des fils de marionnette.
Je suis résolument pour le progrès technique, les assistances à la conduite, les automatismes, les radars et les lidars, les scans de panneaux, le stationnement automatique, la correction de trajectoire, le régulateur intelligent et toute la panoplie de bidules et machins pour les maladroits comme ma voisine ou les fainéants dans mon genre. J'y ajouterais même volontiers un truc qui éteindrait à ma place le plafonnier ou la lumière du coffre avant épuisement de la batterie et m'éviterait une ou deux pannes par an. Tout cela me convient parfaitement tant qu'il y a un bouton pour les déconnecter et que cela reste entre la voiture et moi.
Même la voiture autonome, ça ne me défrise pas plus que ça, d'autant que son arrivée devrait coïncider avec l'âge auquel mes enfants me sucreront les clés de bagnole.
L'ennui, c'est que la voiture autonome sera forcément connectée, pour communiquer avec l'infrastructure, les autres véhicules et - c'est le grand sujet du moment - avec les piétons et cyclistes. Je parie que dans vingt ans, le gus qui traversera hors des clous à l'approche d'une voiture robot se fera secouer les puces par une appli de son téléphone, vibreur et sonnerie à fond. En fait, nos voitures seront connectées bien avant d'être autonomes.
Après le pistolet radar, le pistolet immobilisateur
D'ailleurs, elles le sont déjà... De façon utile avec l'eCall, ce système qui appelle automatiquement les secours après le déclenchement d'un airbag, ou manuellement sur demande du conducteur. L'eCall est déjà disponible de série ou en option sur de nombreuses voitures et sera obligatoire sur les nouveaux modèles à partir du mois d'avril prochain.
Mais cette connexion peut aussi s'activer dans l'autre sens... Depuis plus de dix ans, tous les modèles GM et Opel équipés du service On Star peuvent être arrêtés à distance en cas de vol, et aux Etats-Unis, des loueurs et organismes de crédit empêchent la voiture des mauvais payeurs de démarrer. En Europe, le Comité permanent de sécurité intérieure (Cosi) a demandé aux constructeurs et équipementiers de travailler à un dispositif qui permettrait aux forces de l'ordre d'arrêter à distance le moteur d'une voiture. Avec un scan lecteur d'immatriculation connecté on peut imaginer, après le pistolet radar, le pistolet immobilisateur : il suffirait de viser la plaque et zou, le moteur s'arrêterait aussi vite qu'on envoie un mail.
La voiture connectée, c'est également la voiture reliée au constructeur et au concessionnaire, qui sauront ainsi nous dissuader d'aller faire la révision chez Francis à Argenteuil.
Mais aussi, et depuis déjà un bail, à l'assureur qui, si vous avez accepté d'embarquer un mouchard en échange d'une réduction de prime, peut tout savoir de vos déplacements et de votre style de conduite. De même que certains employeurs, grâce aux produits et services de TomTom et consorts, tiennent bien serrés les rênes et les itinéraires des conducteurs pros.
Le respect de la vie privée ? Soyons réalistes, une partie de nos concitoyens s'en moque. En tous cas ceux qui exhibent leurs vacances et les menus détails de leur existence sur les réseaux sociaux et ignorent jusqu'à l'existence des moteurs de recherche sans tracking ne s'émouvront pas de savoir que le moindre de leur trajet enrichit d'innombrables bases de données et peut être connu de la police.
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