Une Alfa Romeo traditionnelle à prix d’ami : la Giulietta 116
Les Alfa dotées du mythique moteur double arbre deviennent hors de prix, sauf une : la Giulietta deuxième du nom, codée 116. Malgré sa ligne curieuse, elle est totalement tombée dans l’oubli alors qu’elle conserve les qualités (et défauts) typiques de la marque. Dès 6 000 €.
Les collectionnables, c’est quoi ?
Ce sont des autos revêtant un intérêt particulier, donc méritant d’être préservées. Pas forcément anciennes, elles existent pourtant en quantité définie, soit parce que le constructeur en a décidé ainsi, soit parce que leur production est arrêtée. Ensuite, elles profitent de particularités qui les rendent spécialement désirables : une motorisation, un châssis, un design, ou un concept. Enfin, elles sont susceptibles de voir leur cote augmenter. Un argument supplémentaire pour les collectionner avant tout le monde !
Pourquoi l'Alfa Romeo Giulietta est-elle collectionnable ?
Déjà, la Giulietta récupère base technique "116" très prisée des fans d'Alfa Romeo. En effet, il s'agit de la dernière propulsion entièrement conçue par la marque milanaise, avant la reprise par Fiat, en 1986, et pour son époque, elle était au top. Moteur double arbre tout en alliage, boîte à l'arrière (schéma transaxle), essieu De Dion bien guidé, 4 freins à disques... En 1972, cette plate-forme apparue sur l'Alfetta faisait référence, et en 1977, quand la Giulietta l'a récupérée, elle demeurait ce qui se faisait de mieux dans la catégorie. Cette dernière berline l'habille d'une carrosserie très originale, qui présente l'avantage, face à la 75 qui l'a remplacée, de conserver un charme seventies. Plus fine, la Giulietta est en train d'être redécouverte, et comme il n'en reste que très peu, sa cote monte. Avis aux amateurs...
La crise dans laquelle s’est enfoncée l’Italie dans la première moitié des années 70, économique et politique, s’est révélée très dure pour les marques nationales. En particulier celle qui était de fait nationalisée : Alfa Romeo. Après les Alfasud et Alfetta, respectivement lancées en 1971 et 1972, de grandes réussites techniques, la marque de Milan n’a plus d’argent pour développer de nouveaux modèles. Problème, il faut remplacer la Giulia, très appréciée mais hors d’âge (elle est apparue en 1962).
Pas question de développer une coûteuse plate-forme pour sa descendante, qui doit prendre place entre les Alfasud et Alfetta. Alors, comment procéder ? En 1973, on décide de dériver la voiture de l’une des deux qui existent déjà, en l’occurrence la seconde. L’idée est d’en créer une variation au look plus jeune et dynamique mais moins chic pour respecter une hiérarchie de marque. Le chef du design du Biscione Ermanno Cressoni, en respectant l’empattement d’Alfetta (2,51 m) crée une ligne en flèche, marquée par une poupe tronquée et très haute qui plonge vers une proue très basse.
On a failli opter pour une carrosserie deux volumes et demi à hayon marquée par un petit décroché arrière, mais on a jugé que la clientèle, conservatrice, préférerait un coffre plus marqué et séparé de l’habitacle. Et puis, cela coûtait moins cher comme ça, même si l’idée initiale se retrouvera en 1983 sur la berline 33. Désignée Giulietta, du nom de celle qu’a remplacée la Giulia à laquelle elle succède à son tour, la nouvelle berline milanaise est présentée au salon de Francfort 1977. Sa poupe curieuse divise les avis, mais son avant agressif séduit. Cela dit, Alfa ne vante pas son Cx de 0.43, alors que celui de la Giulia était de 0.35…
Elle récupère toute l’architecture de l’Alfetta (moteur double arbre longitudinal avant à deux carburateurs double corps), propulsion, boîte à l’arrière), alors qu'on avait imaginé la simplifier, son numéro de code aussi (116) mais inaugure un bloc plus petit : un 1,4 l de 95 ch (pas le 1,3 l de la Giulia). Elle reçoit aussi le 1,6 l de 110 ch. Voilà de quoi à la fois contrer la Fiat 131, traditionnelle mais très populaire, tout en séduisant les fidèles d’Alfa.
C’est aussi le premier avatar de la nouvelle stratégie d’un Romeo désargenté : lancer des autos présentées comme nouvelles mais qui ne sont en réalité que des bases bien connues simplement rhabillées et parfois vaguement améliorées (la position du réservoir d’essence, derrière la banquette, diffère sur la Giulietta). Les futures 33, 90 et 75 n’y dérogeront pas. Problème, si elle se veut plus abordable que l’Alfetta, la Giulietta ne coûte pas moins cher à fabriquer, donc la marge de manœuvre tarifaire reste étroite.
Résultat, elle est relativement chère, débutant à 40 605 F (25 000 € actuels selon l’Insee) avec le petit double arbre de 1 357 cm3. Une Lancia Beta 1600, plus puissante et performante avec son 1,6 l de 100 ch, se contente de 38 500 F, contre 35 000 F à la Fiat 131, dotée du même double arbre mais ramené à 96 ch.
Quant à la Giulietta 1600, plus à-même de lutter contre ces rivales latines, elle est facturée 41 205 F. L’équipement intéressant (instrumentation riche avec compte-tours et pression d’huile, volant réglable) ne lui permet pourtant pas de distancer les Fiat et Lancia. De plus, les essais notent que la Giulietta, à la suspension assouplie face à celle de l’Alfetta, manque cruellement de sportivité.
Heureusement, le constructeur rectifie la trajectoire en présentant de nouvelles versions, la 1,8 l (122 ch) au printemps 1979 puis la 2,0 l (130 ch tout de même, avec un allumage sans rupteurs) en avril 1980. Cette dernière, annoncée à 185 km/h, peut en remontrer à une BMW 320 (122 ch). En 1981, la Giulietta bénéficie un restylage à l’italienne, c’est-à-dire qu’elle est replâtrée à coups de plastique : de grosses protections latérales viennent habiller les flancs…
La technique ne change pour ainsi dire pas, même si les 1,6 l et 1,8 l voient leurs rapports de boîte allongés (pour faire baisser la consommation, au détriment des reprises). La 1,3 l n’est plus importée en France. 1983 voit l’arrivée d’une variante turbo-diesel, dotée d’un 2,0 l culbuté de VM Motori, développant 82 ch : le bloc de l’Alfetta turbo-diesel en réalité. Plus anecdotiquement, le département course d’Alfa, Autodelta, développe une variante 2,0 l turbo (170 ch !) dite Turbodelta qui ne sera produite qu’à 361unités.
En toute fin 1983, la Giulietta subit une deuxième mise à jour. Celle-ci se repère à son bandeau en plastique lui aussi gris barrant la face arrière et contentant les feux de brouillard. Mais il n’y a pas toujours pas d’injection. La Giulietta quitte la scène en 1985, sans avoir démérité car elle a été produite à 379 691 unités. Elle est remplacée par la 75, qui n’en est qu’une évolution superficielle mais bien jugée.
Combien ça coûte ?
Des Giulietta, il n’en reste plus beaucoup. En très bel état, comptez 6 000 € pour une 1,3 l, 7 000 € pour une 1,6 l, 8 000 € pour une 1,8 l et 9 000 € pour une 2,0 l, peu importe la série. Inutile de chercher une turbo-diesel, peu performante. En revanche, on peut désirer une Turbodelta à immatriculer en collection, et là, on comptera 45 000 €… en Italie !
Quelle version choisir ?
Pour des performances dignes d’Alfa, on préférera les 1,8 l et 2,0 l, sachant la première, certes un peu moins puissante, profite d’un moteur plus allègre. Certainement la meilleure variante du « Bialbero » Alfa, surtout en phase 2, avec la boîte courte.
Les versions collector
Toutes, si elles sont en très bel état. Evidemment, le morceau de choix demeure la rare Turbodelta !
Que surveiller ?
Comme toute Alfa des années 70-80, la Giulietta se suicide à la rouille, malgré l’emploi de tôles zinguées et un traitement cataphorèse, qui ont un peu ralenti le processus de putréfaction. Baie de pare-brise, joues d’ailes avant, supports de cric, plancher et passages de roue sont à surveiller plus spécifiquement.
Cela dit, là encore comme sur les Alfa de cette période, le moteur est très solide. Beaucoup ont passé les 200 000 km sans jamais être ouverts, à condition d’avoir été respectés. Vidange tous les 10 000 km grand maximum, réglages réguliers de la carburation, de l’allumage et du jeu aux soupapes, emploi de bougies de qualité, temps de chauffe observés… Du classique en somme !
Par ailleurs, la chaîne de distribution ne pose pas de soucis particuliers. La boîte tient un peu moins le coup, à cause du synchro de 2de qui craque (parfois dès la livraison de la voiture…), mais demeure un atout. Sa commande, aux tiges très longues, prend du jeu, alors que changer les freins arrière, accolés au différentiel, peut se révéler particulièrement pénible !
L’électricité est sujette à quelques pépins, et la finition n’est pas ce qu’on fait de plus solide, mais enfin, une Citroën CX fait bien pire. Bonne nouvelle, les pièces mécaniques de l’Alfa se trouvent aisément. Mauvaise nouvelle, c’est difficile pour les éléments spécifiques (carrosserie, pare-chocs) car il n’y a pas ou peu de refabrications.
Sur la route
On est plutôt bien installé au volant (réglable) de la Giulietta, dans un siège assez agréable. Le tableau, taillé dans un plastique typiquement années 80, arbore un dessin original et se signale par une instrumentation riche : le genre de chose qui manque actuellement. A la conduite, on est vite subjugué par le moteur. Ce 2,0 l a tout pour lui : souplesse, punch à mi-régime, belle vitalité dans les tours, et surtout, la musique ! Même au ralenti, si la distribution est bien réglée, il sonne agréablement, alors que passé les 4 000 tr/min, on éteint l’autoradio pour écouter ses vocalises ! L’excellent étagement de boîte contribue à ses excellentes performances, mais le levier impose un maniement lent et parfois frustrant tant on aimerait ne pas perdre de temps à l’accélération.
Non assistée, la direction n’est toutefois pas trop lourde tout en prodiguant une bonne précision, et le bon grip allié à une excellente répartition des masses rend le comportement routier sain et sûr, même sur le mouillé car la motricité reste bonne (on n’est pas chez BMW, ici !). Agile ? Pas vraiment. Le train avant se révèle paresseux, les prises de roulis trop importantes : tant mieux pour le confort, tant pis pour le sport. Et à la limite, sur une ancienne destinée à être menée tranquillement sur des routes bourrées de radars, pourquoi pas ? Côté conso, en 2,0 l, comptez 10 l/100 km dans ces conditions.
L’alternative youngtimer
Alfa Romeo 155 (1992 – 1997)
S’il est une autre berline Alfa controversée par sa ligne, haute du popotin mais fuselée de l’avant, c’est bien la 155. Cette milanaise, les passionnés du Biscione ne lui ont jamais pardonné ses soubassements de Fiat Tipo (c’est donc une traction), pourtant tellement plus modernes et efficaces que ceux de celle qu’elle remplace, la 75. Pourtant, initialement, la 155 conserve le 4-cylindres tout alliage de cette dernière, à double allumage, en 1,8 l pour 123 ch et 2,0 l pour 143 ch. Le 2,0 l turbo de la Q4 (4x4, elle), est d’origine Fiat, mais la 155 a droit au superbe V6 Busso, en 2,5 l 166 ch, interdit à la Giulietta.
En somme une auto moderne, très aérodynamique (Cx de 0.29), performante, sûre, spacieuse et confortable mais pas très bien finie. Rapidement, en 1993, une version de base 1,7 l est proposée, très nerveuse, mais au restylage de 1995, exit les 4-cylindres Alfa. Place à des moteurs 16 soupapes et double allumage mais tous de la famille Pratola Sera, donc… Fiat. la 155 est remplacée en 1997 par la 156. A partir de 3 500 €.
Alfa Romeo Giulietta 2000 (1983), la fiche technique
- Moteur : 4 cylindres en ligne, 1 962 cm3
- Alimentation : 2 carburateurs double corps
- Suspension : barres de torsion, barre antiroulis (AV) ; essieu de Dion, parallélogramme de Watt, ressorts hélicoïdaux, (AR)
- Transmission : boîte 5 manuelle, propulsion
- Puissance : 130 ch à 5 400 tr/min
- Couple : 177 Nm à 4 000 tr/min
- Poids : 1 020 kg
- Vitesse maxi : 185 km/h (donnée constructeur)
- 0 à 100 km/h : 9,5 secondes (donnée constructeur)
> Pour trouver des annonces d'Alfa Romeo Giulietta, rendez-vous sur le site de La Centrale.
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