Quand les constructeurs pètent les plombs, suite
Les coups de folie des constructeurs généralistes se poursuivent jusqu’à nos jours, donnant lieu à des autos qui deviendront des collectors… Même en électrique !
Autant la Renault 5 Turbo avait une raison d’être, le rallye, autant la Clio V6… est folle, de A à Z. Avec elle, le constructeur ose tout, et c’est à ça qu’on reconnaît la passion ! L’idée d’implanter un gros V6 au centre d’une citadine revient au designer maison Axel Breun, un des artisans du retour d’Alpine.
Il commence par imaginer une Twingo dotée d’un V8 de Ferrari 308, et les croquis qu’il trace plaisent à son patron, Patrick Le Quément. Séduit, celui-ci pousse l’idée, et la direction accepte, ce qui débouche sur une Clio à V6 central. Il s’agit de promouvoir la dernière-née, qui a fort à faire face à une Peugeot 206 plus séduisante !
Un proto est exposé en 1998, puis son développement est externalisé chez un spécialiste de la voiture de sport, TWR, qui la produit en Suède. En 2000, le modèle de route est présenté, mais TWR a bâclé le travail. La Clio V6 marche fort avec ses 230 ch mais se révèle délicate à piloter. Une Clio RS est plus efficace ! Alors, Renault Sport revoit la copie, et après un arrêt de production en 2003 (une fois 1 309 produits), la Clio V6 quelques moins plus tard, corrigée.
Plus puissante (255 ch) et efficace, elle est enfin à maturité, mais son prix énorme la confine à des ventes confidentielles : 2 822 seront écoulées jusqu’en 2005. Qu’importe, la plus petite supercar du monde fait encore baver ! A quand la prochaine chez Renault ?
C’est une histoire étonnamment similaire qui se déroule alors chez Ford. L’ovale bleu s’est couvert de gloire en compétition avec la GT40, à la fin des années 60, remportant trois victoires successives aux 24 Heures du Mans, au nez et à la barbe de Ferrari. Et l’idée de se servir de ces lauriers ressurgit au tournant des années 2000. Cela débouche sur un concept en 2002, puis sur un modèle de production en 2004. La nouvelle GT suscite le coup de cœur tant elle ressemble comme deux gouttes d’essence à son ancêtre tout en paraissant résolument contemporaine, signe que le dessin originel était exceptionnel de modernité. Mais elle ne se destine pas à la course.
Les designers ont réalisé un travail d’actualisation remarquable de subtilité, tandis que les ingénieurs ont conçu une structure ultramoderne en aluminium. Les trains roulants, mis au point avec l’aide d’un certain Carroll Shelby, se complètent d’un V8 à compresseur issu de la Mustang. Avec ses 550 ch, la GT est une authentique supercar, ultra-rapide (plus de 300 km/h), efficace et… confortable. Toutefois, son prix de 150 000 $, compétitif dans la catégorie mais énorme pour une Ford, entravera son succès. 4 038 exemplaires seront vendus jusqu’en 2007, sur les 4 500 prévus. Pas si mal ! Et la cote s’est envolée à plus de 300 000 €…
Ford remettra le couvert en 2015 présentant une nouvelle GT, qui sera commercialisée en 2017. Bien plus typée circuit que celle de 2004, elle adopte un V6 3,5 l biturbo développant 657 ch : elle frôle les 350 km/h. Autrement onéreuse (400 000 € !) et exclusive, la 3e GT se vendra à 1 350 unités sur les 1 000 prévues, jusqu’en 2022.
A la même époque, c’est Volkswagen qui a la folie des grandeurs. Sous l’impulsion de son grand patron, Ferdinand Piëch, la « voiture du peuple » lance une rivale des BMW Série 7, Mercedes Classe S, voire Audi A8 (bonjours la concurrence interne au Groupe VW) : la Phaeton, révélée en 2002. Tout comme la 130 chez Fiat, la Phaetona pour mission de rehausser l’image de VW. Proche techniquement de la future Bentley Continental GT, elle partage avec celle-ci un incroyable moteur W12 (atmosphérique dans le cas de la VW) et profite d’un équipement pléthorique.
Mais son poids frise le délire (2,3 tonnes) tout comme son prix (plus de 110 000 €) et les ventes restent bien en-deçà des espérances. Qu’importe, la Phaeton, qui sera déclinée en V10 TDI, V8 et V6 poursuivra sa carrière comme prévu, jusqu’en 2016 en Europe, où elle sera produite à 84 253 unités. Tout le monde a oublié cette berline d’ultra-luxe qui se dégotte pour une bouchée de pain. Mais VW a pété les plombs avec d’autres modèles à l’époque, comme la Passat W8 et le Touareg, un succès, lui. On n'oubliera pas non plus la délirante XL1 !
Tout comme Ford avec sa GT de 2015, Honda donne suite à sa NSX de 1989. La NSX 2e du nom, révélée en 2016, est la digne descendante de la première. Spectaculairement dessinée, elle bénéficie d’une technologie de très haut niveau. Son V6 3,5 l central, gavé par deux turbos, se complète de pas moins de trois moteurs électriques, un contre la boîte de vitesses, une double embrayage à 9 rapports (excusez du peu !), et un dans chacune des roues avant.
Cette motorisation hybride produit 585 ch, de quoi emmener cette japonaise fabriquée aux USA à 308 km/h. Boum ! Malgré sa très haute technologie, la NSX n’est pas proposée à un prix délirant : 186 500 €. Du moins dans sa catégorie… Typée GT plus que circuit, la super-Honda connaîtra son petit succès, produite à près de 3 000 unités jusqu’en 2021. Mais elle n’aura pas de suite, malheureusement.
Folie électrique ? Cela existe, et ce ne sont pas les fans de Claude François qui me démentiront. On pourrait mentionner la Tesla Model S Plaid, mais on se cantonne aux marques généralistes. Et là, on ne peut passer sous silence une électrique délibérément bruyante, la Hyundai Ioniq 5 N, révélée en 2023. Pourquoi ? Parce que même si elle fonctionne sous batteries, cette coréenne reproduit toutes les sensations d’une bonne thermique de sport : bruit (artificiel) du moteur, à-coups au passage des vitesses (virtuelles) voire vibrations typiques d’un sous-régime. Ahurissant !
Bien sûr, d’un point de vue objectif, cela ne sert strictement à rien. Tout comme la puissance délirante de 650 ch ! Conséquence, la Hyundai franchit les 100 km/h en 3,4 s, donc vous colle au siège comme une Ferrari du meilleur cru. Prodigue en sensations, cette Hyundai coûte cher : 78 000 €. Mais là, face aux électriques de performance équivalente, ça n’est pas délirant.
On le voit, malgré les contraintes liées au CO2, la passion automobile engendre encore des autos délirantes, tout autant que celles dévoilées dans la première partie de cette série dédiée aux généralistes qui pètent les plombs.
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