Les jeunes conducteurs sont-ils vraiment plus dangereux ?
Olivier Cottrel , mis à jour
En France, en 2021, les jeunes de 18 à 24 ans représentaient 8 % de la population, mais 17 % de la mortalité routière. Mais alors, les jeunes sont-ils vraiment plus dangereux sur la route ?
Selon l’Organisation Mondial de la Santé (OMS), les accidents de la route tuent chaque année davantage de jeunes âgés de 15 à 29 ans dans le monde que le VIH/sida, le paludisme ou la tuberculose. L’Institut for Health Metrics and Evaluation (IHME) de l’Université de Washington à Seattle évaluait en 2019 à environ 175 000 le nombre de personnes âgées de 15 à 24 ans tuées dans des accidents de la route dans le monde, ce qui représente 15 % de l’ensemble des décès sur la route.
En France, si les jeunes de 15 à 24 ans représentaient en 2020 seulement 8 % de la population totale, ils totalisaient à eux seuls 17 % de la mortalité routière. Une tendance inquiétante que l’on ne retrouve pas chez nos voisins allemands (14 %), espagnols (10 %) ou même italiens (12 %).
Un phénomène auquel s’est intéressé Dekra à travers son rapport annuel de sécurité routière consacré à la mobilité des jeunes conducteurs, complété par une enquête d’OpinionWay diligentée par Dekra Automotives concernant le regard que les Français portent sur les jeunes conducteurs et leur rapport à la sécurité routière.
Si, lors de cette enquête, 68 % des jeunes conducteurs ont affirmé avoir une meilleure connaissance du Code de la route que leurs aînés, le manque d’expérience, la surestimation de soi et la propension accrue à prendre des risques font partie des sources d’erreur les plus dangereuses pour les conducteurs novices (moins de 2 ans de permis), qui selon les chiffres officiels étaient impliqués dans 18 % des accidents en 2019.
Dans le sondage, réalisé auprès de 1 042 personnes en septembre dernier, parmi les facteurs de risques les plus importants chez les moins de 24 ans, les distractions au volant comptent pour 48 %, ce pourcentage passe à 56 % dans la catégorie des jeunes hommes de cette tranche d’âge. Interrogés sur les pratiques au volant, 65 % disent entrer une destination dans un GPS mobile, 45 % sont déconcentrés par des passagers, 41 % activent un système d’aide à la conduite du véhicule. Arrive ensuite l’utilisation du téléphone pour appeler ou envoyer un SMS pour 34 % d’entre eux et écouter de la musique avec des écouteurs pour 29 %.
Au rayon des aides à la conduite, l’assistance au freinage d’urgence (59 %), les caméras de recul (55 %) et le régulateur de vitesse (50 %) sont jugés les plus utiles par au moins la moitié des Français. Les jeunes de 15-24 ans trouvent quant à eux une utilité à 58 % dans les caméras de recul, 49 % l’assistance au freinage d’urgence et 44 % le régulateur de vitesse, et sollicitent plus facilement les détecteurs d’angles morts (20 % contre seulement 12 % pour l’ensemble des sondés). Or, s’ils apprennent souvent à conduire dans des véhicules qui en sont équipés, leur première voiture n’en dispose pas toujours, majoritairement pour une question de budget et d’âge du véhicule.
L’enquête Dekra révèle que près de trois Français sur quatre estiment que les jeunes générations de conducteurs "roulent trop vite", sans toutefois préciser ce que signifie exactement ce terme. 58 % pensent aussi qu’ils provoquent plus d’accidents que leurs aînés. Les jeunes conducteurs ont bien évidemment un avis plus nuancé sur leurs habitudes puisque 46 % d’entre eux se disent plus prudents au volant que leurs aînés. Mais ils semblent relativement d’accord pour affirmer qu’ils provoquent plus d’accidents que leurs aînés (55 %).
Parallèlement à cette croyance, qui ne repose ici que sur un ressenti ou un a priori, les Français sont ainsi logiquement favorables à des mesures de restrictions encore plus fortes pour les jeunes permis : 84 % des personnes interrogées sont ainsi favorables à l'interdiction totale de boire de l'alcool avant de prendre le volant, 76 % sont favorables à l’instauration d'un apprentissage à la conduite progressif. Une limitation de la puissance des voitures que les jeunes automobilistes peuvent conduire est également une idée appréciée par trois Français sur quatre (74 %). Une proposition qui revient régulièrement dans l'actualité, portée par quelques fulgurances de certains de nos politiques.
Malgré tout, il est impossible d’affirmer avec certitude que les plus jeunes détenteurs du permis de conduire sont plus dangereux que les autres catégories de conducteurs tant les causes des accidents peuvent être multiples. D’autre part, si les jeunes conducteurs sont statistiquement plus souvent impliqués dans des accidents (ce qui fait le beurre des assureurs), ils n’en sont pas plus responsables.
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