L’électronique plus forte que la mécanique dans les futures Mercedes
Définir une nouvelle plateforme sur une base logicielle et non pas sur une base technique classique, voilà ce que s’apprête à faire Mercedes pour la première fois, signant un partenariat avec le spécialiste américain Nvidia. C’est bien sûr la conduite autonome, guidée par l’intelligence artificielle, qui est en question.
Une Mercedes Classe E bardée d’électronique, capable de réelles évolutions de ses fonctionnalités de conduite autonome et de la présentation de ses interfaces, au fur et à mesure de mises à jour ? Voilà à quoi il faut s’attendre après l’annonce d’un partenariat majeur entre Mercedes-Benz et Nvidia, un des très gros fournisseurs de calculateurs informatiques. La société américaine est aussi connue pour ses performances dans les jeux vidéo que dans l’automobile, en vue de la conduite autonome. Mais attention, ce n’est pas un jeu : Mercedes accepte de déléguer à la marque US la primeur dans le développement des prochaines générations de véhicules, revenant sur son partenariat avec BMW dans le cadre de la conduite autonome.
Dès 2024, un nouveau système informatique embarqué basé sur une intelligence artificielle promise comme révolutionnaire équipera ainsi les futurs modèles à l’Etoile, une plateforme nommée Nvidia Drive qui autorisera différentes fonctions de sécurité et de confort en conduite autonome (pas encore précisées à ce stade), avec des options configurables à volonté et surtout, des mises à jour en ligne. Car le temps automobile (6 ans pour une génération) n’est pas le temps informatique (mises à jour majeures annuelles généralement).
En ligne de mire, la conduite autonome de niveau 3 (avec des portions sans les mains), voire 4 pour le stationnement (sans les mains ni les yeux). Ainsi, le géant de Stuttgart laisse-t-il une partie de son sort aux génies de l’informatique, confirmant s’il le fallait la prépondérance du software sur le hardware (le logiciel face au mécanique)… « Jamais une automobile n’aura eu autant de capacité de calcul embarqué » rappelle Jensen Huang, fondateur et CEO de Nvidia. Un marché immense pour le géant américain, qu’il estime aujourd’hui avec un potentiel total toutes marques de 5 milliards de dollars (4,37 milliards d’euros) pour l’intelligence artificielle embarquée en automobile (calculateurs, logiciels et services), jusqu’à atteindre… 700 milliards (611 milliards d’euros) pour équiper une flotte de 100 millions de véhicules à terme ! Le but est de mettre en place des phases de conduite autonome de plus en plus avancées, ainsi que de monnayer une partie des services proposés.
Pourtant, l’ONU vient de signer un règlement très dur concernant la conduite autonome, avec une limitation à 60 km/h et l’interdiction de quitter les voies séparées des autoroutes et les voies rapides, dans un premier temps. Mais tout comme les fonctionnalités des futures Mercedes-Nvidia, ce règlement est appelé à être évolutif. Une perspective en or pour les fabricants de logiciels dont les marges induites sont immenses : 80 à 90 % selon le site US Clean Technica citant Peter Mertens, ancien chef de la R&D de Audi, alors que les marges de l’industrie automobile restent campées à quelques pourcents… Un expert très critique face au manque de réactivité des constructeurs pour s’assurer la maîtrise de la partie logicielle, si prépondérante. Avec cet accord avec Nvidia, Mercedes semble pour sa part avoir une réponse qui pourrait le satisfaire.
Mais tout cela reste de la théorie tant que le public n’est pas prêt à accepter ces changements de paradigme. Une récente étude de l’Ifop pour NetApp (leader mondial de la sauvegarde informatique en ligne – le fameux « cloud ») montre que les automobilistes français ne sont pas réellement prêts à faire confiance à l’intelligence artificielle des véhicules autonomes.
Ainsi, seuls 37 % des sondés trouvent bien que leur voiture freine automatiquement pour éviter une collision, 34 % se réjouissent d’une alerte sur leur état de fatigue avant l’endormissement au volant, tout comme pour l’alerte de dangers dans le trafic environnant. Quant aux véhicules 100 % autonomes, le verdict est clair : seuls 12 % des sondés se laisseraient volontiers conduire par un tel modèle.
En Allemagne, où le même sondage a été conduit, les chiffres sont plus élevés de quelques pourcents. Voilà de quoi motiver les services de communication pour tenter de convaincre l’opinion publique que, oui, la conduite autonome sera autrement plus sûre que celle sous jugement humain.
Bilan
Mercedes se prépare à une révolution dont les contours réglementaires restent flous. Heureusement, tout l’intérêt de laisser autant de pouvoir à la partie logicielle d’une automobile est de lui offrir une forme de flexibilité jamais vue auparavant. C’est peut-être là, plus qu’en prestations immédiates, que la marque allemande fait une grande avancée.
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