L'élection américaine est aussi une histoire de voitures
L'INFO DU JOUR - L'élection américaine, dont l'issue devrait être connue plus ou moins rapidement, oppose deux visions de l'automobile US. Mais si Kamala Harris va certainement prolonger l'action de son prédécesseur en faveur de la voiture électrique, Donald Trump est plutôt fluctuant sur le sujet. En revanche, il souhaite taxer les autos importées, y compris lorsque elles sont de provenance européenne.
Kamala Harris, lors d'un meeting en Pennsylvanie le 4 novembre. crédit Photo DAVID MUSE/EPA/MaxPPP.
On ignore tout des opinions politiques de Carlos Tavares. En revanche, si le patron de Stellantis était un électeur américain, on sait qu’il ne voterait pas pour Donald Trump. Car les délocalisations possiblement envisagées d’usines Chrysler et Jeep ne sont pas au goût du candidat républicain.
Selon l’agence Reuters, le candidat républicain aurait déclaré : « dites à Stellantis que s'ils envisagent de déménager, nous leur appliquerons des droits de douane de 100 % sur chaque voiture... et ils ne bougeront pas ». Simple menace ou vraie ambition économique ? Toujours est-il que pour Donald Trump, comme pour Kamala Harris, l’industrie automobile américaine est plus qu’un sujet anecdotique : c’est un véritable enjeu politique. Entre autres car le Michigan est l’un de ces « swing states » qui peuvent faire basculer l’élection d’un côté ou de l’autre.
L'enjeu du Michigan et de Motorcity
C’est que ce coin du nord des États-Unis est depuis le début du XXe siècle l’État de l’automobile. C’est à Détroit, sa plus grande ville, mais pas sa capitale qui est Lansing, que les constructeurs américains ont leur siège, de Chrysler à General Motors en passant par Ford. Même si ce dernier est installé à Dearborn, à quelques encablures de Motorcity.
Ceux qu’on appelait aux temps glorieux les « big three » ont connu, et leurs centaines de milliers d’ouvriers avec eux, des sacrées secousses depuis quarante ans. Et depuis 2016, le Michigan, traditionnellement acquis aux Démocrates est plutôt réceptif aux discours populistes de Trump. Alors ce dernier essaye de conserver leur vote, et Kamala Harris tente de le reconquérir.
Cette dernière a marqué un point, ou plutôt, c’est son prédécesseur à la candidature suprême qui lui a obtenu. À l’automne 2023, le puissant, et presque unique, syndicat de l’automobile UAW a incité ses adhérents à se mettre en grève pendant plusieurs semaines pour obtenir de substantielles augmentations. Joe Biden, fait unique dans l’histoire des États-Unis pour un président, s’est rendu lui-même sur les piquets de grève pour les soutenir. Non seulement quelques semaines plus tard les ouvriers ont obtenu 25% d’augmentation, mais Shawn Fain, le patron de l’UAW, qui travaille chez Stellantis, a demandé à ses troupes de voter pour Biden, puis Kamala Harris.
Évidemment, Trump ne s’est pas avoué battu. Pour s’adjuger les suffrages, il a commencé par désigner le diable et le responsable de tous les maux de l’auto : la voiture électrique, un discours qui séduit jusqu’aux adhérents de l’UAW, divisé au sujet du vote depuis des mois.
Dans un discours qu’il a prononcé à Milwaukee, dans le Wisconsin, un État voisin du Michigan ou se trouve, entre autres, le siège de Harley-Davidson, le candidat républicain a parlé « d’arnaque verte » en évoquant les autos à batterie. Et de fustiger l’IRA, (l’inflation reduction act) et ses 300 milliards de dollars octroyés par l’administration Biden pour favoriser la transition énergétique, et la bascule vers la voiture électrique.
Une vision changeante de la voiture électrique
Visiblement, Trump préfère les bons vieux V8 aux batteries, mais son opinion est plutôt fluctuante au sujet de la transition que connaît l’industrie automobile. D’une part, depuis que le patron de Tesla a posé des dizaines de millions de dollars sur la table des donations aux Républicains, leur candidat a quelque peu infléchi son discours sur la voiture électrique, allant jusqu’à reconnaître, aux côtés d’Elon Musk, dans un meeting en Georgie au mois d'août dernier, « Je suis pour les voitures électriques, je dois l'être parce qu'Elon m'a fortement soutenu. »
Ensuite, selon les observateurs, et selon les responsables de TotalEnergies, Trump ne remettra pas l’Ira en cause. Parce que de nombreux industriels en ont profité, et souhaitent en profiter encore, pour rapatrier leurs usines aux États-Unis, une volonté de relocalisation défendue par le Républicain. D’autres part parce que le Congrès, par qui cette abrogation devrait passer, reste à (très légère) dominante démocrate et le restera au moins jusqu'aux élections de mi-mandat dans deux ans.
Au final, les constructeurs américains ont donc peu à craindre de cette élection, en ce qui concerne leurs petites affaires. En revanche, les marques européennes, quant à elles, ont tout à redouter en cas d’élection de Donald Trump. Luca de Meo mise sur les États-Unis pour atteindre les 150 000 Alpine qu’il souhaite vendre d’ici 5 ans, sans pour autant les fabriquer sur place.
Même problème pour le groupe Volkswagen qui souhaite débarquer là-bas avec Cupra. Quant à Stellantis, outre la délocalisation de ses marques américaines qui pourraient lui causer des soucis, la galaxie prévoit un retour aux US de sa marque italienne Alfa Romeo. Mais si le futur SUV Alpine A390, le Cupra Terramar ou le remplaçant de l’Alfa Stelvio sont affublés d’une taxe à l’entrée du pays de 100%, on ne donne pas cher de leurs pneus.
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