Interview : Yannick Bureau : "Nous avons retrouvé nos valeurs"
Ce 76e Bol d'Or était une étape importante pour le team 18 puisqu'après 2 ans de disette, il fallait aux hommes de Yannick Bureau montrer que le potentiel était encore là. Pourtant, si le début de week-end s'avérait studieux et profitable, les premiers instants de courses en avaient décidé autrement. Mais c'était sans compter sur la motivation et les valeurs du team 18. 12e au drapeau à damier, toute l'équipe a réalisé une remontée à diffuser dans les écoles d'endurance. Yannick Bureau, team manager des hommes en rouge revient pour nous sur cette course « référence ».
Vous arrivez au Bol avec une moto qui semblait difficile à contrôler de l'arrière. Qu'en est-il lors des premiers roulages du mardi ?
Entre les essais pré-bol et ce premier roulage, nous avons beaucoup réfléchie et beaucoup travaillé. Depuis longtemps, nous utilisions des bras oscillants fabriqués par un partenaire et sur notre BMW, nous n'avons jamais réussi à bien le faire fonctionner. Nous avons donc décidé de remettre un bras d'origine sur lequel nous avons-nous même adapté le système de changement rapide de roue. Et cela a tout de suite fonctionné.
Excuse-moi de l'expression, mais vous êtes quand même des grands malades au team 18. Vous changez de machine et 1 an après, vous fabriquez vos propres pièces. Comment en arrive-t-on là ?
Cela fait des années que nous courrons en endurance. Nous avons acquis une certaine expérience et des compétences que nous avons utilisées. On prouve ainsi que nous avons de vraies capacités techniques de conceptions et que l'on sait faire des choses. On peut aller plus vite mais il nous faut du roulage maintenant.
Les essais se passent plutôt bien même si vous partez 17e sur la grille. Un résultat loin de vos capacités mais la course est longue. Pourtant, avant la fin du 1er tour, Sébastien chute et ramène la moto bien amochée. Comment gères-tu cette situation ?
Depuis le début de la semaine, nous travaillons sereinement et avons bien avancé ce qui nous permet d'avoir une machine bien réglée pour le sec. Pourtant, les conditions étaient difficiles, ça s'envole dans tous les sens le jeudi mais nous, nous faisons notre bonhomme de chemin. Et à 30 minutes du départ, il se met à pleuvoir. Sébastien chute avant la fin du premier tour. Ca arrive. Moi, je me dis, ça y est, nos vieux démons reviennent, ça ne peut pas en rester là, on va repartir. Et là, l'équipe a fait un travail formidable car tout le monde en voulait et personne n'était abattu.
Vous repartez en dernière position.
On repart 55e oui avec 5 tours de retard sur le 54e ce qui est énorme. Et à partir de là, nous partons pour une formidable épopée, une remontée fantastique pourtant émaillé par d'autres soucis telle qu'une panne d'essence en haut du circuit. Suite à la chute, nous avions un problème de voyant de jauge mais après recherche, c'est notre derrick qui ne remplissait pas bien le réservoir. On s'est adapté à ce problème en nous disant que nous remonterions. Nous ne nous sommes pas affolés. Cela faisait très longtemps que je n'avais pas vu un esprit aussi combatif dans l'équipe.
Pourtant, une nouvelle chute intervient à 3h de la fin.
Tout à fait sans compter un double changement de pneus lié à un décalage entre un changement de pneu et l'arrivée de la pluie. Sans ça, nous aurions pu revenir dans le top 10 mais pour nous, cette 12e place sonne comme une victoire. On hurlait, nous étions tous très heureux. Sur le muret, j'ai hurlé quelques noms d'oiseaux, rageur en me disant, ça y est, ça revient. Enfin, on a ce que l'on mérite, on brise cette spirale qui nous tirait vers le fond. Vraiment cette 12e place fait un bien fou. Cela peut paraître surprenant pour une équipe qui a déjà réalisé un podium ici mais pour moi, ce 76e Bol d'Or est une course référence pour de nombreuses raisons.
On sent dans ton discours que tu as retrouvé l'équipe du team 18 tel que tu l'as connu en 2009.
Tout à fait. Dans le froid, dans l'humidité, j'ai vraiment retrouvé une équipe soudée, professionnelle. J'ai retrouvé les qualités techniques que nous avions un peu perdu, des valeurs de cohésion humaine, des valeurs de travail qui avaient commencé à disparaitre depuis 2 ans de disette. Et puis, j'ai reçu des centaines de SMS pendant la course et notre formidable remontée. J'ai vraiment senti que nous n'étions pas mort, que les gens étaient derrière nous. L'engouement est toujours là. Et maintenant, on sait que nos choix techniques sur cette moto sont les bons, que ça tient 24 heures donc c'est très bon pour le moral. Tout ça fait que cela fait une belle course.
L'équipe technique a pourtant été mise à rude épreuve.
J'ai retrouvé dans mon équipe technique une gestion des faits de course comme je l'avais connu en 2009. Pourtant, les 2 dernières années nous ont fait perdre des automatismes ce qui fait que c'est encore plus dur de revenir. Mais là, j'ai vraiment l'impression que nous avons franchi une nouvelle étape dans notre progression
Et cette S-1000-RR alors ?
Avec Guy, notre chef mécanicien, on s'est dit que c'est une sacrée machine. Elle ne serait pas allemande, je dirai que c'est une horloge suisse. Ca tourne très bien, et maintenant, on arrive vraiment à la comprendre. On sait que l'on peut aller encore plus vite mais il nous faut du roulage.
C'est plutôt de bons augures pour le Mans alors ?
Effectivement, nous aurons moins de pression au Mans. Je ne te cache pas que quand j'ai fait la route pour Magny-Cours, je me suis dit que nous n'avions pas le droit à l'erreur. Non seulement pour le moral de l'équipe, des pilotes mais aussi des partenaires. Et le faire sur une course de 24h, ce qu'il y a de plus indécis pour une équipe, cela me mettait beaucoup de pression. Mais là, le contrat est largement rempli parce que faire 12e après être partie du fond de la cave, c'est un résultat exceptionnel.
Photo : Site du team 18
Déposer un commentaire
Alerte de modération
Alerte de modération