France: l'hémorragie de stations-service continue
Paradoxe: alors que la consommation de produits pétroliers ne cesse d'augmenter en France, on assiste à une désertification rapide du réseau de stations-services. Un phénomène préoccupant dans les zones peu urbanisées, où la distribution de carburant pourrait presque être assimilée à un service public.
L’Union française des industries pétrolière (UFIP) tenait hier sa conférence de presse annuelle. L’occasion pour elle de faire part de son pessimisme sur l’évolution du prix du gazole à l’horizon 2030, lequel pourrait atteindre 1,8 € le litre à l’horizon 2030. Pas de panique toutefois, dans la mesure où l’organisme se trompe très régulièrement dans ses prévisions. Début 2014, il annonçait par exemple que les prix du carburant allaient considérablement augmenter dans les trois années à venir, et l’on pourrait multiplier les exemples de ce type à l’envi, comme pour confirmer les paroles de Pierre Dac selon qui « La prévision est difficile, surtout quand elle concerne l’avenir »..
Par contre, il est un chiffre plus inquiétant donné par l’Ufip hier. Celui-ci concerne l’inquiétante érosion du nombre de stations-services. En 1980, on comptait ainsi 40 000 points de distribution de type traditionnel, auxquels s’ajoutaient 1500 grandes et moyennes surfaces (GMS). En 2015, on n'a plus dénombré que 6197 stations traditionnelles pour 5072 GMS (61% de part de marché en 2015), ce qui donne un total de 11 269 points de ravitaillement.
De 15 à 38 minutes pour trouver une station
Soit une baisse de 84,5% du nombre de stations traditionnelles en 35 ans, avec pour corollaire des difficultés croissantes pour trouver des points d’approvisionnement hors des zones urbanisées. Ainsi, près de 4 millions de français seraient menacés par cette désertification du réseau, tant à la campagne qu’en région parisienne : « un quart de la population doit accomplir plus de 5 kilomètres en moyenne pour atteindre une première station. Dans 38 départements français, l’automobiliste doit rouler de 15 à 38 minutes», détaille la Fédération nationale de l’artisanat automobile (FNAA).
Dans une lettre ouverte commune adressée à la Présidence de la République en juin 2015, la FNAA et l’Association des maires ruraux de France s’alarmaient de cette hémorragie en ces termes : « Comme vous le savez, notre maillage territorial des stations-service est l’un des plus faibles d’Europe. De 40 000 stations traditionnelles en 1980, nous n'en dénombrons plus que 6325 en 2014. Cela est essentiellement dû au déploiement de la grande distribution. La situation est telle que selon un rapport de l’IGF, 871 stations sont appelées stations clés dont la disparition plongerait des milliers d’automobilistes dans un désert d’offre en carburants. […] Dans beaucoup de régions sinistrées où les commerces de proximité ont fermé les uns après les autres, la station-service est pourtant devenue l’ultime point de ravitaillement en produits de première nécessité assurant de fait un service public vital pour ces territoires. La filière génère par ailleurs 30 000 emplois non délocalisables rien qu’en station auxquels sont indirectement liés des milliers d’emplois des services associés tels que la réparation automobile, la carrosserie, le dépannage.
La FNAA en appelle aujourd’hui à l’ensemble des représentants de la Nation pour que la distribution de carburants en France devienne un sujet majeur d’intérêt général dépassant tout clivage. Il en va de la survie du lien social et la vitalité économique de nombreux départements. »
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