Enquête - Qui achète encore du diesel?
Certes, les immatriculations de diesel ne cessent de baisser sur le marché du neuf. Pour autant, un automobiliste sur cinq se laisse encore tenter, tandis que les modèles d'occasion se vendent encore très facilement. En d'autres termes, le diesel en a encore sous la pédale. Voici pourquoi.
« Le diesel est mort », entend-on souvent. Mais un mort bien vivace ainsi qu’en attestent des ventes encore importantes. Sur les huit premiers mois de l’année, les modèles carburant au gazole ont encore représenté 22 % des immatriculations de voitures neuves en France, soit 1 505 unités par jour ouvré. Si les chiffres baissent de façon régulière depuis quelques années, ils restent spectaculaires.
On est certes loin, bien loin des 52% enregistrés en 2016, mais on constate que plus d’un acheteur sur cinq refuse encore de se laisser impressionner par les anathèmes écolos (rejets de Nox, de particules, etc.) qui se multiplient ces derniers temps à l’encontre des moteurs carburant à l’huile lourde.
Qui sont ces réfractaires ? Majoritairement des entreprises pour leurs flottes, mais aussi des particuliers qui cherchent des véhicules en adéquation avec leurs besoins, tout simplement.
Des gens qui effectuent des kilométrages annuels élevés, et qui gardent en tête que les modèles récents, bénéficiant d’une vignette Crit’Air 2, leur permettront d’accéder au cœur des villes plusieurs années encore, et ce en dépit de la multiplication à venir des Zones à faibles émissions (ZFE).
« Le bon sens du citoyen fait son œuvre », explique Christophe Maurel, past-President de la branche concessionnaires du CNPA (Conseil national des Professions de l’Automobile), interrogé par Caradisiac.
« Ces motorisations gardent l’avantage d’une consommation modérée, inférieure à la plupart des hybrides, et donc d’un bon bilan CO2. D’autre part, les blocs hybridés n’offrent pas toujours la même polyvalence que leurs homologues diesel. »
C’est ainsi que chez Peugeot, où la « culture » du diesel a longtemps prévalu, les ventes de ces motorisations restent conséquentes, même dans les gammes inférieures.
De fait, 41% des 2008 vendues depuis le début de l’année sont des versions BlueHDi. Ce chiffre grimpe à 42,5% sur la berline familiale 508, 44% sur le SUV-star 3008, et même 58% sur le 5008, SUV familial.
Pourtant, on ne peut pas dire que la marque communique encore beaucoup sur le sujet! Ces derniers temps, son discours publicitaire s’est clairement concentré sur l’hybride et l’électrique. Mais une fois en concession, il faut croire que les vendeurs savent encore employer les bons vieux arguments pro-gazole, au premier rang desquels figurent les économies réalisées à la pompe.
La C4, dont Citroën s’enorgueillit du bon démarrage commercial (numéro 1 des ventes aux particuliers de berlines du segment C au premier semestre), séduit elle aussi beaucoup en diesel. Sur les six premiers mois de l’année, 39% des immatriculations en France (et 31% en Europe) concernent des versions BlueHDi.
Côté premium, le gazole n’a pas non plus dit son dernier mot. Cette semaine, BMW a par exemple dévoilé la déclinaison M440d xDrive de sa Série 4 cabriolet. Au programme : 340 ch, un couple de 700 Nm et 5 secondes pour passer de 0 à 100 km/h.
Pour une technologie aussi critiquée, voici un sacré porte-drapeau ! A plus forte raison quand il est brandi par un constructeur en pleine mue électrique, mais qui s’attache aussi à répondre aux aspirations de ses clients plus traditionnels.
L'occasion pied au plancher
On le voit, les marques continuent donc d’alimenter largement le marché du neuf avec leurs nouveautés, ce qui profitera aussi directement à celui de la seconde main.
Dans ce secteur aussi, le diesel continue de se tailler la part de lion. « L’érosion est là, mais n’a rien de spectaculaire » témoigne Vincent Hancart, Directeur général d’AS24 France, site spécialisé dans la recherche de modèles d’occasion. « Les requêtes concernant le diesel restent majoritaires au premier semestre, de l’ordre de 57%. En 2019, on était à 61,9% sur l’ensemble de l’année. »
Constatation plus nuancée de la part de Jérôme Ponsin, Directeur général du groupe La Centrale (auquel appartient aussi Caradisiac) : « Sur La Centrale, où les recherches étaient en faveur du diesel il y a encore quelques années, on note désormais une inversion avec une prépondérance de l’essence, conséquence du diesel-bashing. L’écart a continué de se creuser ces derniers mois, et notamment depuis mars 2021. Mais restons prudents, l’écart reste faible. C’est une tendance de fond, très lente. On ne peut en aucun cas parler d’un rejet radical du diesel de la part du consommateur. »
Pour inexorable qu’il soit, le déclin du diesel sera très progressif, et ralenti par le fait que les constructeurs continuent d’en équiper leurs nouveautés (et non des moindres), lesquelles alimenteront par la suite un marché de l’occasion très vivace.
Cette technologie correspond encore aux besoins d’une grande partie d’automobilistes, dans un contexte où le choix de telle ou telle motorisation vire désormais au casse-tête. Entre l’essence, le diesel, l’hybride (rechargeable ou non) et l’électrique , il est parfois bien difficile de s’y retrouver.
Seule solution en ce cas, faire appel à son bon sens. Et savoir cocher l’option diesel si on roule beaucoup et loin, si on a envie de traverser la France sans trop multiplier les arrêts-ravitaillement, et si on cherche à maîtriser son bilan carbone.
Sur un long trajet parcouru à vitesse stabilisée - et électrique mis à part - le « vilain » diesel reste en effet le champion incontesté des émissions de CO2. Sous l'influence du greenwashing ambiant, on aurait parfois tendance à oublier certaines évidences.
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