Championnat du monde FIA Gran Turismo : plus intéressant que la F1 ?
Mi-novembre 2018 s'est tenu à Monaco les finales du championnat du monde FIA Gran Turismo aussi bien constructeur que pilote. Tout cela est bien mignon et à l'heure de l'esport on ne peut plus nier le niveau de compétitivité des concurrents, mais est-ce aussi intéressant à regarder que la F1 par exemple ?
L'évènement était retransmis en direct sur internet via les flux habituels (Facebook, Youtube, etc) avec un peu plus d'un million de spectateurs cumulés.
Championnat contructeur 2018 : LEXUS
Ont fini titré Lexus avec une team issue de trois continents différents :
- Vincent Rigaud (France, gamertag : Oscaro_SkyPikmin) qui fait partie de la team Oscaro esport
- Tyrell Meadows (USA, gamertag : GT_Academy2013)
- Kanata Kawakami (Japon, gamertag Kawakana222)
La finale était intense et la BOP (balance des performances) permirent aux équipes de mélanger majoritairement des GT3 mais aussi des concept car et des LMS. Peu importe, au final le plateau se tenait à quelques dixièmes prêts et si les passages aux stands sont importants (c'est le moment où le pilote sort de son baquet pour de vrai afin d'alterner avec ses coéquipiers) c'est uniquement parce que le public suit avec intérêt la stratégie des pneus.
Suivant les courses deux à trois changements de pneus étaient obligatoires avec parfois l'obligation de passer par les trois types de gommes (tendre, normale, dure) et parfois pas. Et si personne ne se double dans les stands, toute la stratégie et le rythme se joue sur les pneus et la maestria des pilotes.
Au dernier tour du Nürb nous avions une Porsche en pneus durs qui avait mené la course en tête quasi depuis le début, dépassée par une Lexus en pneus moyens qui donnait le rythme mais derrière se tenait tout le suspens du dernier tour.
Car derrière ces deux autos une Nissan conduite par un certain Igor Fraga (qui remportera le championnat pilote le lendemain) en pneus tendres continue de tordre le chrono et d'enflammer tout le monde. Cela fait plusieurs tours que l'on a fait le calcul. Les pneus tendres sont plus rapides de 6 secondes au tour (Nordschleife + GP) que les moyens et 12 secondes plus rapides que les durs. Au talent et mathématiquement Igor a gagné la course et devrait mener Nissan sur le podium.
Le dernier tour sera un tour en apnée pour tous les spectateurs et la remontée de la Nissan se passe même un peu plus vite que prévue pour arriver dans le dos de la Porsche et de la Lexus encore plus vite que prévu.
Mais ce qui n'était pas dans les tablettes c'était la Toyota en quatrième position qui s'est transcendée sur les derniers tours et colle au train de la Nissan bien qu’elle soit chaussée de pneus moyens ! Et derrière suivent une Aston Martin et une Mitsubishi toutes les deux en pneus tendres. On sent venir un dernier tour plus mémorable que jamais mais nous étions loin de la vérité.
Et dans ce dernier tour, plus rien ne se passa comme prévu. La Lexus s'envolait avec des chronos en pneus moyens qui ne devaient pas se tenir, le pilote étant en plein état de grâce. Derrière la Nissan se mettaient à faire des erreurs sous la pression et même si elle remontait, elle se mettait tout doucement hors de portée de la Lexus alors qu'elle n'allait faire qu'une bouchée de la Porsche.
Et là, dans le dernier kilomètre de ce circuit de quasiment 26km combiné, voilà que la Nissan... tombe en panne d'essence en plein dépassement à trois de front. Le problème est arrivé si vite, la Nissan reléguée si vite derrière, une fin improbable que personne n'avait vu arriver.
La BMW qui avait fait la pôle a fini 11ème sur 16, la Nissan qui remontait tout le monde a fini 10ème dans le dernier kilomètre, ces courses d'endurance / sprint en équipe assuraient un suspens comme on en voit plus en F1 depuis longtemps.
Vous pouvez regarder cette course via cette vidéo :
Championnat du monde FIA Gran Turismo : plus intéressant que la F1 ?
Championnat pilote 2018 : Igor Fraga (Brésil)
Igor Fraga, favori annoncé de cette finale du championnat du monde FIA Gran Turismo avait fort à prouver depuis sa déconvenue la veille au volant de la Nissan.
C'est un habitué des victoires esport mais aussi le champion 2017 de F3 au brésil, second au championnat FIA F4 Nacam 2018 et actuellement en formule Cooper Tires USF2000 aux USA. Un beau pedigree à vingt ans.
Après une course constructeur nerveuse la veille, la couronne pilote est attribué sur cinq occasions de marquer des points. Les pilotes apportent avec eux les points de leur demi-finale (il y en a eu deux le vendredi) puis les points de trois courses disputées d'affilée le dimanche avant de se lancer dans la quatrième course dont les points comptent double.
Igor Fraga, grand favori, arrive avec le maximum de points, remporte les deux premières courses mais dans la troisième plonge 11ème car il se trompe dans les ravitaillements puis roule très lentement en pneus durs, c'est la plongée et tout le monde le pense en perte à cause de l'erreur la veille en Nissan (panne sèche) et maintenant sur les ravitaillements (un en trop et repart en pneus durs les plus lents), bref c'est la perte et Fraga va devoir démarrer la dernière course dont les points comptent double en 11ème place. Dur.
Et là pendant que ça se bat devant, Igor va faire un choix de pneus intelligent, va rouler dans les temps des pneus moyens alors qu'il roule en pneus durs et dépassera des concurrents en pneus tendres alors qu'il roulait en pneus moyens, bref les esprits s'échauffent et commencent à comprendre que la remontée est immuable. Les derniers tours seront une démonstration de force de Fraga, dont on a pu douter mais qui a bluffé tout le monde et fait une dernière course à un rythme impossible à suivre alors qu'il remontait les 10 voitures devant lui. La salle était en liesse, sur internet les flux de commentaires s'échauffaient, les commentateurs n'en pouvaient plus et c'était fini. Fraga champion mérité.
Les courses sont visibles ici :
Championnat du monde FIA Gran Turismo : plus intéressant que la F1 ?
Est-ce que les courses esport / le championnat FIA Gran Turismo sont intéressants à suivre à la TV ?
Ou plutôt sur l'ordinateur si vous n'avez pas une TV connectée à youtube ou autre flux disponible pendant les évènements. Parce que quel que soit le sport mécanique que vous suivez en tant que spectacteur, vous et moi ne sommes que spectateur, donc pourquoi pas l'esport ?
La réponse est simple, c'est un grand oui et un grand non mais pour cela tout dépend de vous.
Les défauts de l'esport en tant que spectateur
Les quelques défauts de l'esport sont un peu d'ordre technique. Il faut suivre le compte facebook, twitter, ou autre, pour être au courant des dates car ce n'est pas annoncé à la TV classique et il n'y a que peu de chance que votre collègue de travail vous prévienne des dates des différentes courses à la pause-café. Sauf si je suis votre collègue bien évidemment.
Ensuite on peut s'étonner de certains mélanges liés au plateau. Des constructeurs qui ne font plus de sport auto dans la catégorie que l'on regarde, des concepts cars posés sur la piste, une BoP qui m'a fait voir une course où se croisait une Honda S2000 amuse, une Diablo GT et une 996 GT3 par exemple, ou découvrir une Veyron dans une course contre des voitures a priori plus adaptées à la piste. Je vous laisse aussi découvrir la voiture "no limit" de la dernière course du championnat pilote, c'est assez spécial ce que Redbull a imaginé comme F1 sans règles".
Enfin il reste l'aspect émotionnel de l'homme qui domine la machine mécanique. Si piloter au rythme d'un top concurrent esport demande du talent et du travail, on est loin de l'imaginaire héroïque que l'on accole souvent aux exploits sur la piste. Regardez du côté du Moto GP, sans doute l'une des compétitions de piste les plus bluffantes, les pilotes sont des génies doublés de fous vu les risques pris en simple combinaison à quelques cm les uns des autres et on ne parle même pas du Tourist Trophy de l'île de Man.
Les avantages de l'esport du point de vue d'un spectateur
Tout d'abord la couverture est excellente, gratuite, les angles de caméra sont infinis, les commentateurs ne sont plus une ancienne gloire X ou Y blasée de ne plus avoir de volant et qui apporte ses rancœurs et ses biais face à des pilotes et des écuries en place. Rigolez pas, vous avez sans doute déjà suivi une course avec un tel présentateur.
Ensuite les circuits imaginaires nous changent des habituels et sur la piste peuvent se retrouver des voitures inhabituelles. Bref la formule peut, en deux ou trois heures de temps, faire courir un concept car de salon, une McLaren F1, une F50, tout est possible et c'est assez original.
Enfin la compétition est bel et bien présente et ce pour toutes les écuries. Ici il n'y a pas le devant du plateau qui peut gagner et le reste qui joue les figurants. Le summum survient lorsque la course emprunte un circuit classique bien connu, une voiture unique et identique pour tous, là la guerre est sanglante et seul le talent peut déterminer le vainqueur, les courses à 16 voitures qui peuvent vraiment gagner et des finish mémorables, ça devient rare non ?
Petit bonus, pour quelques euros on peut tenter de se qualifier pour le championnat de l'année suivante, il suffit d'une console et si vous roulez bien, vous serez invités. Bon ok, il vous faudra beaucoup de temps, de talent et investir dans un volant. Mais quel sport mécanique est à ce point accessible ? Quand on refait les courses entre potes spectacteurs, on les refait au volant, sur la même piste, les mêmes conditions, les mêmes autos, ça a un petit quelque chose de magique et ça nous remet vite en place quant aux temps de nos maigres exploits à nous.
FIA Championnat Gran Turismo 2018 : vivement 2019
La saison 2018 est finie, on peut continuer de jouer mais on sera au rendez-vous l'an prochain. N'oubliez pas qu'en plus de Gran Turismo les championnats FIA esport comprennent aussi un championnat WRC, F1, Le Mans, WEC, WTCR, bref le choix est là et hors FIA la majeure partie des grands jeux de course ont leur championnat.
On sera là en 2019 pour les suivre, pas forcément tous, pas forcément les reporter sur Caradisiac car le sport auto n'est pas la thématique centrale du site, mais si l'idée ne vous semble pas totalement saugrenue et que vous croisez la diffusion de l'une ou l'autre course, essayez déjà pour vous faire une idée du plaisir et de l'ambiance, le spectacle est gratuit et n'est pas limité à tel ou tel système de retransmission, en général il y a en a toujours un compatible avec l'appareil le plus proche de vous.
Caradisiac a aimé
- L'intensité des courses
- Le fait que les concurrents ont tous les mêmes chance
- Voyager d'un continent à l'autre le temps d'une finale, c'est original
- Le plateau des possibles (circuits, voitures, relais) le temps d'un championnat est infini
- Refaire la course entre potes après la course dans les exactes mêmes conditions
- Le prix d'entrée est nettement moins filtrant que le plus modeste des sports autos
- Il y a des caméras absolument partout, merci les jeux vidéos, tous les angles sont possibles
- Les deux finales contenaient autant de moment forts qu'une saison entière de F1
Caradisiac n'a pas aimé
- On aimerait tout de même voir les pilotes faire une dernière course "réelle", c'est notre côté cambouis d'amateurs de sports mécaniques du XXème siècle
- Le son des voitures est nettement moins convaincant qu'en vrai (là c'est un défaut de Gran Turismo), les dégâts aussi (là c'est valable pour tous les jeux), ils étaient désactivés dans ce championnat d'ailleurs
- Il faut faire le deuil de l'exploit humain, du danger, de ce qui crée le mythe des pilotes
- On peut passer à côté des dates de transmission si on ne fait pas attention
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