L'INRA est le premier Institut de recherche agronomique en Europe et le deuxième dans le monde. Il mène des recherches finalisées pour un environnement préservé. Il indique qu'une de ses équipes de chercheurs a fait une découverte importante et que leurs travaux ont été publiés dans la revue "Nature" du 8 novembre 2007 : l’élément déterminant de la stabilité des stocks de carbone dans les couches profondes du sol (au-delà de 20 cm) est la déficience en substrat fournisseur d'énergie. Ainsi, l’absence de litières végétales, racines et feuilles mortes, riches en énergie, empêche les micro-organismes de s'y développer et décomposer le carbone.
Afin d'identifier ces paramètres, l'INRA mentionne que les chercheurs ont utilisé un profil de sol situé dans l’Observatoire de Recherche en Environnement (ORE) sur les prairies permanentes mis en place à Clermont-Ferrand en 2003. L'effet prévu du réchauffement climatique devrait donc être revu à la baisse pour ces réserves profondes, contrairement aux prévisions actuelles qui indiquent une stimulation de la décomposition de larges réserves de carbone situées dans ces sols profonds, accélérant ainsi l’augmentation du CO2 atmosphérique.
L'INRA détaille l'étude : les sols, le plus grand réservoir de carbone
"Les sols dans le monde représentent un réservoir de carbone de 615 milliards de tonnes pour la couche allant jusqu'à 20 cm de profondeur, et de 2 344 milliards de tonnes si l’inventaire est étendu à 3 m de profondeur. Ces stocks réunis représentent plus que la biomasse et le CO2 atmosphérique combinés. Le temps moyen de résidence du carbone organique du sol s’accroît fortement avec la profondeur, atteignant entre 2 000 et 10 000 ans dans les couches dites profondes, c'est-à-dire supérieures à 20 cm. Cependant, si les mécanismes de décomposition du carbone par l'action de micro-organismes contenus dans le sol sont connus, les facteurs à l’origine de la stabilité du carbone organique dans les couches profondes n'ont pas été identifiés précisément. Connaître ces facteurs est donc essentiel pour déterminer si le changement climatique peut activer ou non la décomposition de ce large réservoir de carbone profond et accélérer l’augmentation du CO2 atmosphérique.
Pour identifier ces paramètres, les chercheurs de l'INRA ont utilisé un profil de sol situé dans l’Observatoire de Recherche en Environnement (ORE) sur les prairies permanentes mis en place dans le Massif Central par l’INRA de Clermont-Ferrand en 2003. Le site est occupé par une prairie permanente depuis 50 ans et était couvert il y a 2 000 ans par une forêt de charmes et de châtaigniers. La datation au carbone 14 du carbone du sol indique que les matières organiques stockées dans les couches profondes sont anciennes et proviennent de ces forêts disparues. Les chercheurs ont étudié une couche profonde de ce sol (entre 60 cm et 80 cm) contenant du carbone organique ayant un âge moyen de 2600 ans. Ils ont observé que la dégradation microbienne de ce carbone ancien est fortement stimulée lorsqu’on apporte de la litière végétale. Cette litière, qui n'est pas présente à l'état naturel dans ces couches profondes, apporte l’énergie nécessaire au développement des micro-organismes qui réalisent la décomposition du carbone « humifié » du sol. Ce résultat confirme l’idée, déjà suggérée par la même équipe en 2005, que c'est l’absence de litière végétale, source d’énergie essentielle pour les microbes du sol, qui est la clé de la stabilité du carbone organique dans les couches profondes
Un nouvel horizon pour les stratégies de stockage de carbone dans les sols ?
Ces résultats suggèrent que, même si les conditions de température et d’humidité sont favorables aux activités microbiennes, le carbone organique présent dans les couches profondes ne contient pas assez d’énergie disponible pour alimenter des populations microbiennes actives et donc la production d’enzymes qui vont décomposer le carbone. L’existence de cette barrière énergétique pourrait donc réduire l’effet du réchauffement global sur la décomposition de ces larges réserves de carbone profond, en contradiction avec l’effet prévu par les modèles actuels qui se basent sur l’accélération des vitesses de réactions enzymatiques avec l’augmentation de la température (théorie d’Arrhenius). Stocker le carbone dans les couches profondes constitue une alternative intéressante, car stable à long terme, aux approches actuelles qui se basent sur un stockage du carbone à court terme sous forme de biomasse végétale ou de carbone organique dans les couches de surface du sol.
Réversibilité du stockage dans les couches profondes
Ces résultats montrent aussi que la décomposition du carbone organique profond peut être réactivée, comme réalisée par les chercheurs. Cela signifie que les changements d’utilisation des terres et des pratiques agricoles qui favorisent une pénétration des racines et de leurs dépôts de litière en profondeur (par exemple, le travail du sol profond ou l'utilisation de plantes résistantes à la sécheresse à racines profondes) pourraient stimuler la perte de ce carbone ancien. Des recherches complémentaires dans d’autres types de sol devraient compléter ces résultats en vue de les valider à une échelle plus générale. Cependant, étant donné que la décomposition microbienne est limitée par la disponibilité en énergie dans de nombreux sols et que la faible disponibilité des litières en profondeur repose sur une propriété fondamentale des écosystèmes (les plantes vivent et déposent leur litière en surface), les chercheurs estiment que ces résultats sont généralisables à de nombreux sols, à l'exclusion des sols inondés ou gelés, dans lesquels la décomposition microbienne est limitée par d’autres facteurs."
(Source : INRA)
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