50 km/h sur le périphérique parisien, la santé publique évoquée par la mairie est-elle le bon argument ?
Lionel Bret , mis à jour
La mairie de Paris souhaite réduire la vitesse maximale sur le périphérique à 50 km/h « courant octobre ». Une question de "santé publique " pour Anne Hidalgo, la maire de Paris. Mais est-ce vraiment la seule raison ?
Dans un entretien accordé au quotidien Ouest France ce 1er septembre, la maire de Paris annonce vouloir faire passer la vitesse maximale sur le périphérique paris de 70 km/h actuellement à 50 km/h " courant octobre (...) Une mesure de santé publique pour les 500 000 personnes " qui vivent aux abords de la route la plus empruntée d’Europe.
Il est pourtant difficile de préjuger de l’impact environnemental d’un passage à 50 km/h. Selon l’Ademe¹ (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) "la majorité des études montre un effet plutôt positif sur les émissions et les concentrations de polluants Au-dessus de 70 km/h, les réductions de vitesse ont un effet plutôt positif sur les émissions de particules et d'oxydes d'azote. En dessous de 70 km/h, cet effet est plutôt négatif. En pratique, la situation est plus complexe puisqu'il faut tenir compte notamment de l'effet de la limitation de vitesse sur la congestion. " Quant à l’impact sonore, l’ensemble des études montre " une réduction des émissions de 0,2 à 3 dB". Et de préciser qu'au-delà de la vitesse, le revêtement routier joue également un rôle important dans la propagation du bruit.
L'ingénieur à Airparif Antoine Trouche affiche une position mesurée au sujet des 50 km/h. " Si la réduction de la vitesse permet de diminuer les embouteillages " alors oui, l’effet environnemental sera palpable. Au-delà des questions de pollution et de santé publique, se pose la question de sécurité comme un argument sérieux à la réduction de la vitesse sur le périph’.
Une voie réservée au covoiturage
Dans un rapport le Cerema (Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement) a bien préconisé le passage à 50 km/h sur le périphérique. Mais l’argument portait davantage sur la sécurité routière, en lien avec la création d'une voie dédiée au covoiturage et aux transports publics. Dans son entretien à Ouest France, la maire de Paris souhaite transformer l'actuelle file affectée aux véhicules officiels des JO en « une voie de covoiturage, réservée aux taxis, aux particuliers qui circulent à plusieurs et aux transports en commune ». David Belliard, l'adjoint en charge des Transports à la mairie de Paris confirme l'argument de la sécurité au micro de France Bleu en avril dernier. " Le Cerema, qui est l'organisme de référence sur ces sujets, nous dit que si nous faisons une voie dédiée, il est nécessaire pour des raisons de sécurité et pour favoriser la fluidité du trafic, de limiter en tout cas de réduire la vitesse maximale autorisée de 70 à 50 km/h ". Le précédent abaissement de la vitesse maximale sur le périph’ (de 80 km/h à 70 km/ en 2014) n’avait engendré aucune amélioration de l’accidentologie à long terme. Malgré ces résultats peu probants et le manque d'études d'impacts pointé par les opposants au projet, l'adjoint d'Anne Hidalgo soutient que "Le périphérique parisien passera à 50 km/h cet automne, sauf si l’État nous attaque." ² L'administration n'a pour l'heure pas bougé. La première riposte est venue de 40 millions d'automobilistes. L'association annonce ce 2 septembre saisir le préfet de police en vue d'annihiler toute possibilité d''appliquer cette décision. Le début d'un bras de fer juridique et politique.
Continuer l'aménagement de Paris
L’annonce du projet en novembre 2023, dans le cadre du plan climat de la ville de Paris, avait suscité un tollé de la part de l'opposition parisienne et du gouvernement. Lors du Conseil de Paris du 22 mai dernier le préfet de police de la capitale, Laurent Nuñez, a affirmé aux élus parisiens qu'ils auraient besoin de son approbation non seulement pour réduire la vitesse, mais aussi pour maintenir la voie de covoiturage. Le préfet peut émettre des directives dans ce domaine. Anne Hidalgo avait rétorqué qu’il serait impossible de faire sans elle non plus. Et de préciser vouloir avancer " dans le respect du droit. Il y aura peut-être des contentieux, de la bataille, mais à la fin il se passera exactement ce qui s’est passé sur la fermeture des voies sur berge ", prévoit Anne Hidalgo. Dans son programme pour les municipales de 2020, la maire de Paris avait déjà annoncé désirer " un périphérique apaisé ". À même d'exacerber les passions et d'enflammer le débat.
1 ADEME : impacte des limitations de vitesse sur la qualité de l'air, le climat, l'énergie et le bruit
2 Le parisien 10 janvier 2024
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