Essai Aprilia Tuono 1000R 2k7 Akra : la Superbike dénudée
Pour le millésime 2006, Aprilia a totalement revu son Tuono, qui n'est autre que la version dépouillée de la sportive musclée de la marque italienne, le RSV. Un roadster qui ne fait pas dans la dentelle, affichant une qualité de finition impressionnante et une vocation innée à casser du chrono. La version avec la ligne complète Akrapovic ne fait qu'accentuer son côté racing et achève un look légèrement en marge des lignes actuelles. Peu évoqué dans la presse spécialisée par rapport à ses concurrents directs que son le Z1000, le Speed Triple et la SuperDuke, il n'en reste pas moins un incontournable de la catégorie et un autre avis n'est pas de trop sur le blog moto pour rétablir un peu la balance.
Nous voici sur le parvis de la concession Méga Bike, associée à Méga Motos, qui borde l'autoroute d'Aix en Provence. La chaleur matinale écrasante me fait déjà regretter d'avoir opté pour le pantalon en cuir. Xavier nous accueille et nous guide à l'intérieur où trône la Tuono 1000R modèle 2007. Il l'avait disposée de telle sorte à nous la présenter sous son meilleur profil, à savoir, son postérieur. D'origine, la coque arrière agrémentée des trois feux crystal, identique à celle de la version carénée, est déjà un chef d'œuvre. Compléter le tout avec un capot de selle qui finit parfaitement la ligne et deux silencieux Akrapovic full-barouf, et vous risquer de dégainer votre chéquier sans même vous en rendre compte !
Sur cette version, le capot de selle a laissé sa place à une selle passager rouge, accessoire provenant du modèle 2006, accompagné de deux poignées, ce qui représente un détail fort agréable et généralement très apprécié des passagers. Comme d'habitude, il faudra faire un choix entre l'agrément esthétique qui va de pair avec une once d'égoïsme, ou le côté pratique que représente votre élan de générosité. Dans tous les cas, ne vous inquiétez pas, la moto est très belle. Pour vous en convaincre, vous n'aurez qu'à laisser promener votre regard le long des flancs de la machine, continuer par le bras oscillant en alu, véritable pièce d'orfèvrerie, le regarder s'étendre dans une divine danse avec chacun des maillons de la chaîne jusqu'à la jante bâton d'un bleu nocturne saisissant. Les pièces sont soignées, parfaitement adaptées, judicieusement optimisées. C'est du beau travail.
On remonte sur l'imposant réservoir dont les arrêtes ont été dessinées pour que vos membres inférieurs viennent s'y loger. Sa forme volumineuse en fait l'une des pièces dont l'esthétisme ne laisse pas indifférent. J'avoue pour ma part qu'autant je trouve cette partie très belle dans le coloris noir, autant je suis plus réservé sur le modèle rouge et blanc que l'on a sous les yeux. En tout cas, le cadre qui le souligne est lui aussi d'une beauté difficilement critiquable. Les étriers radiaux Brembo aux 4 pistons acérés sont les baïonnettes des larges fourreaux de 43 mm de la fourche inversée Showa. Des déflecteurs surplombent le radiateur pour préserver les jambes du pilote de l'air glacial lors des trajets d'hiver. Ah, ils savent prendre soin de leurs clients chez Aprilia !
Lorsqu'on achève le tour d'inspection du bolide et qu'on le regarde de face, effectivement, on comprend que ça ne fasse pas l'unanimité. Une tête de fourche certes mieux réussie que sur le modèle précédent mais qui laisse un goût de peut mieux faire. Très imposante, composée de deux grands phares tels les yeux d'un insecte surdimensionné dont la bouche béante rouge sang laisse imaginer ses envies de carnivore. C'est pour le moins intimidant. Mais cette bouche n'est autre que l'entrée d'air forcé du Tuono qui insuffle trois purs-sangs supplémentaires au moulin quand il pousse le galop.
La récurrente impatience de l'essai se fait sentir depuis déjà trop longtemps. Je me place aux commandes et un "whaaaaaaaaa" s'échappe de mon casque. C'est trop bien. Commençant à avoir l'habitude de me résoudre à être plié au guidon de mon CBR, j'apprécie de retrouver une position plus droite mais sans perdre pour autant la rigidité d'un châssis de sportive. Loin des gabarits compacts du Speed Triple, SuperDuke ou autre XB12S, la Tuono ravira les motards un peu plus grands que la moyenne. Le large guidon droit tombe parfaitement sous les bras. Chacune des pièces sous nos yeux met en avant le degré de finition de la machine, que ce soit les tés de fourche, le ponté du guidon, les durits avia, on appréciera aussi de jeter un œil au compteur, qui n'a désormais plus rien à voir avec l'horrible modèle archaïque qui le précédait.
Un tour de clé, le compteur digital s'allume alors que l'aiguille du compte-tours montre au pilote les régimes moteurs dont il pourra user et abuser. Les informations de l'écran sont très complètes avec le tachymètre et les deux trips de rigueur, l'horloge et la température moteur. On retrouve aussi un chronomètre que l'on active grâce à un commodo situé près de la poignée gauche. Petite particularité, la commande de klaxon se trouve au dessus de celle des clignotants, contrairement à ce que l'on voit sur la majorité des modèles. Ca peut paraître futile mais croyez moi, on se laisse souvent piéger !
Une pression sur le démarreur et le V-Twin se met en marche. La ligne complète Akrapovic laisse échapper un souffle rauque et un nombre insolent de décibels. Grand amateur de bicylindres en liberté, je ne vous cache pas que je jubile littéralement sous mon casque à l'écoute de cette puissante mélodie qui m'enivre. Des petites rotations de la poignée de gaz semblent provoquer la colère des deux silencieux qui n'en ont que le nom. Ce petit jeu a un goût d'interdit dont je ne me lasse pas. L'Akra est aux motards ce que la sirène est aux marins : une sublime invention dont la beauté chavirante et le chant enivrant finissent toujours par séduire celui qui lui prête attention.
En toute légalité par contre, la moto est amputée de 27 chevaux pour répondre à notre extraordinaire législation française. Là où le bas blesse, c'est que la moto est toute neuve, avec seulement quelques kilomètres au compteur, en plein début rodage. Autant dire qu'il sera très difficile de juger des capacités du moteur dans ces conditions, avec un régime maximal atteint dès les 6500 tr/min. Le voyant de réserve est allumé. Allons remplir le flacon, en espérant que la Tuono nous donnera malgré tout l'ivresse.
On repart de la station et on prend la double voie qui sort d'Aix en Provence. Le feu passe au vert, un démarrage calme en première, une petite cirette sur l'embrayage et la Tuono se dresse avec une facilité déconcertante. On repose vite fait histoire de ne pas nuire au rodage. Les premières courbes qui suivent s'enchaîneront en toute quiétude. Le large guidon offre une très bonne prise et décuple l'agilité de la machine. Le gros jouet s'emmène avec un peu de conviction mais s'avère d'une précision redoutable.
Très facile de prise en main, la partie cycle y ajoute une sérénité très agréable. Dommage de ne pas pouvoir l'exploiter d'avantage vu que le moteur ne nous offre qu'un infime pourcentage de son potentiel. Il reprend assez bien bas dans les tours, mais le shift-light nous rappelle à l'ordre dès que l'on atteint la limite supérieure du régime de rodage. Quelle frustration ! Il ne nous reste d'autre choix que d'enrouler et de s'amuser avec l'équipement fournit de série par Aprilia.
Arrivé un peu fort sur le virage, je presse le levier droit pour que les pistons Brembo viennent pousser chacun leur propre plaquette contre le disque alors que la moto est déjà sur l'angle. L'efficacité du freinage est impressionnante, et ce en offrant une progressivité et un feeling tout simplement parfaits. La moto continue exactement sur sa trajectoire, les suspensions ne bougent pas du moindre millimètre. Une poigne de fer dans un gant de velours. Il me tarde d'arriver fort dans le prochain virage pour pouvoir réitérer l'expérience !
Les courbes s'enchaînent les unes après les autres, sur un rythme de croisière et distillant de très bonnes sensations au pilote. Difficile de la mettre en porte-à-faux puisqu'elle est répond systématiquement à notre volonté. Moins vive qu'une SuperDuke, elle joue la carte de la stabilité et de la rigidité de la sportive dont elle est issue. Ceci se traduit par un effort supplémentaire du pilote pour lui indiquer sa trajectoire, mais aussi une confiance constante en retour sur les comportements du bolide.
Sur chaque bout de ligne droite, il faudra se coucher sur le large réservoir pour espérer profiter de la protection qu'offre l'atypique tête de fourche. Mais bon, il serait mal venu de la critiquer sur ce point car si l'on veut préserver nos cervicales, on n'achète pas un roadster. Tiens, voilà que le voyant de réserve s'allume à nouveau. La Tuono serait-elle gourmande ? Définitivement oui !
Encore quelques virages à enchaîner, avec de plus en plus de facilité au fur et à mesure que l'on s'approprie le mode de fonctionnement. Un contre-braquage, un léger déhancher, et on emmène le gros roadster sur un rail vers la sortie de la courbe. C'est atroce de ne pas pouvoir exploiter pleinement ce moteur qui doit avoir tellement de vie quand il est en pleine possession de ses moyens.
Un nouveau look particulièrement réussi, une qualité d'équipements et de finition exemplaire, un comportement routier irréprochable. J'aurais aimé finir cette liste d'éloges avec celles du bouillant V-Twin italien mais malheureusement, ça relèverait plus de la prémonition que du véritable constat. Quoi qu'il en soit, Aprilia a sérieusement frappé très fort en proposant ce roadster sportif très polyvalent et sans compromis. Proposé à un prix relativement raisonnable de 11 899 €, il devrait réjouir tous les motards lassés de la position trop fatigante des sportives et non satisfaits des parties cycles moins exigeantes de certains gros roadsters. En tout cas, un nouvel essai s'imposera dès que le moteur de ce modèle d'essai sera rodé, il est hors de question que je reste sur ma faim comme ça, c'est trop'injuste !
Remerciements à Xavier de Méga Bike, n'hésitez pas à lui rendre visite :
Méga Bike - Méga Motos
300, Chemin Roger Martin
13090 Aix en Provence
Tél : 04-42-94-39-43
... et un grand merci à Nico the Shooter qui est venu jouer les photographes !
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