BMW K 1200 S 2005 : La sportive germanique
La firme allemande a rompu la tradition de son légendaire flat twin pour donner naissance au premier quatre cylindres transversal de la marque, et par là même le plus puissant qu'elle n'ait jamais conçu. Placé au sein d'une sportive au gabarit plus qu'imposant, toutes les interrogations étaient permises concernant son comportement routier. Une moto longue, lourde et bridée à 107 cv en France, difficile de penser qu'elle allait inquiéter les sportives japonaises qui dominent le marché depuis de nombreuses années. Mais quelque chose laissait penser que cette K 1200 S allait nous réserver quelques bonnes surprises...
Réveil difficile à 8h30 un samedi matin mais le rendez-vous était donné une heure plus tard avec mon team de choc devant la concession BMW Europe Moto à Marseille. Michael nous a accueilli pour nous présenter l'objet de notre curiosité.
La K 1200 S nous attendait dans le hall, avec sa robe jaune et noire, ses formes anguleuses et son large regard. Petite présentation sommaire par le maître des lieux qui nous explique que c'est une version française donc bridée à 107 cv au lieu des 167 normalement disponibles.
Elle pèse 227 kg à sec, près de 250 kg avec les pleins faits, donc c'est un beau bébé que nous avons là. Malgré ce poids, elle abat le 0 à 100 km/h en 2,8 secondes avec son couple de 130 Nm dont 70% est disponible dès les 3500 tr/min.
Elle dispose de la fourche Duolever qui a été modifiée pour contenir la masse de l'engin et aussi sa cavalerie. La suspension progressive arrière est basée sur des combinés ressort/amortisseurs à gaz totalement réglables en détente et en précontrainte.
Et c'est alors que nous découvrons le tableau de la belle, qui comprend un ordinateur de bord à la pointe de la technologie. Deux compteurs analogiques de compte-tours et de vitesse sont à côté de l'écran digital qui affiche le kilométrage total et journalier, l'heure, la température d'eau et la jauge de réserve d'essence. Jusqu'ici, rien de bien folklorique.
Mais on y retrouve aussi le rapport de boîte enclenché, l'autonomie kilométrique restante lorsque l'on est en réserve, la température extérieure avec un avertisseur de risque de verglas, des afficheurs d'incidents et la fabuleuse option ESA. "ESA ?" me direz-vous, pour Electronic Suspension Adjustment, comme son nom l'indique, correspond au système de tarage électronique des suspensions. A l'aide d'un bouton sur le guidon, vous allez configurer la précontrainte du ressort de l'amortisseur arrière et à l'étage de détente et de compression de l'amortisseur avant. Concrètement, comment ça se passe ? Il vous suffit d'indiquer si vous roulez seul ou à deux, avec ou sans bagage et si vous voulez rouler de manière normale, confortable ou sportive. N'est-ce pas génial ? Pour l'essai, je vais commencer par préciser que je suis seul, sans bagage et en conduite normale, ça sera très bien.
En option, l'ordinateur de bord : kilométrage à parcourir jusqu'au prochain plein, vitesse et consommation moyenne, niveau et température d'huile. L'électronique ne s'arrête pas là, puisque la K 1200 S est équipée du SWS pour Single-Wire-System permettant l'interconnexion des composants électriques et électroniques avec un minimum de câbles. Finis les fusibles obsolètes, tout est informatisé et géré en temps réel, avec arrêt d'un des éléments lors d'un court-circuit ou autre panne, et mémorisation des configurations et des diagnostics des capteurs. A la mise du contact, l'état de la moto est passé à la loupe par ses différents capteurs électroniques pour être certain que tout fonctionne correctement, et cela ne prend que quelques secondes.
La clé de contact contient un système d'anti-démarrage électronique EWS. Et pour finir, ce joli tableau de bord se met à s'éclairer en fin de journée, grâce à une cellule photosensible.
Je finirai de jouer avec tous ces gadgets plus tard, il est grand temps que je m'installe à bord. La selle est confortable, les commandes tombent bien sous la main et la position rappelle celle d'une Sportivo-GT du genre VFR, pas trop en appui sur les poignets et correctement basculée en avant. Je trouve cette moto agréablement adaptée à ma taille, mes jambes trouvent bien leur place dans le prolongement du carénage.
Je tourne la clé et le système de détection analyse les différents composants de la moto. Seul le voyant ABS clignote, en attendant la première pression sur le levier de frein pour m'informer que tout est ok. Alors c'est parti, direction l'autoroute. L'angle de braquage est correct pour une moto de ce gabarit, et je manœuvre en ville sans trop de difficulté. L'entrée d'autoroute se profile, la moto s'y engage sans sourcilier en sortie de rond-point, le centre de gravité à l'air étonnement bas. En effet, les quatre cylindres font face à la route et sont inclinés de 55° ce qui a pour effet d'abaisser le centre de gravité tout en déportant la charge sur la roue avant. Le résultat est probant, la moto est assez vive et ferait presque oublier l'empattement démesuré de ce modèle.
Sur la file de gauche, bien abrité derrière la large bulle, je laisse le compteur monter gentiment. Ce dernier laisse partir la cavalerie dès les 3000 tr/min, et émet un son rauque à chaque accélération. La poussée se fait bien sentir dès le début et augmente jusqu'à 7000 tr/min où ce satané bridage vient couper court à l'envolée et assagit les sensations. Cependant, ce serait mentir que de dire que cette version bridée est totalement aseptisée. La plage d'utilisation permet d'obtenir de bonnes relances et une allonge tout à fait correcte.
On sort de l'autoroute à Aubagne pour tester le comportement de la K 1200 S sur route sinueuse. La première section comprendra des virages assez rapides. Doubler les voitures ne présente aucune difficulté avec le couple disponible à bas régime. La voie est enfin libre, je vais pouvoir me concentrer sur la trajectoire. Une petite pression sur le bouton ESA et voilà la moto configurée en conduite sportive.
Freinage en entrée de courbe, le levier de frein est souple, très progressif, de plus en plus efficace. Il offre un feeling de très grande qualité. Cette version dispose de l'option ABS Intégral Sport : une pression sur le frein avant actionne le frein avant mais aussi l'arrière (un peu comme le dual CBS de Honda). On dose à souhait le freinage selon le type de conduite.
C'est peut être le meilleur freinage que j'ai eu l'occasion d'essayer, pas forcément en terme de puissance, mais en feeling. De plus, la suspension avant est d'une efficacité impressionnante, le train avant ne se tasse pas lors du freinage, même sur un gros freinage de trappeur. On conduit ce gros missile en toute sérénité. La position du centre de gravité permet de la mettre sur l'angle sans difficulté. Je remonte donc ainsi le col de l'ange en prenant de plus en plus confiance.
Mes genoux viennent au contact du flanc de carénage, ce qui me rajoute deux nouveaux points d'appui intéressants pour envoyer la moto d'un côté puis de l'autre. Le poids et l'empattement de la machine se font oublier au profit de la facilité et de l'agrément de conduite.
Je commence vraiment à bien m'amuser, bien couché sur la machine, elle avale les courbes avec une facilité déconcertante.
Un R1 me surprend dans une courbe en me faisant l'extérieur très proprement. Je profite de l'occasion pour me mettre dans sa roue et le suivre un moment. La BMW fait quasiment 50 kg de plus et pourtant, elle prend les courbes avec autant de facilité que la Yamaha, et son moteur a l'air aussi bien rempli. Il accélère fort en sortie de courbe mais il ne me lâche pas, je l'ai dans ma ligne de mire, et mon destrier en fait une affaire d'orgueil. Le son qui s'échappe de l'allemande est vraiment grisant, ça chante à chaque accélération en montant dans les aigus, c'est le pied !
Petite pause devant la ligne droite du circuit pour que le groupe se rassemble. Je repars aux côtés de Nico qui est sur le Z1000 en full, l'occasion de faire un petit test de reprise. On se met sur le dernier rapport, je lui montre le chiffre "trois" avec ma main gauche, puis "deux", puis "un" et gaz !!! La BMW prend une légère avance bas dans les tours et commence à s'éloigner...mais dès que l'on atteint 6500 tr/min, je vois le Z qui revient au galop pour m'enrhumer littéralement à haut régime. Les 1200 cm3 de la BMW donnent un couple important à bas régime, mais le bridage à 107 cv se fait sentir à 7000 tr/min où là, il n'y a plus rien, bien que la zone rouge ne comment qu'à 11000 tr/min.
Peu importe, nous voilà arrivés à la deuxième portion de route qui, elle, contient des virages plus serrés que la précédente. Confiant de ma prise en main de la machine je commence à attaquer cette descente le couteau entre le dents, bien décidé à faire couler de l'adrénaline dans mes veines. La route vient d'être totalement refaite, le bitume est d'un noir ténébreux et offre une accroche parfaite. Sur les virages serrés, je m'étonne de sortir large alors que tout avait été piloté à l'instinct jusqu'ici.
Sur des gauche-droite, je réalise que la rigolade est finie et qu'il faut maintenant durcir la conduite pour qu'elle suive bien la trajectoire désirée. C'est une autre paire de manche ! Se déhancher un peu n'est pas du luxe, il faut se jeter vers la corde pour ne pas qu'elle s'en éloigne de trop, puis relever le tout pour la lancer de l'autre côté. Cette gymnastique m'impose de ralentir le rythme et demande une bonne concentration pour ne pas se faire surprendre. J'enroulerai alors les derniers virages pour arriver jusqu'au Beausset. Je passe alors le guidon à mes camarades qui eux aussi la trouveront très facile de prise en main, un peu dure à emmener dans les virages serrés et redoutables sur les courbes un peu plus larges.
Petit détail auquel nous n'avons pas encore fait allusion : le prix. Le modèle de base est disponible à 15 750 € et peut arriver aux alentours de 19 000 € avec l'ABS intégral, l'ESA, les suspensions Öhlins, les jantes sportives et autres options du catalogue. A ce prix là, vous aurez bien entendu un équipement de très bonne facture, avec notamment ce tableau de bord digne d'une berline, ce châssis si particulier et ce nouveau moteur quatre cylindres. Ce n'est définitivement pas une hypersport destinée à abattre des chronos sur piste.
La BMW K 1200 S sort son épingle du jeu par une qualité de conduite étonnante, une sérénité dans les courbes à vitesse élevée, un confort agréable pour une moto à vocation sportive et un moteur très disponible, avec une sonorité dont on ne se lasse pas. L'autre côté de la médaille est du à son poids et son empattement qui la rendent difficile à manier à basse vitesse et lors des changements d'angle rapides. Toutefois, elle conviendra parfaitement à ceux qui recherchent une moto sportive sans pour autant être exclusive. Une moto qui vous emmènera en balade duo sans nuire au dos et au postérieur de votre compagne, mais qui vous offrira quand même de très bonnes sensations quand vous déciderez de jouer de l'accélérateur.
Ce que je retiens essentiellement de cet essai, c'est la chute de mes à priori sur la marque allemande et ses modèles que je pensais destinés aux quinquagénaires lassés de montures sportives et préférant privilégier le confort au détriment de l'amusement. J'ai essayé une moto bourrée de technologie, très agréable à conduire et très efficace. Il ne reste plus qu'à gagner au Loto...
Merci à Michael ainsi qu'au reste de l'équipe d'Europe Moto à Marseille pour leur accueil et leur gentillesse. Si vous souhaitez passer les voir, voici leurs coordonnées :
BMW Europe Moto
140, Cours Lieutaud
13001 MARSEILLE
04 91 48 52 55
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